Le premier tour de l’élection du bâtonnier de Paris, premier parmi ses pairs, a lieu ce mardi. Et gare aux avocats qui oublieraient de se rendre dans l’isoloir.
Grands plaideurs et chineurs de dossiers, les avocats du barreau de Paris ne sont pas des perdreaux de l’année. Au moment d’entrer dans l’isoloir, aujourd’hui 9 décembre, pour déposer leurs bulletins qui enverront un heureux élu au bâtonnat de Paris, ces éminents discoureurs ont appris la leçon venue des élections prud’homales du 3 décembre dernier. Plus de 75% d’abstention.
Pour pallier à ce chiffre, un rien faiblard, l’Ordre des avocats de Paris, dont les élections se tiennent aujourd’hui, et dont le futur bâtonnier (qui prendra les rênes en 2010) sera désigné après deux tours de scrutin les 9 et 10 décembre, ont trouvé LA solution. Tout simplement établir une liste des mauvais élèves. À savoir les malotrus qui ne seront pas allés porter leur bulletin dans l’urne.
Un mail du secrétaire de l’ordre des avocats, chargé par le bâtonnier à l’organisation des élections atteste des modalités de cette désignation des cancres.
« Nous allons extraire des registres la liste de ceux de nos confrères qui n’auront pas voté le 9 décembre 2008. Cette liste vous sera adressée par mail une heure après la proclamation des résultats sans que je puisse donner une garantie précise sur l’heure à laquelle la proclamation des résultats interviendra elle-même. La liste ne comportera que les noms et prénoms des avocats qui n’auront pas voté. Vous la recevrez tous en même temps et elle n’est destinée qu’aux candidats au dauphinat. Je vous remercie donc de transmettre par mail à Thierry Berte qui se chargera de vous adresser cette liste, les coordonnées du poste électronique auquel nous devrons l’adresser Votre bien dévoué. Frédéric Sicard ».
Charmante attention. Adressé à tous les candidats au bâtonnat, ce gentil fichier ne correspond, selon l’ordre des avocats du barreau, « qu’à une simple liste d’émargement, comme il en existe lors de toute élection ». À ceci près que rares sont les élections locales ou nationales au cours desquelles, entre les deux tours, une liste des abstentionnistes est fournie aux candidats…
Et encore plus rares sont les élections où les votants et les abstentionnistes travaillent directement avec les candidats, parfois dans leurs propres cabinets…De quoi fluidifier les relations professionnelles.
Particulièrement ronchon quant à cette « simple liste d’émargement », le vilain petit canard du barreau de Paris, le syndicat d’avocats Cosal, a immédiatement pris sa plus belle plume pour écrire une missive à la CNIL, (Commission national de l’informatique et des libertés), compétente puisqu’une partie du vote se fait par voie électronique.
Outre la constitution d’un tel fichier, le Cosal, mauvais coucheur, doute de la « sincérité » de l’utilisation qui pourrait en être fait..
« Ainsi, ce fichier permettra à ces candidats, en identifiant les abstentionnistes, de cibler leur propagande sur cet électorat, de sorte de convaincre de participer au scrutin, et suggérer de retenir leur candidature », craint le syndicat bougon, dans sa lettre du 8 décembre à la CNIL.
Diantre, le jeu il est vrai en vaut la chandelle. Le bâtonnier du barreau de Paris dispose de menus avantages : un budget de voyage de 350 000 euros et la haute main sur un ordre dont le pactole s’élève à 52 millions d’euros.
De quoi financer, bien des soirées au Stringellow, une boîte de strip-tease parisienne. Ou la possibilité de retirer 10 000 euros en cash auprès d’une banque. Autant de manœuvres troublantes, objet d’une instruction judiciaire à Paris dont Bakchich s’est fait l’écho, et qui constitueront l’héritage du nouveau bâtonnier. L’heureux élu.
À lire ou relire dans Bakchich :
le même jour que celle du Bâtonnier de Paris, il y avait une autre élection, nationale : celle des membres du conseil national des Barreaux, une espèce de "machin" qui coûte fort cher aux avocats de France et de Navarre qu’il est censé représenter, pour proposer des "trucs".
Or chose étrange, comme dans certains états du tiers monde connaissant une parodie de démocratie, il aura fallu au Conseil National des Barreaux, pas moins de huit jours, pour collecter les suffrages exprimés dans les différents Barreaux, et pour annoncer les résultats du scrutin.
Chose étonnante : toutes les listes qui présentaient des candidats ont eu au moins un élu. Toutes ? Non…pas le syndicat Cosal, le poil à gratter des Barreaux, auquel les huiles de l’Avocature vouent une haine tenace. Il faut dire que l’intéressé est un empêcheur de magouiller en rond et s’est fait une spécialité de révéler ce qui se passe sous la robe, ce qui n’est pas toujours très reluisant. Notamment certaines gabegies financières du Barreau de Paris.
Il fallait donc à tout prix, limiter le ver dans le fruit. C’est ainsi qu’ayant deux élus sur le collège "Paris", et malgré le fait qu’il soit arrivé en tête du scrutin dans plusieurs barreaux (Avignon, Montpellier…), le "petit" Cosal n’a obtenu aucun élu en province, à…sept voix près ! huit jours pour annoncer les résultats du scrutin, une voix en moins par jour…
sachant en outre que dans certains Barreaux, des anomalies ont été déplorées, telle l’absence de bulletins "Cosal" empêchant donc de voter pour ce syndicat de gêneurs…
Les avocats seraient-ils quelque peu fâchés avec la démocratie ?
Tiens, on va voir jusqu’où la modération à priori est faite. Un petit lien qui montre la légèreté de votre travail de journaliste :
http://www.maitre-eolas.fr/2008/12/10/1241-chez-bakchich-on-n-aime-pas-les-avocats-ni-le-journalisme
Comme contre campagne de pub pour votre appel aux dons (ben oui, à ce niveau de journalisme, c’est faire un don), vous faites assez bien.