Lettre ouverte aux juristes africains pour protester contre la violation caractérisée de la souveraineté de l’Etat de Côte d’Ivoire et pour l’honneur de l’Afrique.
Actionnaire de Bakchich, qui n’a jamais été tendre avec les dérives du régime ivoirien en général et de son (toujours ?) chef d’Etat Laurent Gbagbo, Mohammed Aref lance un appel au calme sur la situation en Côte d’Ivoire. Et invite l’Union Africaine et le continent à mettre franchement les mains dans le cambouis ivoirien pour trouver une issue à la crise. Sans attendre, comme trop souvent, un coup de pouce de l’extérieur… Tribune.
Mesdames et Messieurs les Juristes du Continent africain, Chers Collègues,
Comme vous tous, j’ai constaté avec amertume et consternation les critiques ouvertement formulées par un fonctionnaire des Nations Unies et le Chef de l’Etat français à peine une heure après son prononcé à l’encontre d’une décision judiciaire rendue par le Conseil Constitutionnel de l’Etat souverain de Côte d’Ivoire.
Sans prendre partie le moins du monde en faveur ni contre la décision du Conseil Constitutionnel, de la CEI, de l’un ou l’autre des candidats ivoiriens, il est de notre devoir de relever :
1°/ qu’il n’appartient pas à un fonctionnaire d’une organisation internationale ni à un Chef d’Etat étranger de considérer comme quantité négligeable la décision prise par une instance judiciaire d’un Etat indépendant ;
2°/ qu’il existe des recours internationaux ouverts très largement tant aux parties en litige qu’à toute organisation qu’il s’agisse en particulier des organes des traités ou des autres organes et notamment ceux des Nations Unies organisés en application de la Charte des Nations Unies. La Côte d’Ivoire est partie entre autres à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi qu’à son protocole facultatif qui prévoient la possibilité d’un recours à l’encontre des décisions juridictionnelles d’un Etat qui peuvent ainsi être examinés par des experts du droit parfaitement indépendants tant des candidats que de l’ancien colonisateur que du représentant du Secrétaire Général des Nations Unies, davantage partie prenante dans le processus électoral ivoirien et en tout cas insusceptible d’avoir qualité pour apprécier une décision d’une instance juridictionnelle d’un Etat souverain qui n’a pas été mis sous tutelle de cette organisation.
3°/ qu’il est navrant et révoltant de constater une fois de plus que les instances d’un Etat africain indépendant sont méprisées outrageusement.
4°/ qu’il ne viendrait à l’idée de personne de dire que Al Gore a été élu aux lieu et place de Bush lors des élections on ne peut plus contestables intervenues aux Etats-Unis il y a à peine quelques années aux lieu et place des instances judiciaire américaines.
5°/ que la fameuse « communauté internationale » s’est bien gardée d’adopter la même attitude que celle intolérable qu’elle a prise pour la Côte d’Ivoire lorsqu’il s’est agi des élections qui se sont déroulées en Egypte et que, dans le même temps, la même « communauté internationale » a qualifié d’ « irrégulières » et de « frauduleuses ».
En conséquence, il nous appartient et il est temps pour nous d’exprimer notre révolte contre une nouvelle tentative de colonisation de notre Continent faute de quoi, nous allons soumettre la désignation des instances politiques dirigeantes de nos pays respectifs aux dictats des Chefs d’Etats des grandes puissances qui, comme nous le savons tous, ne sont mus que par les intérêts mercantiles de leurs propres pays et de leurs hommes d’affaires.
C’est pourquoi nous devons inviter la véritable communauté internationale à respecter l’Afrique et les Africains au même titre que ceux des autres continents.
Nous devons également encourager l’Union Africaine à persévérer dans la recherche d’un règlement politique accepté par les deux parties en litige et, à défaut, à soumettre le litige judiciaire qui oppose les deux candidats ivoiriens arrivés au deuxième tour à une instance internationale indépendante appartenant à notre continent, et ce, conformément aux Traités et Conventions signés par la Côte d’Ivoire en transmettant à cette instance le dossier du Conseil Constitutionnel ivoirien.
Un minimum de sursaut d’orgueil me semble indispensable pour défendre l’honneur de l’Afrique et donner un exemple de respect de la règle de droit ainsi que des institutions chargées de la dire.
A Djibouti, le 06 décembre 2010
AREF MOHAMED AREF
A lire ou relire sur Bakchich.info
Monsieur et cher frère,
Je m’interroge sur la dépendance qu’il y aurait forcément entre (i) appliquer nos lois et (ii) accepter que la France ou l’ONU nous dictent leurs points de vues et idéologie ….
Vous évoquez " la confusion et la précipitation qui ont régné après le scrutin" et qui ont amené le Conseil constitutionnel de la Côte d’Ivoire à commettre une faute, ce qui ne devrait toutefois pas "disqualifier" ledit Conseil….
Mais Monsieur, nous préparons ces élections depuis 5 ans maintenant ……
La confusion ne régnait pas ce jeudi 2 décembre 2010, le Conseil Constitutionnel, constatant le dépassement du délai de 3 jours dans lequel la CEI devait lui communiquer ses résultats, a sommé celle-ci de le faire ….. Ce qui fût fait. Il disposait alors de 7 jours pour réfléchir posément, sans précipitation et avoir toute la latitude à cerner les textes applicables à la situation, avant de délivrer sa décision.
Il a commis une "faute" dites vous …… Oui….. Et quelle faute … Une faute remettant en cause tout notre processus électoral…… Allons bon, le Conseil Constitutionnel commet une faute consistant à ne pas appliquer les textes fondamentaux, car agissant dans une précipitation qu’il s’impose, et cela ne le disqualifierait pas pour autant ? Le Conseil Constitutionnel serait donc souverain, se plaçant au dessus de la Constitution ?
En somme, nous devrions passer sur cet aspect là et nous concentrer sur notre lutte contre l’Occident ?? Sous prétexte qu’il penserait, également, au cas particulier, que nous n’avons pas appliqué notre droit ???
Vous voyez, ce type de raisonnement m’échappe totalement, certainement par manque de hauteur intellectuelle. J’ai la conviction qu’une démocratie ne se construit pas exclusivement sur la lutte contre l’envahisseur, sous quelle que forme qu’il agisse, mais également sur la consolidation d’acquis, parmi lesquels, des textes et des institutions qui les appliquent.
Alors non, Monsieur, nous ne sommes malheureusement pas d’accord. Nous n’existons pas si nous n’avons pas ce qu’il est convenu d’appeler des textes fondamentaux, une armature, un socle….. Dans cette mesure effectivement, tout peut nous arriver, n’importe qui peut nous imposer ce qu’il veut ….
Vous noterez par ailleurs, que je passe sur le mandat de la CEI qui aurait expiré, alors même que cet organe est partie prenante aux échéances électorales à venir, ni même sur la mission de certification fixée par la résolution 1765 de l’ONU, cette même mission de certification, que nous avons demandée, demande que nous avons signée ……. et qui, de facto, rentrait dans le droit positif applicable à nos élections …… C’est à ce moment là qu’il fallait refuser, ne pas signer….
Cordialement.
A bien lire toutes vos interventions je suis triste et profondement choké. 1. Tous les acteurs sont allés à ces elections malgré le fait que la situation du pays etait connu de tous : pas de desarmement et conseil cons à la solde du pouvoir (N’dré membre dur du FPI) 2.Les circonstances de l’annonce des résultats (Damanan qui arrache les feuilles au yeux de tous le mondes entier) 3.Mr DRE qui saute sur les resultats après que la RTI et autres maniguances pour empecher l’annonce des resultats. 4.N’DRE qui annonce les resultats après annulations de 7 regions où le candidat LMP a été ecraser.
Si c’est ça le respect des institution de ce pays qu’on defend tant vraiment pauvre de nous. Même si on n’aime pas le lièvre il faut reconnaitre sa rapidité. si c’est le GBAGBO qu’on connait bien avait gagné reellement ces elections là dieu serai avec lui. mais il a été trompé par ces partisants, certains mm appelle ADO. S’il vous plait arretons de nous justifier pour donner une certaine valeur institutionnelle a l’acte de Mr DRE. (Même si on reprend toutes les fois du monde gbagbo ne va jamais gagné dans ces zones dont il est question ça on le sait tous) prions pour Mr GBAGBO pour que la sagesse l’habite pour faire le choix d’une sortie honorable. 5ans c’est pas long si ADO fou la merde on organise des elections tous le monde va faire un vote sanction, mais de grace LG laisse bras de fer avec le blanc là ya pas victoire pour le CI dedans.
Monsieur,
En tant que juriste africaine, il me semble que le minimum de sursaut d’orgueil est d’appeler au respect de la règle de droit par les institutions chargées de l’appliquer.
Le Conseil Constitutionnel ivoirien est le seul habilité à donner les résultats définitifs de l’élection présidentielle, comme le prescrivent la Constitution ivoirienne et le Code Electoral.
Ce Code Electoral, dans ses articles 63 et 64, laisse à cet égard une option au Conseil Constitutionnel :
soit, après examen des réclamations éventuelles, proclamer le résultat définitif de l’élection présidentielle au vu des résultats provisoires proclamés par la CEI ;
soit, s’il constate des irrégularités graves de nature à entacher la sincérité du scrutin et à en affecter le résultat d’ensemble, prononcer l’annulation de l’élection, hypothèse dans laquelle une nouvelle date de scrutin est fixée par décret pris en Conseil des Ministres.
Ces textes sont l’armature même de notre jeune démocratie, le fondement de notre souveraineté, les outils qui, justement, auraient du nous permettre de ne pas en arriver à la situation désastreuse qui est la nôtre aujourd’hui.
Les irrégularités relevées dans les réclamations déposées par l’un des deux candidats, si elles étaient constatées et reconnues par le Conseil Constitutionnel, devaient amener celui-ci à annuler l’élection.
Ni le Code Electoral, ni la Constitution ne permettent au Conseil Constitutionnel de reformer les résultats provisoires de la CEI, contrairement d’ailleurs à ce qui est prévu pour les élections législatives.
Alors, en tant que juriste africaine, il me semble que notre devoir est, avant tout débat idéologique, de relever que nos textes fondamentaux ont été outrageusement bafoués.
Chère soeur, je suis tout à fait d’accord avec vous tout en partageant le point de vue et l’appel au sursaut de notre frère Mohamed Aref. Dans la confusion et la précipitation qui ont régné après le scrutin, le Conseil constitutionnel de la Côte d’Ivoire a commis une faute : celle d’annoncer Laurent Gbagbo vainqueur. Mais cela ne devrait pas disqualifier cette institution d’un État indépendant et SOUVERAIN, et ne donne aucun droit au représentant d’une organisation intergouvernementale de désigner à son tour un vainqueur. M. Choi et l’ONU avaient pour mandat de "certifier" le résultat des élections, sur la base des décisions prises par l’institution judiciaire -le Conseil constitutionnel- de l’Etat Membre -la Côte d’Ivoire-que les Nations Unies sont venues assister, avec son accord. La Côte d’Ivoire n’a jamais été l’objet d’une mise sous tutelle, que nous sachions. Ses institutions restent donc souveraines. La "Commission électorale indépendante" n’en est pas une. C’est un organe créé juste pour la circonstance de la tenue des élections, dont le mandat, purement technique, donc non juriduiquement contraignant, avait déjà expiré AVANT que son président, qui n’avait donc plus aucun statut et aucun pouvoir n’aille "proclamer" des résultats électoraux fictifs à l’hôtel du Golfe où se trouvait un des candidats, Mr Ouattara.
L’appel que lance Mr Aref est bien intentionné et parfaitement fondé. L’impasse politique en Côte d’Ivoire devrait être réglé en respectant les institutions ivoiriennes et la souveraineté de ce pays. Il n’appartient pas à des Etats étrangers, même "puissants", de venir dicter leur point de vue et leur idéologie aux Ivoiriens. Mr Sarkozy ferait donc bien de fermer sa grande gueule !. Les dirigeants africaisn quant à eux devraient, pour une fois, sortir de leurs trous et voir ce qui se profile derrière le drame ivoirien : une organisation internationale sous influence d’une poignée de pays -les 5 membres permanent du Conseil de sécurité- va-t-elle s’arroger, de manière pernicieuse, le droit de mettre entre parenthèses la souveraineté de certains Etats ? Va-t-on laisser que s’instaure la prérogative, au profit des membres permanents du Conseil de sécurité -notamment les 3 puissances "occidentales" et surtout la France, et dans une moinde mesure le Royaume-Uni- de "recoloniser", car c’est de cela qu’il s’agit, des territoires qui avaient commencé à s’émanciper en 1960 ?
Nous ne devons pas permettre qu’une de fois de plus, on profite de nos divisions internes pour nous asservir ! car là est le grand danger de l’époque que nous vivons ! Cela a eu lieu dans le passé. Des Africains ont vendu des Africains, croyant ainsi s’allier à des êtres venus d’ailleurs qui n’étaient mus que par un esprit de rapines insatiable. Nos ancêtres le regrettèrent quand ils furent à leur tour assujetis, colonisés, asservis et exploités sans retenue pendant plusieurs siècles. Bien que parmi certains ont eu des parents qui sont allés mourir sur les côtes de Provence pour libérer l’Europe de la dictature du nazisme et du fascisme, il fallu des luttes d’indépendance et le poids des grands vainqueurs du 2ème conflit mondial, Etats-Unis, Russie, dans uns moinde mesure, Chine, pour que la France et le Royaume-Uni commencent à accepter l’idée d’une décolonisation. Paris l’a fait à reculons, veillant à placer des hommes-liges là où il le fallait pour continuer à contrôler l’évolution des nous Etats au profit de al France. Nous ne devons JAMAIS l’oublier, car la liberté ne se donne pas. Elle s’arrache et doit être défendue, chaque jour, et par chaque génération. Et ce combat peut parfois être tortueux, difficile, semé d’embûches… Rappelons du Congo ex-belge. Dans la lutte pour le garder sous tutelle occidentale, l’ONU -toujours elle- y perdit un Secrétaire général, Dag Hammarskjöld. On en a fait un "héros". Mais la politique conduite par lui et ses maîtres occidentaux donna aux Congolais -devenus Zaïrois-un dictateur, Mobutu, et 50 années de larmes, de morts et de sang ! Quelle différence y-a-t-il aujourd’hui entre Ban Ki-moon/Choi et Hammarskjold ? Aucune ! L’ONU de 2010 ressemble étrangement à celle de 1960 !
Quand on sait que la France a dicté, rédigé et soumis depuis dix années au Conseil de sécurité TOUTES les résolutions portant sur la CÔte d’Ivoire, on ne peut qu’éprouver un profond malaise… Sans être partisan de laurent Gbagbo ou d’Alassane Ouattara, je dis basta et bas les pattes à tous ceux qui à l’Elysée, au Quai d’Orsay et au MEDEF veulent imposer à la tête de nos pays d’Afrique des gens qui seraient serviles, défenseurs d’intérêts qui ne sont pas ceux de nos parents, grands-aprents, cousins, tantes, oncles ou frères qui n’ont que trop souffert de la mainmise néocoloniale sur nos ressiources et notre devenir… C’est peut-être pour ça que Laurent Gbagbo, sans être parfait, a parlé de la nécessité d’une "deuxième indépendance" africaine. C’est ce que Thabo Mbeki et les panafricanistes/nationalistes sud africains appelent "African Renaissance"…