Bilan du voyage de Nicolas Sarkozy en Afrique du sud : la France a encore beaucoup à faire pour tirer profit de la toute nouvelle ressource financière que le charbon procure à Prétoria, qui en est le deuxième ou troisième, selon les années, exportateur mondial.
La récente visite de Nicolas Sarkozy en Afrique du sud avait un but officiel, dynamiser les relations commerciales avec ce pays et un but officieux : introduire définitivement l’épouse du galant dans les arcanes de la diplomatie mondiale. Le second objectif a été réalisé, et après les curiosités diverses sur la personnalité de Carla, il devient clair que la présidence de la République va ralentir sur le côté people de l’exercice du pouvoir.
En revanche, pour les Sud-africains, les Français restent des partenaires difficiles, pour ne pas dire incompréhensibles. Depuis la visite de Dominique de Villepin en 2003 en fait, qui était alors ministre des Affaires étrangères. Noyés sous la grandiloquente logorrhée du sieur Galouzeau, les Bafana avaient fini par en placer une : « l’Afrique était notre domaine, merci de laisser la place, notamment en Côte d’Ivoire ».
Les relations entre les deux pays, dès lors, sont bien évidemment excellentes, mais plutôt distantes. Or, l’Afrique du sud est devenue l’un des enjeux majeurs du commerce international. En effet, elle est le deuxième ou le troisième, selon les années, exportateur mondial de charbon. Et depuis 2003, le prix de la tonne de charbon est passé de 30 dollars à 135 dollars, soit une évolution plus importante que le prix du baril de pétrole. Résultat, le pouvoir d’achat de l’Afrique du sud a fait un bond spectaculaire. Elle avait deux possibilités. Soit accumuler les dollars de sa rente charbonnière, ce qu’elle a en partie réalisé en faisant passer les réserves de sa banque centrale de 6 milliards en 2003 à 25 milliards aujourd’hui ; soit augmenter ses importations et devenir un débouché intéressant pour les pays exportateurs. C’est surtout ce second choix qu’elle a fait si bien que le montant des importations sud-africaines est passé de 35 milliards de dollars en 2003 à 80 milliards en 2007.
Voilà une manne dont on aurait tort de se priver. Nicolas Sarkozy, qui prétend être le grand commis voyageur de notre commerce extérieur s’est donc précipité vers Prétoria. Cela ne fut guère concluant, le seul dossier sur lequel les Sud-africains sont preneurs est celui de la construction de centrales électriques. En effet, comme l’Iran – qui est un des principaux producteurs mondiaux de pétrole mais souffre de pénurie d’essence –, l’Afrique du sud est une des principales sources mondiales d’énergie et elle manque régulièrement d’électricité.
La croissance économique qui a atteint 6 % l’an ces dernières années marque le pas et en 2008 elle pourrait être réduite à 3 %, principalement par manque d’énergie. Les Sud-africains aimeraient des centrales thermiques mais le monde entier accuse ces centrales de contribuer grandement au réchauffement climatique. À Prétoria, on compte sur la Chine, non seulement pour plaider en faveur de l’attribution d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’Onu à l’Afrique du sud, une des obsessions de la diplomatie locale, mais encore pour venir à bout des foucades écologistes.
La France, quant à elle, a à proposer des centrales nucléaires [1]. Mais l’Afrique du sud, que l’on dit sur le point de disposer de l’arme atomique, ne veut pas que sous un prétexte quelconque, on vienne regarder ce qui se passe dans son secteur nucléaire. Bref, le message final retiré par les Français du voyage présidentiel fut le constat de beaux discours, de belles mais probablement vaines promesses. La France a encore beaucoup à faire pour tirer profit de la toute nouvelle ressource financière que le charbon procure à l’Afrique du sud.
[1] Paris avait déjà construit pour le régime d’apartheid, alors sous embargo, la centrale nucléaire de Koeberg, près du Cap, au début des années 80