L’art délicat de la défiscalisation expliqué aux amateurs de ballon rond par l’exemple de l’attaquant argentin passé du Real Valladolid au PSG puis à l’Olympique de Marseille.
Dimanche 25 octobre a lieu le « Classico » OM-PSG, l’un des temps forts de la saison 2009-2010 de la Ligue 1 de football. Cette année, la confrontation prend un relief particulier. Pour une fois les choix tactiques des deux entraîneurs ne sont pas en cause. Pas plus que les improbables débordements des supporters traditionnellement chauffés à blanc par les médias à coups de formules à l’emporte-pièce.
Non, cette année l’intérêt de l’affaire est ailleurs ; plus précisément dans le sort que va réserver Heinze, le rugueux mais non moins sympathique défenseur argentin de l’OM, aux attaquants du PSG, son ancien employeur.
On se souvient tous en effet de la dernière déclaration d’amour du joueur envers le club de la capitale. Le 21 juin, il avait confié à l’éphémère Aujourd’hui Sport qui allait cesser de paraître 8 jours plus tard : « je suis heureux de voir que le PSG se met de nouveau à gagner. Moi j’aime le PSG. J’ai ce club dans le cœur… » avant de se laisser finalement convaincre par Deschamps de rejoindre l’OM !
Une décision surprenante qui, compte tenu de ses prétentions salariales de l’ordre de 4 millions d’euros par an, a dû exiger de la part des dirigeants phocéens, des trésors d’imagination et de créativité dans le domaine de…l’ingénierie financière.
Un secteur du jeu dans lequel, à en juger par son séjour au PSG, Gaby sait susciter le meilleur d’eux-mêmes de la part de ses partenaires du moment…
Séquence « nostalgia y emocion » : le 18 juin 2001, Ivan Gabriel Heinze est transféré du Real Valladolid au PSG moyennant une indemnité de transfert de 27 600 000 francs. L’artiste se voit offrir un contrat de 5 ans au modeste salaire mensuel de 240 000 francs. Toutes primes comprises, son contrat négocié par l’intermédiaire d’un certain Roberto Rodriguez agissant en qualité « d’agent du club » - mais bien sûr ! – prévoit tout de même une rémunération totale de 24 050 000 francs.
Sauf que Gaby lui, ne l’entend pas du tout de cette oreille ; il exige comme toute vedette de son rang, de percevoir une rémunération nette de charges et d’impôt alors que son contrat porte évidemment sur un salaire brut avant impôt. Le compte est donc loin d’y être.
Au siège du club parisien, on est bien sûr rompu à l’exercice ; avant même la signature de Gaby, Pierre Frelot qu’on ne présente plus, confie à la société Soccer SA représentée par un certain… Roberto Rodriguez, une première "mission de supervision" (sic) justifiant une commission de 1 000 000 francs payables en 3 fois. Un acompte de US$40 000,00 est d’ailleurs viré séance tenante au crédit d’un compte ouvert à la Banco Credicoop Filial Tribunales de Buenos Aires. Tiens tiens…Juste un petit échauffement..
Le 15 mai, c’est le président Perpere qui remet le couvert en confiant à la société Quadris Sport Management Ltd, un faux facturier anglais représenté par un faux agent sportif suisse dénommé Robin Bolli, un mandat de recherche -pour un joueur déjà repéré donc- moyennant un commission de 2 000 000 francs payable en 4 fois. Dès le 30 juillet, un premier virement de 550 000 francs est effectué sur le compte de Quadris chez Barclays à Londres. 450 000 francs et 500 000 francs prendront successivement la même direction les 7 août 2002 et 13 août 2003.
En pleine forme, le président Perpere donne donc un nouveau mandat de négociation à Quadris le 1er juin 2001. Cette fois-ci c’est soi-disant pour faire baisser l’indemnité de transfert exigé par le club espagnol pour libérer « Gaby le gaucho ». Récompense de Quadris : 1 250 000 francs payés rubis sur l’ongle par un virement du 30 juillet 2001 au crédit du compte Barclays déjà mentionné ; Vaya que buena !…
Août 2002 : le viril Gaby a donné toute satisfaction à ses employeurs au cours de sa première saison ; raison suffisante pour que le président Perpere, passe un contrat de « valorisation » avec cette fois, la société Soccer Holding & Sport management, représentée par l’incontournable Roberto Rodriguez, prévoyant, c’est le cas de le dire, une commission de 160 000 dollars. Dès le 2 août, 150 000 dollars sont virés sur le compte de Soccer Holding ouvert à la Banca Popolare di Sondria de Lugano…
En 2003, Gaby s’éclate comme un malade et le PSG repasse tout naturellement à la caisse : 82 670 euros. Le 15 juillet, le président Graille donne un mandat de « négociation » à Quadris et Robin Bolli pour renégocier le salaire de Gaby ; coût de l’opération : 325 000 euros qui seront réglés le 1er décembre sur présentation d’une facture de ce montant par…Soccer Holding & Sport management déjà évoquée. Sans doute un brin distrait, le comptable du club vire les fonds sur le compte de Quadris à la Barclays…
Ce même 15 juillet, Francis Graille qui prend décidément goût à la haute finance, signe un avenant au mandat de recherche qui avait été donné par son prédécesseur à Quadris le 15 mai 2001 ! Ce coup-là, ça porte sur le versement anticipé d’une partie de l’intéressement promis au joueur sur son futur transfert ! Mystères de la comptabilité en parties troubles, c’est Soccer Holding & Sport Management qui émet la facture correspondante le 13 novembre, mais c’est Quadris et Bolli qui encaissent le virement du même montant le 3 décembre sur le compte Barclays à Londres… Vases communicants.
2004 ? pas de raison que ça s’arrête ; Soccer Holding and Sport Management émet une facture de 105 000 euros le 18 juin, réglée le 12 juillet 2004 par virement sur le compte de la société émettrice dirigée par l’éternel Roberto Rodriguez, ouvert dans les livres du Crédit Suisse…
L’histoire, évidemment, continue ; Bolli –affectueusement surnommé « Monsieur 5% » par ses clients, et sa société Quadris, vont reverser la plus grande partie des sommes facturées et reçues du PSG à une mystérieuse société INDRINO Management immatriculée aux Iles Vierges Britanniques mais qui a préféré ouvrir son compte en banque à l’UBS à Zurich. La grande classe.
Indrino s’avère n’être qu’une vulgaire gare de triage : les sommes reçues seront redistribuées entre 3 comptes respectivement ouverts, pour le premier au nom de Gaby chez Wachovia Securities LLC, pour le second sur un compte ouvert à la Hudson United Bank of New-York au nom d’une très évocatrice société Ipanema Trading SA qui recevra 360 000 euros également destinés au joueur. Le troisième, ouvert en Hongrie au nom d’une société Foreign Trade Associates, verra notamment passer une partie des droits à l’image versés au joueur par Nike, le non-moins célèbre équipementier partenaire de son employeur.
Ni charges sociales ni impôts ; un complément de salaire neto de chez neto. Qui vaut à Nike, Perpère, Bolli, Graille et Rodriguez, une flopée de mises en examen dans le dossier des transferts du PSG.
Quant à Gaby Heinze, on a maintenant une vague idée des agréables souvenirs qu’il évoquera dimanche en fin de partie et quelle que soit l’issue du match avec ses amis du PSG lors de l’échange rituel des maillots…
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