Pour démontrer que l’explosion d’Azf était un acte terroriste et le Procureur Breard un corrompu, l’ancien patron des RG tenta, début 2003, d’instrumentaliser un journaliste du « Canard Enchainé », aujourd’hui à « Bakchich ». Récit.
Le 21 septembre, l’explosion d’AZF fait une trentaine de morts et des centaines de blessés. Nous sommes dix jours après le 11 septembre. S’agit il d’un accident ? Ou d’un acte terroriste ? L’opinion est inquiète. Le gouvernement Jospin est sur le grill. Si le drame de Toulouse est du à un groupe intégriste violent, il sera facile pour Jacques Chirac de prouver, lors de la campagne présidentielle qui s’annonce, que le bilan de son concurrent est calamiteux en matière de sécurité.
Dès le 24 septembre, le Procureur de Toulouse, Michel Breard, marqué à gauche, écarte fermement la thèse de l’acte terroriste. Trois jours pour arriver à de telles certitudes, c’est un peu rapide, même si la PJ sur place est vite convaincue de l’hypothèse d’un accident. Incontestablement, le gouvernement Jospin ne veut pas laisser Chirac utiliser le drame d’AZF à des fins électorales.
Le patron des RG de l’époque, le chiraquien Yves Bertrand, se doit de réagir, et vite. Il lui faut utiliser les nombreux relais qu’il possède dans la presse pour imposer la thèse d’un attentat terroriste. N’est-il pas celui qui, pour le compte de Chirac, va inventer, avant 2002, toutes sortes de coups tordus contre Lionel Jospin (révélations sur son passé trotskiste, calomnies sur les conditions d’achat de la maison du Premier ministre à l’île de Ré) ? Pas question, cette fois, de laisser passer l’occasion.
Et le patron des RG va faire fort. L’auteur de ces lignes, à l’époque journaliste au Canard, peut témoigner qu’Yves Bertrand va tenter de lui expliquer, notes à l’appui, que le Procureur Breard était un grand corrompu et qu’il fallait le pendre sur la place publique.
Quelques jours après l’explosion, Yves Bertrand note dans ses fameux carnets, dont maitre Agnès Casero, partie civile depuis lundi au procès de Toulouse, demande le versement dans la procédure : « affaire va monter en puissance, 1 maghrébin, 5 slips, groupe isl ». La religion,sinon la conviction, du patron des RG d’alors est faite ; il s’agit de terrorisme.
Certains journaux amis, le Figaro et Valeurs Actuelles notamment, vont relayer les thèses des RG. A lui seul, Valeurs Actuelles, dont le directeur délégué de la rédaction, Eric Branca, est un intime et la plume d’Yves Bertrand, revient trente fois, en deux ans, sur l’enquête. Une belle conscience professionnelle ! Quatre fois, durant la même période, Yves Bertrand reçoit la journaliste de l’Express qui suit le dossier AZF.
A chaque rencontre, Yves Bertrand exhibe une note des RG du 3 octobre 2001, mettant en cause un malheureux musulman, présent sur les lieux ce jour là et qui portait cinq slips, ou selon une autre version, trois slips et deux pantalons, allez savoir. Or, plaide Yves Bertrand face à ses amis journalistes, les fous d’Allah, lors de leurs attentats meurtriers, portent eux aussi de telles tenues ! La démonstration est imparable.
Pour être complet, ajoutons qu’Yves Bertrand n’est pas le seul à défendre, au sein de l’appareil d’Etat, la thèse de l’attentat. Roger Marion, patron à l’époque de l’anti terrorisme, et Yves Bot, Procureur de Paris, sont eux aussi plutôt enclins à défendre l’hypothèse d’un acte malveillant. Voici une piste, remarquons au passage, qui ne dessert pas les intérêts du groupe Total, qui se serait vu dédouané de ses responsabilités, si la justice avait retenu l’explication terroriste.
Tel n’a pas été le cas. À l’époque, compte tenu du dossier, la Chancellerie et le parquet anti terroriste soutiennent le travail du Procurer de Toulouse et de la PJ locale. Ils s’opposent à ce que l’enquête soit rapatriée à Paris au pôle anti terroriste.
Hélas pour Yves bertrand, Valeurs Actuelles et le Figaro sont condamnés, début 2003, pour leurs écrits sur AZF. Le patron des RG pique une colère. C’est alors qu’il décroche son téléphone et appelle l’auteur de ces lignes, alors journaliste au Canard Enchainé.
Yves Bertrand, je le connaissais. Je l’avais rencontré, plusieurs fois, durant l’année 2001, alors que je préparais un livre La Maison Pasqua. Yves Bertrand n’avait pas son pareil pour accueillir le visiteur autour d’un bon whisky, dans son bureau de la rue des Saussaies, protégé par une double porte capitonnée. Souvent drôle, toujours truculent, plus proche du sergent Garcia que de Talleyrand, Yves Bertrand était d’une compagnie agréable.
Chiraquien pur jus, Yves Bertrand cherchait à écarter tous les concurrents possibles de Jacques Chirac. Tout naturellement, mon projet de livre allait dans son sens et il ne se privait pas de me dire tout le mal qu’il pensait des amis de Pasqua dans les casinos de la République.
Cette fois, l’affaire est d’un autre ordre. Il ne s’agit plus de contacts normaux entre une source et un journaliste, mais d’une tentative grave de manipulation.
Un premier rendez vous a lieu entre Yves Bertrand et moi, le 23 janvier à 16 heures 30.
« Monsieur Beau, vous êtes vous intéressé à monsieur Breard, le Procureur de Toulouse » ?
« Non, pas vraiment ! »
« Vous devriez. Vous devriez regarder ce qu’il a fait, alors qu’il était secrétaire général de l’Ordre de la Légion d’honneur entre 1988 et 1993. Le système informatique a été entièrement refait et la facture très, mais très, très lourde. Vous me suivez ? Cela vous intéresse ? »
Un deuxième rendez vous est pris pour le lundi 27 janvier, au matin. Le patron des RG m’a promis de m’apporter une note résumant les frasques du Procureur.
Le lundi matin, j’effectue donc une nouvelle visite chez Yves Bertrand. Il me tend une de ses célèbres notes blanches, non signées, où sont évoquées, de façon vague et sans preuve aucune, les frasques supposées du Procureur. Je fais un peu la moue, naturellement ! Et mon interlocuteur n’a pas l’air content. « Mais c’est du lourd quand même ! » Cette note était surtout diffamatoire et le Canard, naturellement, n’en a rien fait.
Ce qui est amusant, c’est que plus tard, un mystérieux groupe AZF démontra qu’il était facile de saboter les lignes de TGV. L’affaire fut menée de façon très professionnelle, aucun attentat n’eut lieu, mais les préparatifs fort bien agencés. Le message, largement médiatisé, était clair. Le ministre de l’Intérieur de l’époque, un certain Nicolas sarkozy, n’assurait pas la sécurité des trains TGV. Un refrain connu ? Certains soupçonnent de sombres cabinets noirs proches de Chirac d’avoir inventé le groupe AZF pour embêter Sarkozy.
Mais certains voient le mal partout !
Lire ou relire dans Bakchich :
Ce n’est pas parce que l’ancien patron des RG est un intégriste que cela fait de l’ancien procureur de Toulouse un prophète de la Bonne Parole.
Quant à la vérité du dossier AZF, on était assurés de ne jamais la connaitre dès le 23 septembre, le jour où cet incapable d’expert en explosifs Daniel Van Schendel était déjà assuré de la thèse accidentelle… 2 jours seulement après la catastrophe :
Daniel Van Schendel - « Expert » en explosifs - ne sait pas reconnaître les cocktails Molotov ! http://www.presume-coupable.com/news.php ?readmore=51
Le florilège des affirmations fausses et contradictoires de M. Van Schendel … http://www.presume-coupable.com/news.php ?readmore=52
La vérité ne peut pourtant pas être inconnue de tout le monde, sinon - devant l’ampleur de la "catastrophe" (je relaie bien malgré moi ce terme propagandiste à lui seul) - comment aurait-on pu conclure des accords sur le plan civil avant même que l’audience pénale n’ai lieu ?
On en apprend de belles : alors Mr Beau était un habitué des causeries du soir de Yves Bertrand ? Rassurez-vous on s’en était douté.
Mais là où Mr Beau nous prend pour des buses c’est quand il essaie de nous faire croire que Bertrand essayait en 2003 de flinguer le Proc. Bréard pour des raisons liées à AZF.
Il y avait beaucoup plus dangereux alors du côté de Bréard à Toulouse et en 2003 : c’était en pleine affaire Alègre et le procureur Bréard représentait une sérieuse menace avec les instructions qu’il avait laissé ouvrir (volens – nolens).On peut vous faire un dessin…
Alors deux solutions :
N. Beau se faisait manipuler (/ à l’affaire Alègre) par Bertrand sans s’en rendre compte et n’a toujours pas compris,
N. Beau comme ses anciens du Canard Canard éviite soigneusement de voir le doigt derrière la lune.
En effet, chaque fois que sur Bakchich les lecteurs veulent parler ce cette affaire puante et des exploits tant des enquêteurs que des magistrats ou de certains journalistes : censure…
Bizarre, non ?
PS : et le Proc. Bréard refera des siennes un peu plus tard, il écrira le fameux rapport Bréard qui napalmise ce magistrat toulousain mis en cause puis "blanchi" médiatiquement et juridiquement alors que ce même rapport est accablant. Chiche que Bakchich nous parle de ce rapport qui dort à la Chancellerie et dans les coffres de hauts magistrats et qui pourtant a été publié (une synthèse) dans un assourdissant silence médiatique par Gilles Souillès en juin 2007 ("Affaire Alègre : La vérité assassinée")