La piste financière est dorénavant privilégiée par le juge d’instruction qui enquête sur l’attentat de Karachi en mai 2002.
Longtemps qualifiée de « fable » par le juge Michel Debacq qui avait débuté l’enquête sur l’attentat de Karachi, en 2002, puis par Nicolas Sarkozy lui-même en 2008 ("grotesque", "ridicule") la piste politico-financière dans l’enquête est devenue vendredi 18 juin la thèse officiellement privilégiée par le juge chargé de l’enquête.
Le juge d’instruction Marc Trévidic, chargé de l’enquête sur l’attaque qui a coûté la vie à 11 Français en 2002, a de fait confirmé l’existence de rétrocommissions illicites, en marge du contrat de vente de sous-marins au Pakistan.
Lors d’une réunion à huis clos avec les familles des victimes, vendredi matin à Paris, le juge a expliqué sa position et selon l’avocat des familles, Me Olivier Morice, la piste que le juge retient « est celle d’infractions financières qui auraient permis à un certain nombre d’hommes politiques de bénéficier de rétrocommissions illicites ».
Selon Me Morice, le juge leur a confirmé "sans équivoque possible, l’existence de rétrocommissions illicites" dans la vente de sous-marins Agosta 90B au Pakistan en 1994 démontrées par "des documents internes" de la Direction des constructions navales (DCN). Mais, selon un autre avocat de partie civile, si le juge d’instruction a confirmé qu’il y avait bien eu un arrêt du versement des commissions, "il a reconnu qu’il n’avait pas d’éléments permettant de justifier l’arrêt des versements".
Dès le 7 octobre dernier, Bakchich avait publié une partie des carnets rédigés par Gérard Menayas, l’ancien directeur financier de la DCNI, sous l’étiquette de « Verbatim ». Du TNT pur vélin, saisie par les deux juges parisiens. Les brûlants feuillets de Menayas, conservés désormais sous scellés (c’est-à-dire non versés au dossier), faisaient apparaître les noms de personnalités politiques de premier plan : Édouard Balladur, Nicolas Sarkozy, Charles Pasqua, bien sûr – le seul dont la justice suisse ait retrouvé la trace dans les rétro-commissions versées au moment des frégates. Mais aussi les socialistes Élisabeth Guigou, Jean-Marie Cambacérès et Jean-Yves le Drian, ce dernier étant le maire de Lorient, où les fameuses frégates ont été construites. Tous trois avaient fait savoir à Bakchich qu’ils ignoraient tout de ce dossier. S’ils le disent…
D’après Me Morice, le juge aurait dit aux parties civiles "qu’au plus haut niveau de l’Etat français on sait parfaitement les motifs qui ont conduit à l’arrêt du versement des commissions".
Par ailleurs, Marc Trévidic aurait regretté l’absence de moyens mis à sa disposition et déploré le "manque de coopération", selon Me Morice, de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, ex-RG).
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