Carnet de voyage des envoyés spéciaux de Bakchich en Afrique du Sud. Episode douze : visites à Piet Retief et Pietermaritzburg.
18 heures, soleil couchant dans l’Easternloweld. Le bas veld oriental, en bon français. Une sorte de steppe qui parcourt les plateaux sud-africains. D’ordinaire seulement garnie de petits arbustes et qui parcourt une grande partie de l’Afrique du Sud. Sans trop de relief. Mais dans le nord est de la contrée, là où court le massif du Drakensberg, le Veld (de l’Allemand Feld, abâtardi par l’Afrikaans en Veld) se blottit à flanc de montagne. Et laisse découvrir d’aussi étonnants paysages que d’improbables villes.
Piet Retief. Un gros bourg de 32 000 habitants, sur la N5, sans grand intérêt, dixit le Lonely Planet. Tout à côté du Swaziland, sur les coteaux du Drakensberg. Une halte de routier, un passage obligé pour le Grand Trek de Bakchich. Et pas seulement pour le coffee shop qui annonce fièrement les meilleures frites du monde…
Pour tout ce que le pays compte de Boer, Piet Retief demeure un nom sacré. Celui du chef du Voortrek, la grande caravane afrikaner partie à la conquête du pays, démarrée en 1836. Et où Retief laissa sa vie. Un brin agacé de voir les Blancs débarquer sur ses terres et le Piet vouloir parlementer, le roi zoulou de l’époque, un certain Dingaan, l’extermina avec ses envies de colonies en février 1838. Dingaan croyait craindre dégun. Quelques mois plus tard, son armée fut massacrée par les rescapés blancs, lors de la bataille de la Blood River.
Depuis chaque 16 décembre est célébré. Jour du vœu jusqu’en 1994, jour de réconciliation depuis l’arrivée des noirs au pouvoir. A part Ted, personne n’y trouve à redire…
Et surtout pas les rares blancs croisés dans les rues de Piet Retief. Une cité au nom qui fleure bon la domination, mais des allées désertées par les blancs. Nulle trace dans les échoppes, les allées, ou les magasins visitées. Sans doute calfeutrés dans les vastes domaines agricoles qui entourent la ville.
Du règne blanc, ne reste que le nom de la bourgade. L’ancienne république du Transvaal, dont elle faisait partie, s’est transformée en Mpumalanga. Plus au sud, à quelques encâblures de Durban, l’ancienne province blanche du Natal a laissé place au Kwazulu Natal. Mais Pietermaritzburg, ainsi baptisée en l’honneur de Piet Retief et de Gert Maritz, autre leader afrikaner des premiers temps, a conservé son importance administrative. 457 000 habitants posent une ville.
Blancs absents, noirs dans les rues, et vies séparées. Centre-ville coloré et bruyant, faubourgs aseptisés et résidences calfeutrées.
Deux villes, deux noms dans lesquelles résonnent l’échec du grand Trek. Et de l’apartheid, son prolongement de cochon. Et encore.
Les phacochères ne s’aventurent pas en ces contrées. Ils préfèrent brouter paisiblement en plein Zoulouland. Dans le parc national d’Hluhluwe Imfolozi, la deuxième plus grande réserve du pays après le Kruger National Park, bordée par les hameaux d’Hluhluwe et Mtubatuba. Et mieux vaut parler tout bas pour apercevoir les fiertés de la faune sud-africaine. Girafes, buffles, impalas, lions, léopards, éléphants, planqués dans 96 000 hectares ultra protégés.
Aux peu discrets et malchanceux, qui n’auront pas réussi à les dénicher, reste la beauté brute de la savane vallonnée. Et la quiétude d’un endroit, où sanglante histoire, Coupe du monde et vuvuzelas n’ont pas droit de cité.
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