Simone, la redoutée première dame de Côte d’Ivoire, a dû s’incliner. Devant une musulmane de 38 ans, ancienne journaliste devenue épouse traditionnelle.
Même Marcel Pagnol n’avait pas osé. Une femme de boulanger trompée, aux yeux et au su de tout un peuple ! Et un mitron qui continue aimablement d’enfourner, comme si de rien n’était, les petits pains. Tel est pourtant le sort que subit Simone Éhivet, épouse Gbagbo, dont le mari, Laurent « boulanger » Gbagbo (pour sa propension à rouler ses adversaires dans la farine), a une très officielle – et active – deuxième épouse.
Simone, la redoutée première dame de Côte d’Ivoire, capable de gifler en public un Premier ministre coupable d’avoir signé des accords de paix ou de prévenir son époux avant toute concession – « si nos hommes flanchent, ils ne nous [les femmes, ndlr] retrouveront pas dans leur lit » – ; elle, la crainte égérie des faucons du régime ivoirien, soupçonnée d’avoir commandé à des escadrons de la mort pendant la guerre civile ; elle, la compagne de toutes les luttes syndicales et politiques des années 90 ; elle, la pasionaria chrétienne dont chaque discours est ponctué d’une référence à Dieu, a dû s’incliner.
Devant une musulmane. Une jeunette de 38 ans, ancienne journaliste devenue épouse traditionnelle du chef de l’État en 2001. Détail loin d’être insignifiant en terre africaine, Nadiana Bamba lui a même donné un fils en 2002, quand « Momone » n’avait pondu que des filles. Et dans sa dot, « Nady » a rapporté Cyclone, l’agence qui s’occupe de la com de Gbagbo, en partenariat avec les Français d’Euro-RSCG et quatre titres de presse tout à la gloire du président. « Nady est intouchable, confie une concierge des palais africains, une pièce maîtresse du premier cercle présidentiel. »
Si bien que Simone Gbagbo, toute vice-présidente et patronne du groupe parlementaire du Front populaire ivoirien, n’a pas été seule à s’occuper de la campagne de réélection de son époux pour la présidentielle du 31 octobre. L’évangéliste Simone a dû partager son Laurent avec la musulmane Nady. Après la guerre civile de 2002, la réconciliation entre le nord et le sud du pays n’est pas totalement entérinée. Ni les votes des 5,7 millions d’électeurs acquis au Président.
À l’épouse officielle, le sillonnage du Sud chrétien, le soin de rallier les durs du régime et le droit de voter à son côté le jour du scrutin. Voilà qui aidera Simone à peaufiner son image d’Hillary Clinton des tropiques. À la petite nouvelle, le Nord et l’Ouest, terres d’islam, et les milieux d’affaires. En point d’orgue, la visite, au bras de Laurent, de la cathédrale de Yamoussoukro. Façon, pour Gbagbo, de réconcilier le pays dans son lit.