Les clubs de foot se sont opposés aux sites de paris en ligne sur l’utilisation de leur nom de marque. Contrefaçon ou identification ? La justice a tranché.
On croyait les sites de paris en ligne et les clubs européens de football les meilleurs amis du monde. Il n’en n’est rien, comme le démontre clairement la guerre judiciaire implacable qui les oppose ces derniers temps.
Le différend porte sur l’usage par les bookmakers des noms des clubs dans la désignation des épreuves sur lesquelles ils invitent leurs clients à parier. Pour leur part, les clubs affirment que les « cyberbookmakers » se rendent coupables de contrefaçon et, subsidiairement, de parasitisme, en reproduisant sur leurs sites et sans leur accord, les marques qu’ils ont déposées.
De leur côté, les sites rétorquent qu’ils emploient les noms des clubs, non pas à titre de marque, mais seulement à titre descriptif et informatif. C’est la réponse à cette question existentielle qui donc a été demandée par la Juventus de Turin d’une part et le Paris Saint- Germain d’autre part, aux troisième et première sections de la troisième chambre civile du tribunal de grande instance de Paris, en janvier et juin 2008.
Le club parisien s’est fait étaler dès la première mi-temps… Le 17 juin 2008, les juges de la première section ont rendu leur copie sur une demande du club parisien formée sur le même fondement. Pas de chance pour les locataires du Parc des Princes : les juges avaient sous la robe l’article 713-6b du code de la propriété intellectuelle qui permet d’utiliser une marque comme référence nécessaire pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, à condition que n’existe aucune confusion dans leur origine. Ils ont donc renvoyé les joueurs de la Porte de Saint-Cloud au décrassage…
Quant à la Juventus, elle a cédé dans les arrêts de jeu, après une première mi-temps plutôt favorable. Dans l’arrêt du 30 janvier 2008 sur la demande de la Juve contre les sociétés William Hill Credit et Unibet, devenues Global Entertainment Antigua, le tribunal a condamné les deux exploitants des sites pour contrefaçon de marque, sans pour autant retenir l’action en parasitisme et en agissement parasitaire.
Le 11 décembre 2009, la deuxième chambre civile de la cour d’appel de Paris a retenu l’argument des sites, selon lequel la dénomination litigieuse n’est pas utilisée pour identifier les produits ou services offerts par la Juventus de Turin, mais seulement pour désigner le club turinois. La cour a d’ailleurs retenu qu’il n’existe aucun autre terme permettant de nommer l’équipe engagée. Et a écarté le prétendu usage à titre de marque.
Conclusion : tant à la Juventus de Turin qu’au Paris Saint-Germain, ce sont les sites de paris qui marquent des points. Un comble.
A lire sur Bakchich.info :
La France innove en matière de droits liés aux compétitions sportives.
Dans le cadre de la loi en cours de validation au parlement, il est prévu que les opérateurs de paris sportifs devront s’entendre avec les détenteurs de droits sur les épreuves sportives comme la FFF (Fédération Française de Football), la FFT et les autres fédérations dont le sport se prête à parier.
Différents points seront débattus par les deux parties, opérateurs de paris sportifs et organisateurs de manifestations :
les compétitions sur lesquelles il sera possible de parier (uniquement des compétitions dont l’issue n’est pas facilement manipulable)
les évènements ou évènements dérivés sur lesquels il sera possible de parier (là encore il ne sera pas possible de parier par exemple sur ’qui va obtenir le coup d’envoi’ car l’issue de ce pari ne résulte pas d’une performance sportive)
le paiement d’une somme par les opérateurs ayant obtenu l’agrément aux organisateurs de compétitions
Autant dire que la négociation s’annonce ardue puisque aucune des deux parties impliquées n’envisage de rogner sur sa marge ou son revenu potentiel.
L’article 52 du texte de loi qui stipule qu’un accord doit être signé entre ces protagonistes crée un précédent dont la Commission Européenne pourra s’inspirer pour édifier son projet de régulation européenne standardisée du marché des jeux d’argent et de hasard en ligne. Il met un terme aux chamailleries qui ont eu lieu par le passé entre différents acteurs de l’industrie du jeu en ligne et de grands clubs de football européens.