Les escrocs du « Rapido » comparaissaient ce mercredi devant le tribunal de Paris pour escroquerie en bande organisée. Beaucoup de bruit pour rien dans un procès qui a tourné à la pantalonnade.
On préférerait en ricaner. Tout au plus se raconter la combine pour épater le bon gars du coin. Les escrocs du « Rapido » ont fait jaser, de la rédaction de Bakchich aux parquets cirés du Palais de justice de Paris. Trois ans d’enquête pour un procès, ce mercredi 8 juillet, qui accouchera d’une souris. Le dossier du juge De Saussay était pourtant, à son arrivée à la 13ème chambre correctionnelle, épais comme une encyclopédie. Avant de fondre comme neige au soleil faute de preuves. Et d’accorder la relaxe aux deux prévenus malgré les deux ans ferme requis par le parquet. Dont un purge toujours une peine de prison pour vol aggravé jusqu’en janvier 2010.
Revenons un instant à l’acte d’accusation de nos deux larrons. Pour escroquerie en bande organisée. L’un et l’autre étaient soupçonnés, à l’aide de complices volatiles, d’avoir mis au point un système de fraude, autour de 17.000 euros, qui abusait autant de la naïveté des buralistes que des failles du « Rapido », ce loto instantané de la Française des Jeux. Qui représente plus de 20% du chiffre d’affaires de la gamme tirage en 2007.
Par une ruse simple comme la Bible : pendant que l’un feignait de posséder un ticket gagnant avec 8 bons numéros, l’autre d’une cabine téléphonique se faisait passer pour un courtier de la Française des Jeux (FDJ) auprès du tenancier en le félicitant d’avoir un gros gagnant. Et de lui demander de fournir un acompte à l’heureux élu dès qu’il se présenterait au guichet, de 300 à 4500 euros. Avec un intéressement au gain pour le patron de 750 euros offert par la Française des Jeux. De quoi rendre aveugles les quelques tôliers grippe-sou focalisés sur la carotte de la FDJ.
Si l’un des deux filous « ne reconnaît que l’infraction du 15 février 2006 », pour cause de flagrant délit, qui lui a valu 10 mois de détention provisoire, c’est bien l’incapacité du tribunal à démanteler le système de fraude qui a éclaté au grand jour. Valant au juge ce constat ironique, « si on devait se fier aux incohérences du dossier pour comprendre l’affaire »… Car les deux heures de lecture des faits délictueux ainsi que le témoignage des prévenus (muets comme des carpes) n’ont fait qu’ajouter aux versions contradictoires un peu plus de cocasserie dans les plaidoiries.
Me Dominique Many, avocat d’un des accusés, de constater que tout cela « n’est que hautement comique ». D’ajouter : « on fait de mon client un bon bouc émissaire, prouvez-moi que c’était lui au téléphone ? Qu’il a l’argent ? Vous n’avez aucun élément là-dessus ». Du coup, le tribunal s’attarde sur des interrogatoires, comme celui d’un des prévenus qui aurait dit avoir « offert quelques joints en cadeau à l’autre ». De quoi faire monter le juge sur ses grands chevaux avant de constater que le procès verbal n’avait pas été signé par le prévenu en question. Histoire de camoufler le seul intérêt de l’affaire : comment l’homme mystérieux du téléphone possédait le code confidentiel de la FDJ qui donnait accès aux machines des buralistes… Un complice au sein de la maison mère ?
La question ne vint à aucun moment effleurer le bout des lèvres des magistrats du tribunal. Si ce n’est cette légère incartade du principal accusé : « et le chef courtier du casino alors ! ». Pas étonnant dès lors que la FDJ ne se soit même pas portée partie civile, contrairement à ce qu’avait écrit Bakchich. Mieux vaut faire profil bas d’une affaire qui sent la merde au bout du bâton. Ce qu’a bien saisi l’avocat Many en accusant la FDJ d’ « d’être le premier dealer de France avec 50.000 joueurs malades addictifs au Rapido. On vient les chercher sur 4 joints alors qu’il y a 2 milliards d’euros de gains d’un côté et 1500-2000 euros de l’autre ».
La Française des Jeux déjouée par les déjantés du Rapido ? « Dans la vie faut pas pleurer », comme disait l’un des accusés. La FDJ préfère sécher ses larmes loin des parquets. Et de sa ridicule actualité.
A lire ou relire sur Bakchich.info
l’un des prévenus (et non pas accusés, nous ne sommes pas aux assises) a tout de même été condamné. encore heureux puisqu’il reconnaissait l’une des escroqueries, ainsi que vous le soulignez.
Le trucullent est surtout à chercher sur les bancs des parties civiles, désespérément vides : la Française des jeux et la plupart des buralistes dont la naïveté confinait à la bêtise, avaient préféré capituler en rase campagne et ne rien réclamer à titre d’indemnités…seul un téméraire s’y est risqué, confondant justice et loto : 5 000 euros réclamés, au motif qu’il a dû "cesser d’organiser le Rapido" après cette affaire. il réclamait également des excuses ( !). au final il lui a été accordé 500 Euros. Une paille. Un peu comme au Rapido : on espere beaucoup, quant à gagner gros…
effectivement ce procès fut une pantalonnade. aucun buraliste n’avait fait le déplacement. dur il est vrai d’expliquer comment ils ont pu accepter de verser parfois jusqu’à 3 000 euros, en liquide, à un prétendu gagnant, sur la seule foi d’un appel téléphonique prétendûment de la FDJ et en violation des règles en vigueur (pas plus de 500 euros, au delà il faut aller dans un centre de la FDJ pour percevoir les gains). ils ont en fait été aveuglés par l’excitation de toucher leur part puisqu’une prime leur était promise sur les gains…