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Prison : Delarue rend son rapport et après ?

Surveiller et punir / mardi 14 avril 2009 par Simon Piel
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Le constat accablant établi par le contrôleur général des lieux de privation de liberté dans son rapport annuel sur l’état des prisons françaises n’a pour l’instant pas fait réagir le pouvoir.

Nommé par décret présidentiel, il y a plus d’un an, avec tambours et trompettes, le Contrôleur général des lieux de privation de libertés, Jean-Marie Delarue, a rendu le mercredi 8 avril, son premier rapport annuel sur l’état de « la France captive ». Un constat sans appel, un de plus, sur la situation « grave » dans laquelle se trouvent les prisons françaises.

La presse, largement présente à l’occasion de la remise du texte, en a rendu compte. Insistant sur l’importance des recommandations de monsieur Delarue. Mais pour l’instant, aucune réaction, ni de l’Élysée, ni du ministère de la Justice. Les week-ends au Cap Nègre, les nuits passées à biberonner, autant de choses qui, il est vrai, demandent du temps et de l’attention.

Nicolas Sarkozy, pour cause « d’agenda », a même repoussé son rendez-vous avec le contrôleur général afin qu’il lui remette son document de travail. Obligeant ce dernier à tenir sa conférence de presse avant son rendez-vous à l’Élysée. « Rien de bien grave », tempère auprès de Bakchich l’un des contrôleurs qui préfère garder l’anonymat.

39 suicides depuis le début de l’année (sur lesquels l’administration pénitentiaire a décidé de ne plus communiquer), une surpopulation insoutenable, des locaux vétustes, des employés de l’administration pénitentiaire essorés (qui commencent même à voir dans le suicide une solution), des détenus qui n’ont rien à faire en prison, la vie chère, le manque de travail en détention, le non-respect des familles, et une politique de réinsertion toujours plus trouble.

Le bon côté des choses - JPG - 61.4 ko
Le bon côté des choses
© Nardo

Autant de constats dressés de manière accablante par l’équipe de Delarue. Reste une question. Ce rapport a-t-il déjà fait long feu ? Nommé par décret présidentiel, le 13 juin 2008, pour six ans, le Contrôleur général des prisons assure diriger une institution indépendante. Elle a tout pouvoir pour se rendre, sans prévenir, dans les lieux de privations de libertés qu’elle désire. Établissements pénitentiaires, hôpitaux psychiatriques, centres de rétention, commissariats… Afin, le plus « ethnologiquement » possible de faire une photographie de la « France captive ».

Louable mission. Jamais réalisée par ailleurs. Mais on s’interroge sur les moyens mis à sa disposition pour réaliser ce tour de force. Notamment quand Delarue, lors de sa conférence de presse, assure qu’il manque de personnels et qu’il va demander deux emplois supplémentaires. Notamment aussi quand on se rend sur le site web du contrôleur, toujours en construction… plus d’un an après la création de l’institution.

On s’interroge aussi sur la bonne volonté du ministère de la Justice, quand, contre toute attente, il demande à répertorier les informateurs du contrôleur. Détenus, prisonniers, familles de détenus. Autant de personnes dont la langue déjà dure à délier risque fort de ne plus émettre aucun son quand ils comprendront qu’ils ne peuvent faire remonter l’information de la base de manière anonyme. Surtout lorsque l’on sait que certains informateurs ont déjà eu à subir des représailles.

La tâche du contrôleur s’annonce donc difficile. Et son pouvoir de recommandation un brin léger face à l’ampleur du désastre pénitentiaire français.

« Il y a un oubli social des détenus, contrepartie inévitable du silence auquel leur situation matérielle les contraint et de l’opprobre où doit les tenir l’infraction », explique le contrôleur dans son rapport. « Opprobre : Ce qui humilie, mortifie à l’extrême d’une manière éclatante et publique », ajoute le Petit Robert.

Lire ou relire dans Bakchich :

Suite et fin des témoignages sur l’univers carcéral. Zoom sur la réinsertion à laquelle la loi pénitentiaire adoptée au Sénat entend donner une nouvelle dynamique.
Un mois, dix ans, vingt ans. La prison reste une expérience à part. Et c’est encore ceux qui l’ont vécu qui en parlent le mieux. Témoignages. Part II.
Parmi les nombreux acteurs du monde carcéral, le projet de loi pénitentiaire semble avoir oublié les proches de détenus. Pas condamnés et pourtant bien souvent malmenés. Témoignages.
Amis détenus, l’administration pénitentiaire se démène pour vous occuper. Avec les centres d’appels en prison, voici venu le temps des formations et des sorties de prison sans stress.
Selon la Cour de cassation, l’Etat ne peut faire l’objet de poursuites pénales de la part de détenus considérant que leurs conditions de détentions sont « incompatibles avec la dignité humaine ».
En attendant l’examen, le 21 janvier, de sa demande de remise en liberté, l’avocat Karim Achoui, incarcéré depuis la mi-décembre, est en quête d’une taule 4 étoiles.
L’ancien préfet du Var, Jean-Charles Marchiani, a été libéré cette nuit de la prison de la Santé à Paris. Il était emprisonné pour trafic d’influence.
Le très médiatique procès du braqueur Antonio Ferrara a permis d’attirer l’attention sur les conditions de détention des détenus particulièrement surveillés et sur l’état des prisons françaises.
Le ministère de la Justice a besoin de surveillants de prison et le fait savoir à la télévision dans un petit spot de pub qui vous ouvre les portes du (merveilleux) pénitencier.
« Bakchich » a rencontré l’ex-braqueur Roger Knobelspiess, complice de Jacques Mesrine, objet du film qui sort mercredi (voir notre chronique ci dessous).

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6 MESSAGES

Forum

  • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
    le mercredi 10 mars 2010 à 22:52
    c’est vrai qu’ils sont malheureux en prison, mais pourquoi ils le sont ? pour un simple feu rouge grillé ? je ne pense pas. Avant tout ,avant de sortir un rapport comme cela ,pensez un peu aux familles qui sont dans la douleur d’un enfant assassiné par un assassin drogué alcoolique chauffard. l’assassin est lui maintenant tranquille maintenant en prison avec le confort, la tele, le sport, la formation adequate qu’aimerait sans doute notre fils qui maintenant n’est plus la. je suis degouté.vivement le retour de cayenne et les vrais valeurs de notre pays.
  • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
    le mardi 14 avril 2009 à 23:39

    Il est ou le rapport ? Pas en ligne ni sur le site du senat de suivi de la loi..les senateurs ne n’ont recu aucune copie..il est en vente dans une librairie de droit pour 18eur !!!

    Ce n est pas un manque de moyen mais un manque de volonte. Ou sont les rapports de visite en ligne ??

    Il n’y a qu’a regarder le site du controleur des prison dans une democratie :

    http://inspectorates.homeoffice.gov.uk/hmiprisons/

  • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
    le mardi 14 avril 2009 à 08:14, Phil2922 a dit :
    C’est sûr que le suicide de la personne de 49 ans, enfermé en prison après récidive pour conduite en étant positif, fait poser la question de la justesse de l’incarcération et de l’application systématique de la loi sans que les juges envisagent d’autres mesures plus efficaces pour soigner le mal… !!
    • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
      le mardi 14 avril 2009 à 14:25

      Les juges ne sont pas là pour envisager quoi que ce soit. Ils sont là pour faire appliquer les lois même si elles leur semblent disproportionnées par rapport à la situation. Ils connaissent la réalité carcérale et l’essence de leur métier est l’humain, avec toutes les erreurs que cet humain peut commettre à un moment de sa vie. Les parlementaires sont élus par les citoyens, grâce à leurs discours sécuritaires brillamment soutenus par les vautours - oups, mes doigts ont fourché - les medias. Les parlementaires votent les lois.

      Il semblerait donc que la seule responsabilité qui soit engagée soit celle des citoyens qui élisent ces parlementaires.

      Les lois sur les peines plancher ont été voulues par Nicolas Sarkozy et Rachida Dati suite à des faits divers extrêmes. Les juges étaient jugés trop laxistes. Le hic : la loi étant générale, elle s’applique à tous les crimes et délits et pas seulement à ceux commis dans des circonstances particulièrement atroces.

      Un juge peut décider de ne pas appliquer la peine plancher. Il faut dans ce cas qu’il développe très précisément la raison pour laquelle il n’a pas appliqué la peine plancher. Mais ce faisant, il court des risques.

      Peine plancher, rétention de sûreté, fous en prison, dépistage des futurs délinquants en maternelle, emprisonnement des moins de 12 ans, suppression du juge d’instruction, la France condamnée à plusieurs reprises par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour ses conditions de détention, etc. Je n’arrive pas à croire que ce soit ce que veut la majorité de mes concitoyens. Et pourtant, il semblerait bien.

      • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
        le mardi 14 avril 2009 à 23:00, NM a dit :

        "Mais ce faisant, il court des risques".

        Pas tant que ça il semble, au vu de l’application des peines planchers.

        Mon lien pointe vers un article qui date un peu (juin 2008) : "Sur ces 42.000 affaires, 9.250 ont vu l’application de la loi sur les peines plancher, soit de l’ordre de 22%.

        Donc la loi sur les peines plancher, voulue automatique et s’imposant au juge, ne s’applique que dans à peine 20% des cas où elle est censée l’être. Bref, écarter la peine plancher est devenu le principe, et l’appliquer l’exception".

        • Prison : Delarue rend son rapport et après ?
          le mercredi 15 avril 2009 à 10:41

          Effectivement, les juges moins que les procureurs qui ne requièrent pas la peine plancher dans les cas où elle s’applique.

          Quant aux pourcentages, ils varient selons les sources (cf commentaires de Bruno Thouzellier secrétaire général de l’USM). Cet article date lui aussi de juin 2008 :)

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