La cour d’assises a accepté la demande de supplément d’information déposée par les avocats de Colonna après les déclarations-chocs de Didier Vinolas. Des déclarations à prendre toutefois avec d’infinies précautions.
Article déjà publié le 17 février 2009
Ancien secrétaire général du Préfet Erignac, devenu depuis janvier 2009 membre du cabinet de Daniel Vaillant à la mairie du XVIIIème arrondissement, Didier Vinolas, ce témoin de la dernière heure, a expliqué qu’un flic des RG lui avait livré le nom de deux membres du commando qui avait assassiné le préfet Erignac. Cette information, a précisé le commissaire Vinolas, avait été livrée à l’époque au Procureur de Paris, Yves Bot, et à d’autres, sans que jamais ces derniers ne l’exploitent.
Du coup, les avocats d’Yvan Colonna ont demandé, hier lundi, un supplément d’information, et donc la suspension du procès. Ce qu’ils n’ont pas obtenu.
Didier Vinolas est-il un témoin au dessus de tout soupçon ? C’est une question que l’on peut légitimement se poser, lorsqu’on revient sur le parcours du commissaire Vinolas. Bakchich peut révéler que ce dernier a partagé, de 1989 à 1991, le même bureau, à la Direction générale de la Police (DGPN), que Jean-Hugues Colonna, le père d’Yvan. Ces deux fonctionnaires étaient en charge officiellement des sports au ministère de l’Intérieur. Rien de plus normal pour un ancien prof de gym devenu député socialiste. Sauf qu’ils s’occupent d’autre chose : les deux hommes veillent en fait, entre 1989 et 1991, sur les affaires corses.
À l’époque, Pierre Joxe est ministre et son proche conseiller pour la police s’appelle Patrice Bergougnoux. Depuis, Jean Hugues Colonna et Didier Vinolas sont restés très amis. Ce qui fragilise naturellement le témoignage de Vinolas devant la cour d’assises.
D’autant plus que le mystérieux informateur du commissaire Vinolas, que Bakchich connait bien, est un militant socialiste fort actif en Corse du Sud et responsable du Grand Orient, une obédience à laquelle appartiennent également Jean Hugues Colonna et Patrice Bergougnoux. Un monde très fraternel.
Ce n’est pas la première fois que le nom de Jean-Hugues Colonna, ancien député socialiste et tombeur du maire de Nice, Jacques Médecin, apparaît dans le feuilleton tragique qu’a constitué l’assassinat du préfet Erignac. Lorsque les membres du commando sont arrêtés, le vendredi 21 mai 1999, les flics anti-terroristes laissent échapper Yvan Colonna, qu’ils vont rechercher dans sa bergerie seulement le lendemain samedi, et encore dans l’après midi.
Depuis, une polémique fait rage chez les flics sur ce raté. Pour certains, pas de doute. Au moment de l’arrestation du commando anti-Erignac, le père Colonna aurait fait jouer ses appuis au ministère de l’Intérieur, en actionnant notamment Patrice Bergougnoux, devenu sous Chevènement, en 1999, le patron de la puissante Direction générale de la police nationale qui a surveillé toute l’arrestation du commando.
Une certitude : le témoignage d’un ami de monsieur Colonna père doit être pris avec d’infinies précautions…
A lire ou relire sur Bakchich.info
Signez la pétition de soutien à Daniel Massé sur son site, de la reconnaissance de son innocence dépend la sauvegarde des libertés fondamentales de chacun d’entre nous. http://www.presume-coupable.com/petition
« Ce qu’un journaliste parisien écrit, à quelques rares exceptions près, est ce qu’il a voulu entendre, et ce que j’ai effectivement dit est pour lui de peu d’importance » Noam Chomsky
Justice, Colonna : la piste du grand banditisme ? By phmadelin
C’est la dernière des dernières dans l’affaire Colonna dont le procès en Assises se poursuit non sans heurts à Paris Et pas la moins sensationnelle ! Et si le Colonna cité dans l’affaire n’était pas Yvan, le berger corse de Carghese, mais Jean-Jé, un « parrain du milieu corse » mort dans un accident de voiture le 10 novembre 2006 ? Originaire de Pila-Canale, non loin d’Ajaccio, il s’était forgé autour de Jean-Jérôme une légende formidable. On finissait par le voir partout où il ne fallait pas être quand on est honnête. Notamment dans les affaires de jeu. Dans le Cercle Concorde à Paris, mais aussi et surtout comme Président du casino d’Ajaccio Je n’invente rien, c’est le commissaire Philippe Frizon qui l’a suggéré devant la Cour pendant sa déposition mardi devant les Assises. Frizon a dirigé en second l’enquête sur la mort du Préfet Erignac. Il racontait les circonstances du témoignage reçu du commissaire Didier Vinolas, ancien Secrétaire général de la préfecture d’Ajaccio. Mais dans une autre vie commissaire de police à la DCRG. Au Service des Courses et Jeux. Pourquoi lui avait-on demander de témoigner dans le cadre de l’enquête Erignac ? Parce que le préfet s’apprêtait à prendre une décision importante quant à l’agrandissement du parc des machines à sous du Casino d’Ajaccio, Vinolas étant chargé de préparer cette décision. C’est ainsi qu’a surgi le nom de Jean-Jé Colonna comme pouvant être impliqué dans l’assassinat. Il était donc alors le Président du casino.
« Mais, précise Frizon, nous nous étions des spécialistes du terrorisme pas du grand banditisme. Le commissaire Roger Marion – Eagle four - qui dirigeait l’enquête m’a lancé : Et je l’accroche comment, Jean-Jé ? »
C’est-à-dire « je l’implique comment pour l’insérer dans la procédure ? » Marion connaissait parfaitement le personnage, il avait même obtenu que son nom soit retiré du fichier du grand banditisme. Le fait est que Jean-Jé Colonna a disparu de l’enquête, pour être remplacé par… Yvan Colonna. Un Colonna chasse l’autre. Le plus étonnant est que la Cour n’a pas bondi sur cette nouvelle piste inexplorée.
« Normal, remarque un connaisseur du dossier, il y a eu tant de pistes ! Faute de pouvoir choisir, les policiers ont tout simplement abandonné de nombreuses enquêtes. »
Une nouvelle enquête n’aboutirait pas forcément, mais il est sans doute utile de la lancer. Piste agricole ? Abandonnée. Piste de la filière porcine ? Abandonnée. Piste de l’endettement agricole ? Abandonnée. Piste des Jeux ? Abandonnée. Roger Marion et son équipe ont préféré échafauder une formidable usine à gaz avec un « groupe des anonymes », avec un sous-groupe du Nord auteur des attentats sur le Continent, et un sous-groupe du Sud, responsable de l’attaque de la gendarmerie à Pietrosella et du meurtre du préfet. Ainsi va cette affaire judiciaire ahurissante : trois enquêtes de police, trois instructions plus une quatrième en cours à l’audience. Quatre procès. Et toujours pas de preuve contre Yvan Colonna !