Mi-octobre doit s’ouvrir le procès de l’affaire Probo Koala, navire dont les déchets répandus sur le port d’Abidjan ont fait 16 morts et des milliers d’intoxications.
Qui se souvient de l’affaire du Probo Koala, navire affrété par la société Trafigura, dont les déchets ont été répandus nuitamment le 19 août 2006 dans les quartiers d’Abidjan ? Dès le 20 août, les habitants du district d’Abidjan se plaignent d’odeurs pestilentielles. Suite à diverses plaintes des populations environnantes, les services du CIAPOL (Centre ivoirien anti-pollution) enquêtent afin de déterminer l’origine des odeurs.
Le bilan provisoire sanitaire pour la population abidjanaise est affolant : 16 morts et des centaines de milliers d’intoxications. Malgré les nombreux éléments tendant à démontrer la culpabilité du PROBO KOALA, les autorités ivoiriennes le laissent repartir.
Comment en est-on arrivé là ? Le 2 juillet 2006, au Pays-Bas, la société APS (Amsterdam Port Services) avait effectué une analyse des 554m3 de slops (eaux sales) du navire. Il ressortait de cette analyse que les déchets ne correspondaient pas aux « slops » standards. En effet, ceux-ci contenaient une demande chimique en oxygène (DCO) supérieure à celle qu’APS était initialement autorisée à traiter et du mercaptan. Les autorités portuaires hollandaises refusèrent de prendre le navire en charge qui accosta finalement dans le port d’Abidjan le 19 août 2006.
A ce jour, Trafigura est en procès en Grande-Bretagne pour les conséquences civiles de cette catastrophe. Il s’agit de l’action de groupe agrégeant le plus grand nombre de victimes (31000) jamais lancée dans l’histoire judiciaire britannique. Le procès doit s’ouvrir à la mi-octobre pour six semaines d’audiences. Avant une procédure pénale en Hollande début janvier 2010.
Du côté d’Abidjan, nulle poursuite à l’horizon, après l’accord signé entre Trafigura et l’Etat ivoirien. 145 millions d’euros versés et aucune suite. Même pour les victimes dont peu ont vu la couleur de l’argent. Après la confirmation de l’irrecevabilité de sa plainte déposée en France en avril 2007 au nom d’une centaine de victimes ivoiriennes et françaises, Sherpa (une association de juristes spécialisée dans les affaires internationales touchant aux droits de l’homme) a décidé de porter le dossier au niveau européen.
Une requête à l’endroit de la Commission Européenne est en cours de préparation pour obtenir une procédure de recours en manquement à l’encontre des Pays-Bas, de l’Espagne et de l’Estonie pour ne pas avoir respecté la directive 2000/59 qui interdit de laisser un navire ressortir des ports européens s’il est chargé de déchets. Sherpa tente ainsi de contraindre les Etats européens à respecter leurs engagements internationaux et communautaires. Cette affaire emblématique démontre la carence de l’arsenal juridique existant au niveau national et international. En 2007, Trafigura a créé une fondation pour mener des actions caritatives et philanthropiques. L’honneur est sauf…
Lire ou relire sur Bakchich.info :