Chaque semaine, Jacques Gaillard ouvre son dico perso et taille un costard aux mots à la mode.
Ouf, l’Inspection générale a blanchi Éric Woerth. Imaginez que les inspecteurs aient trouvé étonnant que la première fortune féminine de France n’ait pas été contrôlée depuis des lustres, alors que des tas de contribuables moins cosmétiques le sont, paraît-il, tous les trois ans : mince alors ! D’autant plus que la fraude fiscale, elle, n’est plus à établir, elle est grosse, grasse et avouée, avec une sérénité sur laquelle Frédéric Lefebvre n’a pas osé s’étendre, mais il doit la juger admirable, tant, pour lui, madame L’Oréal est la madone des brushings d’enfer. Donc, le ministre qui laisse sans bouger cette dame frauder en paix, et ses services qui repèrent une île paradisiaque dans son patrimoine et ne s’en occupent pas parce que sa propriété « n’est pas établie », c’est normal ? Alors, notre fisc est dirigé par un fantôme et contrôlé par des blaireaux, et n’attendez rien de l’Inspection, puisque son rapport est un pur produit du système qu’il est supposé inspecter. La prochaine fois, interrogez Paul le poulpe, il se goure jamais, lui.
D’accord, Woerth n’a pas la tête de l’emploi. On le voit mal empocher des enveloppes. Voilà le meilleur argument de ses potes, même s’ils n’osent pas le dire comme ça. Et pour cause : cela porterait à penser que d’autres ont, en revanche, parfaitement le profil pour le rôle, et que, lorsque pointe un soupçon de magouille en liquide dans leurs affaires, c’est tout sauf invraisemblable.
Par exemple, un gars qui commence son mandat en augmentant son propre salaire, qui, depuis des années, marine dans le caviar de ces grandes fortunes pleines de yachts, puis fabrique un bouclier fiscal pour leur épargner d’atroces souffrances et leur ristourner pour Noël des mandats de 30 patates, ça n’a pas, avec le pognon, les timidités de n’importe qui : demandez à Berlusconi, dans ce monde où 1 000 euros, c’est un pourboire pour le voiturier, 150 000, ça ne compte pas. Surtout quand on s’aime !
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