En mars 2008, sitôt qu’Omar Bongo eut réglé 817 000 euros à une société pour laquelle a travaillé Bernard Kouchner, il obtenait la tête du secrétaire d’Etat à la Coopération qui le critiquait.
Cet article est publié dans Bakchich depuis le 19 janvier 2009
Bernard Kouchner, ministre des factures étrangères. Cet excellent titre, et les révélations de nos papiers de la semaine dernière ont reçu un écho appréciable auprès de nos internautes. Moins du côté des confrères. Encore moins du côté des politiques : ni l’opposition ni le gouvernement ne se sont penchés sur la question. Qu’un ministre des Affaires étrangères viole la Constitution en étant toujours patron d’une société de consultants et en ayant longtemps bossé pour des États étrangers aussi respectables que le président Omar Bongo et Denis Sassou Nguesso… Rien à redire. Que l’une des sociétés pour laquelle il ait bossé, toujours gérée par un de ses collaborateurs, relance un État étranger pour qu’il s’acquitte d’une douloureuse facture de 817 000 euros en 2007, quand bien même il est en poste… Normal et tellement usuel. Bref.
L’échéancier du paiement de cette fameuse facture de 817 000 euros ne choquera que les plus tatillons. Voire les plus mauvais esprits, s’ils le rapprochent du calendrier de la vie politique française et de ses soubresauts.
Après avoir travaillé pour l’État gabonais, Imeda, à l’été 2007 puis en septembre 2007, comme l’a déjà raconté Bakchich, relance le pays d’Omar Bongo pour qu’il règle l’ardoise de 817 000 euros. Alors ambassadeur à Monaco, le boss d’Imeda, se fend de deux missives au Trésorier payeur général gabonais.
Mais les versements, comme le détaillent (en Francs CFA) le document publié ci-dessous par Bakchich, n’interviennent que le 31 janvier puis le 11 mars 2008. Une époque fort agitée des relations franco-gabonaises…
Les résultats de l’enquête préliminaire ouverte à Paris sur les biens acquis par Omar Bongo et ses pairs africains fleurissent dans les journaux. En particulier sur les chèques-cadeaux d’Omar Bongo, tirés de la trésorerie paierie générale de l’État, pour s’acheter des voitures de luxe. Ou encore un reportage de France 2 qui a particulièrement énervé ce vieil Omar.
Entre ces petits secrets de famille éventés, et le discours du secrétaire d’État à la Coopération de l’époque, Jean-Marie Bockel, voulant signer « l’acte de décès de la Françafrique » dont le président gabonais est le pilier, le « mollah » Omar a vu tout rouge.
Bockel a donc été muté vers les anciens combattants dès le 18 mars. Une semaine après le dernier règlement de l’État gabonais à Imeda. Et 8 jours plus tard, le patron de la société, Eric Danon, a appris qu’il ne profiterait pas du soleil de la Côte d’Azur. Nommé en août 2007 ambassadeur de France en principauté, il est prié de déménager vers Genève pour représenter la France à la conférence du désarmement…
En résumé, Omar Bongo règle une facture de 817 000 euros à une société pour laquelle a bossé Bernard Kouchner. Une semaine plus tard, le secrétaire d’État à la coopération française qui l’énervait est viré. Puis l’ambassadeur de France à Monaco, patron de la société qui a reçu les fonds, se fait muter vers un placard.
Sans doute une simple cascade de coïncidences de dates.
A lire ou relire sur Bakchich.info
J’aime bien Backchich.info. Qui ose. Mais pour être crédible, ne doit-il pas aussi évoquer la mise au point du ministre, le 12 janvier, dont je vous colle la teneur, histoire d’être parfaitement honnête. A moins, évidemment, que je ne l’ai pas trouvé sur votre site…
Gabon / France / Précisions de Bernard Kouchner sur BK Conseil et BK consultants (12.01.09) PARIS, France, 13 janvier 2009/African Press Organization (APO)/ — Pour répondre à certaines allégations inexactes diffusées sur un site internet, Bernard Kouchner tient à faire préciser :
Depuis sa prise de fonction en tant que ministre des Affaires étrangères et européennes, Bernard Kouchner a cessé toute activité au sein des sociétés BK Conseil et BK Consultants. La société BK Conseil a été dissoute le 18 mai 2007. Depuis la nomination du Ministre, BK Consultants n’a plus aucune activité commerciale et ne saurait avoir perçu quelque rémunération que ce soit. Le ministre dément formellement « avoir fait passer des prestations de conseil et d’audit sous l’égide de trois sociétés ». Bernard Kouchner n’a jamais appartenu à la société IMEDA dont il était l’un des consultants et n’avait donc aucune raison de se préoccuper du règlement des factures de celle-ci. S’il a pu être amené à évoquer son rapport sur l’Assurance maladie au Gabon avec le président Bongo, c’est uniquement pour s’informer de l’état d’avancement de la mise en œuvre de la loi née de ce rapport. Le travail de Bernard Kouchner sur ce projet d’Assurance maladie au Gabon était notoirement connu des medias gabonais et a fait l’objet d’une communication publique au cours des Etats Généraux de la Santé à Libreville. L’activité de Bernard Kouchner, comme Président fondateur du GIP ESTHER était une activité purement bénévole exercée dans le cadre des décisions prises par le conseil d’administration. C’est le GIP ESTHER qui a permis notamment les nombreux jumelages hospitaliers entre pays européens et pays en développement en particulier dans le domaine du sida. Bernard Kouchner s’enorgueillit d’avoir toujours mené, dans ses diverses fonctions et dans le cadre strict des règles de celles-ci, un combat permanent en faveur de la santé publique en Afrique. Bernard Kouchner se réserve le droit d’engager des poursuites judiciaires pour prévenir ou sanctionner toutes allégations mensongères à son égard et en a chargé Me Georges Kiejman.
SOURCE : France - Ministry of Foreign Affairs