L’affaire Siné rebondit aujourd’hui, avec le procès intenté par le créateur de « Siné Hebdo » au journaliste Claude Askolovitch. Motif : Askolovitch avait qualifié son article d’antisémite.
L’affaire Siné, qui a fait le miel des journaux cet été, rebondit ce mardi. Devant la XVIIè chambre du tribunal de Grande Instance de Paris, se tient le procès qui oppose Siné, ex chroniqueur de Charlie Hebdo, aujourd’hui patron de Siné Hebdo à Claude Askolovitch, ex journaliste du Nouvel Observateur, aujourd’hui au JDD.
Ce dernier va devoir répondre de ses allégations contre « le plus gros emmerdeur de la presse française », tenues sur l’antenne de RTL, dans l’émission de Nicolas Poincaré, « On refait le monde », le 8 juillet 2008. Il avait lancé, à propos d’une chronique de Siné publiée dans Charlie Hebdo le 2 juillet : « C’est un article antisémite, dans un journal qui ne l’est pas ». Déclenchant une affaire qui, comme il l’avait prédit, a déjà fait « beaucoup de bruit ».
Dans la chronique désormais polémique, Siné l’anar qui a toujours aimé titiller la queue du lion, écrivait, à propos du mariage du fils de Nicolas Sarkozy :
« Jean Sarkozy, digne fils de son paternel et déjà conseiller général UMP, est sorti presque sous les applaudissements de son procès en correctionnelle pour délit de fuite en scooter. Le parquet (encore lui !) a même demandé sa relaxe ! Il faut dire que le plaignant est arabe ! Ce n’est pas tout : il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive, et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »
Ce sont les deux dernières phrases qu’Askolovitch juge antisémites. Pourtant, répond son auteur, l’information donnée est un copier coller d’une déclaration du président de la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA), Patrick Gaubert, publiée quelques jours plus tôt dans Libé. Siné s’est contenté d’y ajouter : « Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! ».
On connaît la suite. Siné se fait virer de Charlie par son directeur Philippe Val, et crée dans la foulée Siné Hebdo. Dans le même temps, il est poursuivi par la LICRA (le procès se tient le 27 janvier à Lyon), et dépose de son côté une plainte contre Askolovitch. « A 79 ans, il aurait pu se faire virer de son canard et crever avec l’étiquette « antisémite », s’il n’avait pas crée Siné Hebdo ! », explique-t-on au nouvel hebdomadaire.
Cet après-midi, au tribunal, la séance promet d’être agitée. Pour Claude Askolovitch, viendront témoigner Dominique Sopo (président de SOS racisme), et le sociologue Michel Wieviorka.
Du côté de chez Siné, ses avocats auront entre les mains une trentaine d’attestations de « bonne moralité ». Dont celles de Christophe Alévêque, Guy Bedos, Frédéric Bonnaud, Rony Brauman, Sid Ahmed Ghozali, Cavanna, Georges Yoram Féderman, Sid Ahmed Ghozali, Mark Held, Marcel Francis Kahn, André Langaney, Bernard Langlois, Gustave Massiah, Daniel Mermet, Edgar Morin, Georges Moustaki, Michel Onfray, Gilles Perrault, Marina, Vlady, Michel Warschawski et Jean-Louis Weil.
« Ainsi, Siné serait antisémite et inciterait à la haine raciale. Je viens dire ici que ces accusations m’indignent, me révoltent et me blessent profondément. Mais, que vaudrait mon témoignage si je ne précisais pas qui l’apporte et pourquoi.
Je suis né à Paris en 1932 de parents immigrés, mon père de Hongrie, ma mère de Pologne. Fuyant les pogroms, ils parvînrent enfin à leur but : le Paris de l’égalité et autres rêves. La guerre nous rattrapa très vite et mon père s’engagea dans la légion des volontaires étrangers. Puis vint le temps de l’occupation et commença alors la traque, l’affreux jeu du chat et de la souris que l’on connaît.
D’admirables paysans de la Corrèze nous accueillirent et nous sauvèrent du pire, nous intégrant à jamais à leur famille. Début 1944 mon père rejoignit le maquis dans la forêt de Blanchefort et je devins agent de liaison dans le même bataillon jusqu’à la libération.
Ainsi nous survivâmes mais nos proches eurent moins de chance. Je ne ferai pas ici le décompte des disparus, la liste en serait trop longue. Naissant en France j’avais trouvé une patrie, vivant dans cette communauté rurale Corrézienne je me découvris une matrie à laquelle je reste infiniment fidèle et dont je parle encore le patois. Si le rêve de mes parents laïques de faire de leur fils un Français à part entière était sur le point de se réaliser dès 1939, les nazis et les collaborateurs me firent prendre conscience par la menace et la terreur d’une autre facette de moi-même : ma part de judéïté. Jamais plus le jeune garçon que j’étais à l’époque ne pourrait oublier qu’au mot juif pourrait être associé autant de haine et de mépris. Tant d’années pourtant se sont écoulées depuis cette affreuse guerre, et malgré tout la moindre allusion antisémite fut-elle des plus distanciées, me fait bondir, me blesse, me fait souffrir. Ma vie est ainsi parsemée de ruptures et de liens affectifs brisés sur l’instant pour un mot, aussi discret fut-il…
Et j’aurais durant près de quarante ans rencontré Siné sans m’apercevoir qu’il était antisémite ? Qui peut croire cela ? Car c’est tout le contraire ! Pour moi, Siné est l’ami des juifs, l’ami de ce que les juifs ont de meilleur en eux : l’humour, le sens de la dérision et de l’autodérision, la tolérance, l’amour et surtout l’amour du prochain. Entendre Siné rire de tout, de tous, de lui-même, me ramène aux juifs de l’atelier (de tailleur, bien sûr) de mon oncle Abel. On s’y brocardait à l’envie, on y racontait des blagues….. pas toujours très fines,on s’y affirmait pacifiste avec passion et verser le sang était tenu pour le crime le plus impardonnable. Mais surtout on y refaisait le monde au profit de ceux qui souffrent quels qu’ils soient de par la planète. L’empathie du monde juif que j’ai connu, (et qui semble bien loin aujourd’hui) pour tous les perdants, toutes les victimes, était sans doute le trait de leur caractère le plus marqué, la constance de leur préoccupation. N’est-ce pas là ce qui caractérise essentiellement la personnalité de Siné et ses engagements ? Au-delà des ethnies, des couleurs de peau, des cultures, Siné n’écrit, ne dessine, ne parle, ne milite que pour ceux qui souffrent. Dans la langue de ma mère il y a un mot qui qualifie celui que l’on admire, qui peut servir d’exemple, l’Homme dans le meilleur sens du terme, ce mot c’est MENSCH. Pour moi et les miens Siné est un MENSCH. De plus, puisqu’être juif n’est pas appartenir à une race mais à une culture, Siné, pour tout ce qu’il est, devrait être nommé juif…… au moins par le monde juif quasi disparu que j’ai connu.
Pour conclure, je dirai que ceux qui accusent Siné avec un tel esprit de vindict et au nom d’une judéïté que je ne reconnais pas, ne lui font en vérité qu’une détestable "querelle d’allemand".
Mark Held »
« Je soussigné Brauman, Rony, médecin et enseignant, atteste qu’il est absurde et dangereux de qualifier le dessinateur Siné d’antisémitisme ou d’incitation à la haine raciale.
Absurde parce que les propos incriminés n’ont rien de choquant en eux-mêmes. Ils le sont d’autant moins qu’ils ont été publiés dans un journal que ses lecteurs apprécient pour son ton provocateur.
Dangereux parce qu’une condamnation renforcerait le sentiment diffus selon lequel il est risqué de rire de certaines catégories (juifs, musulmans, notamment, mais bien d’autres aussi). La liberté d’expression est un bien précieux pour elle-même comme pour notre capacité à vivre en société ».
De nombreuses attestations, mais un témoin unique, Philippe Val (attention, ceci n’est pas une blague). Le patron de Charlie Hebdo, ennemi intime de Siné, a été appelé, « non pas pour qu’il nous soutienne, mais pour qu’il explique les raisons profondes du départ forcé de Siné. Val ne le supportait pas, pas seulement à cause de la chronique, mais de son engagement sur la Palestine, et de son soutien à Denis Robert », explique à Bakchich l’un des deux avocats de Siné, maître Tricaud.
Mais « je suis aujourd’hui en mesure de vous dire que Val ne viendra pas », poursuit-il.
A dix jours de son grand rendez-vous pour l’indépendance et le pluralisme des médias, c’est pas joli joli, de fuir le débat judiciaire.
Demain dans Bakchich, le compte-rendu du procès.
Lire ou relire sur Bakchich.info :
Il faudrait en finir avec Val et ses faux-culs !
quand je dis "en finir", je pense qu’il faudrait l’entarter (gloup-gloup !), au moins autant que le pompeux BHL !
qu’est-ce que je suis déçu de voir que cet hypocrite de Val a fait de Charlie !
et il a bien attendu la disparition de Gébé ! pour Choron, la messe était dite avant sa mort . . . et j’espère qu’Asko, vulgaire lècheur de bottes du tyran, mange, au moins des publications d’un jugement qui a l’évidence devrait lui être défavorable !
Quand je vois que Cabu n’a pas moufté, je me dis qu’il aime les méthodes du liquidateur de l’ex hebdo satirique !
j’arrête, je serais grossier !
Enfin, Bob, sois assuré que j’achèterais mon "Siné-Hebdo", comme le "canard", mais pas le torche-fion sarkosyste qu’est devenu CH !