Papa a bien déblayé le chemin. Et armé son rejeton. L’élection de Karim Wade, inéluctable, à la mairie de Dakar dimanche, n’est qu’un nouveau jalon sur son parcours vers la présidence…
Envoyé spécial à Dakar
Avec sa candidature à la mairie de Dakar, que Bakchich est parti suivre sur place, Karim Wade, fils et conseiller de son président de père, a perdu sa meilleure vanne : « Ma seule ambition politique est de devenir maire de Dubaï ».
Balancée à l’envi depuis son apparition aux côtés de Pa Wade, lors de l’accession à la magistrature suprême de ce dernier, la formule n’a jamais blousé grand monde. Que ce fut dans la presse sénégalaise, française ou les milieux politiques sénégalais.
Conseiller de la présidence, grand ordonnateur du sommet de l’organisation de la conférence islamique, VRP de luxe du Sénégal au Moyen-Orient et en France, renégociation des licences UMTS avec les opérateurs de téléphonie portable ; la liste est longue des missions de confiance accordées par « Gorgui » Wade à son petiot. Avec en prime, une arrivée massive de fonds et d’investisseurs venus de l’Orient compliqué. Au hasard, le Groupe Ben Laden pour construire le nouvel aéroport, Dubaï Port World pour succéder à Bolloré dans la rade de Dakar, ou encore un consortium d’entreprises amenées à développer une « zone franche » autour de Dakar.
Difficile de cacher qui est le fils préféré. D’autant que « Le Président », comme l’appelle Karim, a toujours salué l’œuvre de son rejeton, en même temps qu’il lâchait les chiens sur ses successeurs potentiels.
Idrissa Seck, dit Ngorsi, et Macky Sall en ont fait les frais. Sitôt « Défenestrés », selon l’expression consacrée des journalistes sénégalais, les deux loustics ont eu le droit à de menus ennuis judiciaires. Sans condamnation, mais avec de multiples convocations à la DIC, la redoutable Division des investigations criminelles. Et sont depuis tombés au mieux dans les limbes de l’opposition, ou dans les bras du président gabonais Omar Bongo.
Dur châtiment pour qui veut s’intercaler entre un père et un fils. Depuis fin 2007, plus personne ne s’y est risqué. Peu à peu, tout le monde s’est même fait à l’idée. L’apparition de son mouvement « la Génération du Concret », n’a pas non plus floué grand monde. « Un mouvement apolitique conçu pour réaliser l’œuvre du Président »… Ben voyons.
Dans le Golfe, depuis ses débuts, les officiels l’appellent « le Prince héritier ». Sarko en a fait son interlocuteur privilégié sur l’Afrique de l’Ouest et veut lui refourguer une jolie centrale nucléaire. Petit plus, le destin du petit Wade l’intéresse au plus haut point, lui qui a aussi une lignée politique… L’opposition s’est aussi faite à l’idée de devoir l’affronter, dans les urnes, elle qui n’a pas remporté un scrutin depuis 2000 et s’est pris vague bleue sur vague bleue. Tout juste une tentative de modification de la constitution, pour empêcher qu’un fils de chef d’Etat soit élu à la présidence, avait été déposée, et sitôt remballée à l’Assemblée nationale.
« Au moins va-t-il passer par les urnes, soupire une vieille concierge des palais africains,dans un pays où le bourrage des urnes n’est pas même nécessaire ». Opposition laminée, machine électorale présidentielle rôdée et parfaitement maîtrisée par Karim lui-même [1], et fichier électoral « radiographié » [2]. La panoplie du parfait rouleau compresseur électoral est en place. Un combat à armes plus qu’inégales.
En 2006, sa nomination à la tête de « l’Agence nationale pour l‘organisation de la conférence islamique », l’a placé à la tête d’une manne financière venue du golfe avec laquelle il a transformé Dakar. Un levier parfaitement utilisé. Et à dessein. Réfection des routes, ouverture de nouveaux hôtels, ripolinage de la Corniche, nouveaux échangeurs autoroutiers, Dakar a changé d’air. Même si la capitale étouffe encore. « Cela fait trois ans que l’on fait campagne », en sourit l’un de ses conseillers, « et cela va porter ses fruits ».
Nul n’en fait mystère. L’accession à la mairie après le scrutin de ce week-end n’est qu’un galop d’essai. Un tour de chauffe, histoire que le métisse parfaisse son wolof, sa science des bains de foule et des grands discours. Avant la conquête du Palais de l’avenue Roume, prévue pour 2012, au plus tard…
Plus jeunes, les trois héritiers aiment à faire la java ensemble. Mais promis, depuis qu’ils ont des responsabilités, les héritiers se sont calmés. Première à avoir accédé au pouvoir, sa Majesté Mohammed VI continue à tailler des bavettes avec Karim Wade et Ali Bongo, ministre de la Défense de son président de père. Et les trois continuent de s’entendre comme larrons en foire. « Mais sans faire d’excès, d’ailleurs Karim ne boit ni ne fume », tempère l’un de ses conseilleurs. Au moins entre Karim et Ali, la course à l’échalote présidentielle est lancée. M6 n’a plus qu’à arbitrer.
Karim Wade, leader de la Génération du Concret, en campagne, acclamé par ses partisans :
Et Karim Wade en campagne électorale à Dakar, sur le marché de Sandaga : Voir la vidéo
Lire ou relire sur Bakchich.info :
[1] Il fut à l’instigation, avec Idrissa Seck, des marches bleues, ces longues marches qui tenaient lieu de meeting pour Wade, lors de son élection en 2000
[2] En fichant le fichier électoral, pratique légale utilisée par exemple par Obama aux Etats-Unis, Abdoulaye Wade avait, à la surprise générale, été réélu au 1er tour
Monsieur Monnier, il faut éviter de vous laisser intoxiquer par des agences de com.
Ca "caillasse" pas mal lors des déplacements du père et du fils pendant cette campagne et ce signe n’est pas très bon.
karim maire de Dakar on peut beaucoup en douter au regard de l’accueil fait aux représentants du "sopi".
Maintenant si les urnes sont bourrées, tout est possible (voir l’élection de bush)