Wade est éternel

« Nous n’avons pas gagné au premier tour, mais au quart de tour », plastronne Cheikh Diallo, l’un des communicants du président. Depuis le début de la campagne, tous ses soutiens prédisaient une victoire au premier tour, écrasante et sans appel. Les chiffres leur donnent raison ce lundi. Entre 50 et 55% des voix pour le candidat sortant. Rares sont ceux qui osent les contester. Timides, les socialistes misent sur 49% des voix et un chimérique second tour, auquel leur candidat ne serait pas même sûr de participer.

Petites retouches entre amis

Ousmane Tanor Dieng, leur premier secrétaire, se retrouve au coude-à-coude avec Idrissa Seck, l’ancien Premier ministre et ex fils préféré du président réélu. Selon les sources, les deux hommes oscillent entre 17 et 19% des voix. Une raclée dont les proches de Seck ne se remettent pas. « Nous sommes encore groggy », témoigne l’un de ses avocats, qui croit savoir que son client se trouve quelque part, « entre Saly et Dakar ».

Malgré une probable place sur le podium, l’avenir de Ngorsi Seck se trace en pointillé… et soumis aux desiderata du Président. Si les colombes du Parti démocratique sénégalais (PDS, le parti présidentiel) ont beau jeu de saluer « son beau score » et sa place de dauphin de l’élection, « devant le mastodonte que représente le parti socialiste », les faucons du palais aiguisent déjà leur serres à l’encontre de leur bête noire. « Seck ? Ce n’est plus la priorité », se délecte un incontournable de la présidence. « Préparons déjà la proclamation officielle des résultats (prévue au plus tard mercredi) et la cérémonie d’investiture », dont la date n’est pas encore arrêtée. Avant de lancer une petite pique à l’adresse de la presse nationale et internationale. « On vous a bien eus ».

En vieil espiègle, Gorgui Wade s’est ingénié à souffler le très chaud et le très froid durant les semaines précédant le scrutin. En laissant planer plus qu’un doute sur la tenue du scrutin. En embastillant les ténors de l’opposition, le temps d’une après midi. En jouant au chat et à la souris avec son ancien Premier ministre, Ngorsi Seck. En s’entourant de marabouts mondains et d’une armée de slips, prêts à faire le coup de poing.

Autant d’éléments qui ont aiguisé la méfiance des observateurs, au premier rang desquels de soupçonneux journalistes. Et ménagé le suspens.

Même à l’heure du scrutin, ses alliés se sont évertués à jouer les matamores. Son ministre de la Justice, Cheikh Tidiane Sy, n’a pas hésité à forcer la porte d’un bureau de vote, histoire d’en retarder la fermeture. « L’équipe de Wade a bien préparé son coup en retenant les cartes des électeurs dans les zones où leur candidat n’est pas fort mais il y a eu aussi des subterfuges le jour du vote comme achat de cartes, prolongation du vote jusqu’au petit matin du lundi dans des zones qui leur sont favorables par exemple », notent de vils pisse-froids.

Ces petites retouches électorales ont au moins permis d’éviter au candidat sortant un second tour toujours risqué. Quitte à chagriner quelques pieux esprits, mais sans remettre en cause le vote des Sénégalais, qui se sont massivement, et dans le calme, rendus aux urnes.

« Au moins, cela nous laisse quelques points à améliorer d’ici au troisième mandat du président », note, goguenard, un très proche de Wade. En 2012, date de la prochaine échéance présidentielle, Gorgui accusera 85 printemps selon son état civil…

Et pour tout comprendre de la campagne sénégalaise :

Le pape du sopi a fait beaucoup pour le voyage, 24 février 2007

Attaque de slips à Dakar in Bakchich # 23 du 23 février 2007

Partie de campagne au Sénégal in Bakchich #22 du 16 février 2007

À la cour de Wade in Bakchich #21 du 9 février 2007

Une élection Karim à rien in Bakchich #21 du 9 février 2007

Seck s’en va et Seck revient in Bakchich # 20 du 2 février 2007

Le scrutin du 25 n’aura pas lieu in Bakchich # 20 du 2 février 2007

Dakar, ton univers impitoyable in Bakchich #19 du 26 janvier 2007

Au Régal du Sénégal, 30 janvier 2007

Deuil festif & embastillements, 29 janvier 2007