Les obsèques de Jacques Bino, symbole de la lutte pour une plus juste répartition des richesses qui se sont tenues dimanche rappellent un autre Jacques, mort pour la Guadeloupe, en 1967.
Bino et Nestor étaient deux Jacques presque frères tant leur mort porte le même symbole. Jacques Nestor, militant du Groupe d’Organisation Nationale de la Guadeloupe (GONG), est la première victime des massacres de mai 1967. Il est mort Place de la Victoire, au pied du mémorial dédié aux ancêtres guadeloupéens tués en 1802 et 1967. C’est un tout petit mémorial un peu caché derrière des arbres, à côté d’une belle Marianne couronnée d’un casque de poilu, dédiée à « ses enfants morts pour la France (1914 - 1918) ».
En France hexagonale, à part une poignée d’érudits et les descendants d’anciens combattants, personne ne se souvient de mai 1967. En Guadeloupe, il a fallu attendre 2005 pour que chercheurs, syndicats et citoyens s’y intéressent de près. Pourtant, dans la nuit du 25 au 26 mai cette année-là, 85 Guadeloupéens se sont fait tués par des CRS français.
« A Pointe à Pitre, le 26 mai 1967, jour de commémoration de l’abolition de l’esclavage, 5000 ouvriers du bâtiment sont en grève pour une augmentation de salaire de 2%. Le délégué patronal, un certain Brizard aurait lancé aux grévistes : « Quand les nègres auront faim, ils reprendront leur travail ». Une manifestation s’organise. Face aux CRS rassemblés devant la chambre de commerce, les manifestants lancent des pierres et des bouteilles. La police tire immédiatement tuant Jacques Nestor, Militant du Groupe d’Organisation Nationale de la Guadeloupe (GONG). Selon Michel Numa, les ordres du préfet Bolotte, captés sur la fréquence de la préfecture disent aux officiers CRS : « Faites usage de toutes vos armes ».
Les deux jeunes ouvriers Taret et Tidas sont tués ainsi qu’un promeneur. La population et notamment les jeunes du lycée Baimbridge, révoltée, afflue le lendemain vers le centre de Pointe-à-Pitre. Des véhicules sont brûlés, les boutiques de la rue Frébault, principale rue commerçante de Pointe-à-pitre, sont incendiées et pillées. Plusieurs policiers sont blessés à coup de pierres et de sabre. Le bruit court qu’une armurerie a été dévalisée. Le préfet désarme les policiers noirs et fait appel à des gendarmes mobiles de Martinique et de France. Sous la direction du commissaire de police Canales et du capitaine CRS Rupin, policiers et « képis rouges » se livrent à la « chasse au nègre ». Arrêtés au hasard, des personnes sont exécutées dans les locaux de la gendarmerie de Morne Niquel. Des dizaines de personnes sont blessées, dont certaines mutilées à vie comme Solange Coudrieux. « On enjambait les cadavres dans la sous-préfecture », assure un témoin qui craint encore de donner son nom. »
Jean-Moïse Braitberg
Les premiers chiffres, publiés par la préfecture, font état de huit morts côté ouvriers. C’est faux, archi faux, et tout le monde ici le sait depuis longtemps. Mais il faut attendre 1983 pour qu’un autre chiffre officiel soit publié. Il faut attendre 1983, que l’ancien ministre socialiste des DOM-TOM, Georges Lemoine, annonce 85 morts.
Deux générations d’oubli, de tabou, de peur et de dépit ont passé. Après plusieurs manifestations mémorielles, le 26 mai 2007, une fresque financée par les Guadeloupéens, est érigée sur un mur jouxtant la Place de la Victoire, au bord du port. Sur fonds bleu marin, cette inscription, signée « Le mur-témoin » : « D’ici, stupéfait et pétrifié, j’ai tout vu ce vendredi 26 mai 1967… ». Suivie d’un texte court : « 1967 - 2007 Une juste mémoire – Je veux savoir pourquoi 40 ans après, tout un pan de notre histoire demeure méconnue ».
La fresque est un bas-relief où des ouvriers du bâtiment en jean et chemise sont en train de se faire tuer par les CRS, en face. Short court et longues chaussettes, les CRS tirent courageusement sur les ouvriers désarmés.
Quarante ans après, les dossiers, classés confidentiels (archives militaires), ne sont pas accessibles, malgré les demandes répétées des chercheurs et de la CGTG, qui indique dans une lettre adressée à Rama Yade le 25 août 2008 : « Toutes les archives des hôpitaux et mairies relatives à cette période ont mystérieusement disparues et les archives Françaises de Fontainebleau nous sont interdites ».
Assis sur un banc au bord de la Place de la Victoire, Solange Yvon Coudrieu raconte son histoire, qu’il porte encore à soixante dix ans passés, par la souffrance physique de sa jambe perdue et celle, psychologique, de ne pas tout savoir sur 67.
« Dans l’armée, en Algérie, on m’avait demandé d’utiliser le prénom d’Yvon. Mais je m’appelle Solange. Je n’ai jamais fait de politique. La seule politique que je connaisse, c’est celle du stade. Avant de perdre ma jambe, j’étais professeur d’Education physique.
Le 25 mai 1967, je m’apprêtais à inaugurer ma réussite aux examens de maître nageur. Pour fêter ma Victoire, je voulais réaliser un exploit, celui de marcher autour de cette place, 24 heures sans m’arrêter, et aussi emmener ma mère se baigner. Elle ne savait pas nager, je voulais lui apprendre. J’allais lui acheter un maillot de bain, mais arrivé sur le perron du magasin, j’ai eu la surprise de voir qu’il était fermé. Déçu, je suis rentré chez moi.
Sur RFO, les infos disaient que le calme était revenu à Pointe-à-Pitre. J’ai dit à ma femme que je repartais, pour voir. Ç’a été l’erreur. On nous a envoyés à la boucherie, y compris des gens comme moi qui n’avaient rien à voir avec la grève.
Les ouvriers attendaient sur la Place, devant la chambre de commerce. Je traversais une rue pas loin. J’ai entendu une première détonation, une deuxième. Et je me suis soulevé, j’ai senti ma jambe droite partir, je l’ai sentie se déchirer. Comme ils pouvaient continuer à tirer dans mon dos, j’ai fait le mort. J’ai fait la respiration contrôlée. J’ai pu tenir parce que j’étais un sportif professionnel. Je me suis lentement glissé sous un réverbère. Un homme qui passait là s’est arrêté, m’a regardé, a commencé à repartir. Il hésitait, je lui ai donc demandé de me ramasser. Il a fini par m’aider et appeler les secours. Je ne comprenais pas pourquoi les gens ne me ramassaient pas, je ne comprenais pas ce qui se passait, je ne savais pas que les CRS avaient reçu l’ordre du préfet Bolotte de « tirer sur tout ce qui bouge et qui est noir ». Je suis resté pas loin d’une demie heure, pantelant sur le trottoir, à attendre l’ambulance – qui tardait car les CRS lui tiraient dessus. Et pendant une demie heure, mon sang giclait. Je faisais le sportif, il fallait tenir. Arrivé à l’hôpital, j’ai demandé au docteur que je connaissais, ce qui se passait à Pointe-à-Pitre. Il m’a répondu : « Je ne sais pas ».
A l’hôpital, mon coeur s’est arrêté trois fois.
Aujourd’hui, ce n’est pas fini, il reste des éclats de balle dans mon moignon. J’ai très mal. Les médecins hésitent entre me gaver de morphine ou m’amputer encore un bout.
J’ai fait un procès contre l’Etat français, que j’ai gagné. Mais ça ne vous fait pas revenir votre jambe. Ni connaître toute la vérité. J’ai demandé plusieurs fois à ce qu’on expertise la balle. Chaque fois on me l’a refusée.
A l’époque, nous faisions le lien entre la Guerre d’Algérie et mai 1967. Nous étions, comme les Algériens, des colonisés. D’ailleurs, même si je suis parti en Algérie pendant quatre ans, de 1957 à 1961, et j’en ai honte, je n’ai jamais tiré sur un Algérien.
Aujourd’hui, ce sont les funérailles de mon compatriote Jacques Bino. Sa mort fait ressurgir les ressentiments de mai 1967. Et indéniablement, nous faisons le lien entre ce qui se passe aujourd’hui et 1967. »
A lire ou relire dans notre dossier spécial Antilles
J’avais douze ans en 1967, j’etais en face du commissariat de Pointe-a-Pitre,sur le trottoir de la BCCI.J’ai vu le commissariat encercle et protege par les CRS. Le commissaire Canales est sorti du commissariat sous les quolibets, la grimace moqueuse, vetu d’un pantalon noir et d’une chemise blanche il s’est engouffre dans un panier a salade. le lendemain les emeutes ont commence,La ruelle Gossett ou nous habitions etait plongee dans le noir, quand soudainement j’entendis des paroles que jen’oublierais jamais"ENFANT DE GARCE". Je me hissais furtivement par la fenetre, et je vis un de ces fameux Gendarmes les "liserets rouges" ajuste calmement un jeune noir qui courait comme un malade,une detonation terrifiante et le jeune homme virevolta comme un papillon. Ceci sont les faits, j’y etais !
PLUS D’INFORMATION SUR LES NOMS DE TEMOINS ! ECRIVEZ MOI A FRANKENSTEINF@YAHOO.COM
Mardi 24 février 2009 GUADELOUPE, Y A PAS A CHERCHER PLUS LOIN… Mr.Domota sera "in finé" un fin politicien dans l’exacte lignée de ses prédécesseurs syndicalistes CGTistes très sourcilleux de limiter les influences de la "guerre sociale" et pour en prévenir/gérer les excès… Pour que le combat ne s’élargisse, ne se durcisse, il feint de rester déterminé et campe sur des positions médianes circonscrites à 200 zeuros… On sait déjà que le dixième du "produit"de la seule vente de la collection Bergé-Y-St Laurent par Chrystie attesterait déjà de ce que le pognon en réalité ne manque pas…Hier, 206 MILLIONS D’EURO, et ce n’est pas terminé : pendant la crise la vente continue… Rien que ça, ça pourrait financer pendant des années "ces fameux 200 euros " réclamés comme un summum de radicalité…
Il serait donc tout à fait loisible aux requins d’allonger les miettes…Mais les miettes, Il faut les mériter sans doute et oublier surtout de s’attaquer au système lui même… Il faut se battre, y accéder de "haute lutte" , avant de chanter dans les rues ou devant la pointeuse retrouvée : "On a gagné, On a gagné…."
Vous avez remarqué ? l’an passé à été sujet à pléthore de "Grenelles" divers : d e l’environnement,du tabac, de la sécu, de l’emploi, des mains de Soeur Carla dans la culotte du zouave, de la culture, etc…
Un mois et demi de Grève Générale aux Antilles et pas un seul "Grenelle des lentilles" En 68, la CGT co-signaient des deux mains les premiers accords de Grenelle mettant un terme, contre l’avis des grévistes, bon-gré-mal gré, à l’une des plus jolies grèves générales connues…
Y aurait-il des "cailloux" dans les placards de la Raie Publique ? par … publié dans : GUERRE/CONTROLE SOCIAL communauté : Les bâtisseurs d’abîmes http://les-batisseurs-d-abimes.over-blog.com
Ultramarins… vous êtes « Français de souche » !.. N’ayez pas peur.
Vos parents et aïeux ont, eux, payé le prix du sang pour être Français !
Elle ose vous traiter de « souchiens » (en sous entendant « sous-chiens »)… la racaille… décomplexée…
Ce socialogaullisme, en 50 ans, a ruiné votre… notre économie !
Tenez bon… Délivrez-vous… délivrez-nous du « mal… socialogaulliste ».
Le Collège Anarcho-Patriote est avec vous !
Il ne s’agit pas de rafraichir les mémoires, il s’agit d’une loi du silence et ce n’est pas du tout pareil !
J’avais juste 18 ans en mai 1968, lorsque nous nous sommes retrouvés debout. On ne connaissait pas l’outremer dans notre petite ville (je placais d’ailleurs assez facilement la Réunion à côté des Antilles) et nous n’avons jamais entendu parler des événements de mai 1967.
J’ai découvert l’outremer en 1984, à l’occasion d’une affectation rue Oudinot mais je n’ai jamais entendu dire que Georges Lemoine, secrétaire d’Etat socialiste chargé des DOM-TOM avait "reconnu" moins d’un an auparavant, que les ordres donnés aux CRS par le préfet Bolotte (autorisation d’user de toutes leurs armes contre des manifestants) avaient effectivement fait plus de 80 morts en 1967.
Pendant les 10 ans qui ont suivi, le bon préfet a continué sa belle carrière et il l’a prolongée jusqu’en 2001, en qualité de maire-adjoint du 16ème, le très brave Claude Goasguen lui obtenant même une cravate de commandeur de la Légion d’honneur.