Agenda
Dans les allées du Palais de justice de Paris, le profane, humblement, se rend à l’accueil. Et guette la moindre aide pour s’orienter dans ce temple du droit où les escaliers succèdent aux salles d’audiences sans qu’une quelconque logique apparente guide l’architecture des lieux. Escalier A, B, C, D, E, F, G, H, I… Ah tiens où est le G ? Impossible à trouver.
Bienheureux Bakchich, habitué à arpenter les lieux. De la 17e chambre correctionnelle, 2e maison où se jugent les affaires de presse, au cabinet des juges d’instruction, jamais si rigolards que quand ils voient débarquer nos bouilles enjoués au moment de nous mettre en examen avec une bonhommie réjouissante. Au hasard des balades, quelques connaissances sont rencontrées. Là un journaliste ami, ici une pigiste appréciée. Le temps de conversations complices aux prémices toujours semblables. "Qu’est ce que tu as encore fait ? Ah tu es mis en examen par le juge X. Il est sympa, je le connais pas celui là ?"
4e étage, escalier F. Un air de déjà vu. Au moins cinq mises en examen pour diffamation déjà. Le gendarme nous connait et demande à peine une pièce d’identité. Seulement avec qui Bakchich a rendez-vous. La juge Couzy. "Tu la connais ?". Questions croisées avec notre avocate, Léa Forestier, du cabinet Bourdon, notre héros. "Non". Nous ne sommes encore jamais passés par son cabinet. Un agréable moment.
"Vous n’allez pas être surpris des questions que je vais poser, je crois", sourit l’affable magistrate. Effectivement. L’article incriminé, EDF arrose ses potes, est-il bien paru dans Bakchich ? Oui. En êtes-vous le directeur de publication ? Oui. Reconnaissez vous les faits ? Oui. Avez vous déjà été condamné ? Oui. La rafale lancinante avant la sanction. "Je vous mets en examen". Regards amusés vers l’avocat. "Quelque chose à ajouter maître ?" - "Non, mon client a très bien répondu", pouffe Léa.
15 minutes chrono, salutations d’usages et bonne année. "Que faites-vous cet après midi ?", demande gentiment la juge. "Je continue ma journée judiciaire".
Rendez-vous est pris rue du Château-des-rentiers, siège de la Brigade de Répression de la délinquance à la personne. Une convocation dans une ambiance tout aussi détendue qu’au Palais. Les différents lieutenants ont, pour la plupart, eu à nous interroger. "Bonne année, vous allez bien ?" "Oui et vous ?". Un collègue passe. "Ah M. Monnier, vous aurez cinq minutes pour une audition tout à l’heure ? - Oui, aucun souci." Deuxième entretien courtois. "Vous vous amusez toujours bien à Bakchich", juge le policer féru de presse. "Oui toujours". "Alors on se reverra ?". "Sans doute".
Des promesses de lendemain judiciaire qui chantent.