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LUTTES / Bakchich Spécial crise aux Antilles

« Leurs propositions, c’est une blague »

Embedded / vendredi 20 février 2009 par Anaëlle Verzaux
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Les circonstances de la mort de Jacques Bino agitent la Guadeloupe. Les négociations ne donnent rien. Dans les rues, le calme n’est qu’apparent. Reportage.

Jeudi 19 février

19h15 Pointe-à-Pitre, 00h15 à Paris : Les négos c’est une blague !

La rencontre entre le leader de la grève – le collectif LKP – et les médiateurs du gouvernement, n’a rien donné. « Les propositions faites ne correspondent pas à nos revendications sur les 200 euros. Ce qu’ils nous proposent c’est des miettes », s’énerve Jean-Marie Nomertin, secrétaire général de la CGTG, lors du rapide point presse au sortir du bâtiment de la PAF. Pas question de reprendre le travail. « C’est une blague ». Même son de cloche pour Elie Domota, qui embraye. « Ensemble nous lutterons, ensemble nous vaincrons, ce n’est pas demain que nous mettrons un genou à terre. » Non, demain, le programme est tout autre. Retour à la table des négociations prévu à 15 heures. En attendant, consigne est passée de rentrer prestement pour éviter des incidents. Et de nouveaux affrontements avec les jeunes qui tiennent les barricades. Même la sécurité LKP s’inquiète.

18h15 Pointe-à-Pitre, 23h15 à Paris En attendant le médiateur

Depuis 16 heures, heure locale, les représentants du LKP discutent avec les médiateurs du gouvernement… dans les locaux de la police aux frontières (PAF). Une chance, c’est à quelques mètres de l’hôtel Saint John, où logent presque tous les journalistes. Seuls deux cars de police et trois de gendarmes stationnent derrière le bâtiment.

16h15 à Pointe-à-Pitre, 20h15 à Paris

En attente du discours de Sarko à RFO…

La conférence de presse à la Mutualité ce matin s’est achevée par une nouvelle marche hommage à Jacques Bino. Avec trois tours autour de la place de la victoire. Trois, comme autant de générations de Guadeloupéens tombés au combat. En 1801-1802. En 1967. En 2009 avec Bino. 20 000 manifestants, se vante le LKP, dont l’un des meneurs a allégé l’ambiance avec une blague potache. « Au moment de tourner autour de la place. Si la tête touche la queue, la tête trouvera toujours un passage. » Plus tôt, au meeting du LKP à la Mutualité, l’intervention de José Bové a été fort applaudie.

8 heures à Pointe-à-Pitre, 13 heures à Paris

La nuit a été plus calme, même si la mairie de Sainte-Rose a été envahie, au grand mécontentement de son maire (UMP). Une nouvelle marche en l’honneur de Jacques Bino doit avoir lieu ce matin. Selon le LKP, 2000 personnes ont rendu hommage, la veille, au syndicaliste tué par balle. Un meeting au Palais de la Mutualité doit démarrer à 9h30, organisé par le LKP, afin de réagir aux annonces faites par le Premier ministre François Fillon, une aide de 200 euros aux plus bas salaires. Le mot d’ordre reste « hommage à Bino » et « on ne baisse pas les bras ». Même Victorin Lurel, député socialiste, pas le plus dangereux gauchiste de l’île, fait la moue. « Cette proposition ne changera rien »

Mercredi 19 février

Toute la journée de mercredi a tourné autour de la mort d’un homme. Jacques Bino est mort dans la nuit, aux alentours de minuit, tué par balles. Il était le fondateur de la section impôts à la CGTG, membre de Akiyo, et contrôleur des impôts. Un fonctionnaire, qui ne demandait donc pas les 200 euros d’augmentation, et père d’un enfant de huit ans.

Après le meeting de la fin de matinée et la marche funèbre de l’après-midi, à partir de 17 h, les discours commémoratifs fusent devant la Mutualité. Au micro, se succèdent amis et collègues de Jacques Bino, qui, la gorge nouée, se souviennent…

Philippe Pépin, un ancien camarade de la CGTG : « Ce qui me revient d’abord de Jacques Bino, c’est sa gentillesse (…) Il était incapable de se mettre en colère. Jacques Bino était militant depuis 1993, il a participé à la grève de 1994, à celle de 1998, c’était un homme de terrain. Il était très actif. Quand on lui disait : tu viens ? Il répondait : je viens ».

Jean-Marie Nomertin, Secrétaire général de la CGTG : « Je suis enragé (…) On dit que ce sont des jeunes qui l’ont tué par accident. Mais pourquoi l’avoir saigné de trois balles alors ? Nous voulons la vérité. »

Patrice Tacita, leader d’Akyo : « Jacques Bino était toujours là quand il fallait gérer les questions pratiques et logistiques. Après une réunion syndicale ou une manifestation, il s’assurait toujours de savoir si tout le monde était bien rentré chez soi. »

« Ensemble nous luttons, ensemble nous gagnerons, jamais nous ne fléchirons »

Un jeune guadeloupéen, musicien : « On dit que ce sont des jeunes délinquants qui ont tué Jacques Bino. Ca fait deux jours que j’entends parler de jeunes délinquants. Or, cela faisait quatre semaines que tout se passait très bien. Depuis avant-hier, il y a du bordel. J’ai grandi dans les ghettos, j’en suis sorti, et je demande aux jeunes de revenir au calme. Mais ça fait longtemps qu’on aurait dû régler les problèmes que rencontrent ces jeunes… »

Elie Domota, chef du collectif LKP, et leader de la grève : « C’est seulement quand le sang est versé qu’on commence à nous écouter. On a des coups de fils dans tous les sens maintenant. Des coups de fil de Michèle Alliot-Marie, de Jégo… comme s’ils n’avaient rien fait jusque là ! Ce qui est le cas. (…)

Avec Nicolas Sarkozy, il vaut mieux être un Pitbull qu’un Guadeloupéen. Si un Pitbull te mords en Guadeloupe, le lendemain, Sarkozy fait une loi sur les Pitbull. Alors que nous, cela fait des semaines que nous marchons, et nous n’avons toujours rien obtenu.

Pour moi, les vrais responsables de la mort de Jacques Bino, c’est le patronat et l’Etat. Le 8 février, nous avions trouvé un accord avec les élus : un RSA pour 5000 personnes. Jégo était d’accord, Lurel était d’accord, tout le monde était d’accord. Mais Jégo est parti, sans prévenir. C’est de leur faute si nous sommes encore dans la rue.

Ensemble nous luttons, ensemble nous gagnerons, jamais nous ne fléchirons ».

Une minute de silence est observée, entre les drapeaux rouges et les bandeaux noirs, qui marquent le deuil.

Gwada et Bakchich - JPG - 101.8 ko
Gwada et Bakchich
© Nardo

A la tombée de la nuit, alors que les grévistes rentrent doucement chez eux, deux questions restent en suspens. Qui a tué Jacques Bino : des jeunes, par accident, un tireur d’élite, sur ordre du préfet, ou un autre type, par vengeance personnelle ? Et : sa mort va-t-elle calmer les gros chahuts nocturnes ou au contraire les encourager ? Il est 20 heures à Pointe-à-Pitre, la ville est calme. Mais le trop calme peut être douteux, surtout à la veille d’un grand rendez-vous, dans l’Hexagone, entre Nicolas Sarkozy et les syndicats, auquel quelques élus de Guadeloupe sont conviés.

Mais aussi après l’intervention télévisée du Président mercredi, où Nicolas Sarkozy n’a évoqué l’Outre-mer qu’à la toute fin de sa déclaration, relevant du bout des lèvres « l’angoisse », « l’inquiétude » et « une certaine forme de désespérance de nos compatriotes des territoires d’Outre-mer ».

Nicolas Sarkozy devrait intervenir à nouveau, jeudi soir, sur RFO.

Lire ou relire dans Bakchich :

Premier jour de Bakchich aux Antilles, premières impressions de Guadeloupe. Premier mort du conflit. Première polémique. La journée du 17 février par notre envoyée spéciale.
Martinique, Guadeloupe, Réunion… L’Outre-Mer entre en fusion. Et Bakchich dépêche une envoyée spéciale prendre la température des îles.
La crise qui secoue les Antilles ravive des plaies toujours pas cicatrisées. En mai 1967, 80 à 200 manifestants furent tués par la police française dans les rues de Pointe-à-Pitre. Souvenirs, (…)
Les Antilles font l’objet d’un traitement étrange dans la presse et le monde politique.

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31 MESSAGES
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Forum

  • Urgent
    le dimanche 22 février 2009 à 15:48, Adama a dit :
    URGENCE AVANT MASSACRE EN GUADELOUPE C’est un appel de soutien que je lance. 17 Airbus ont débarqué en Guadeloupe depuis début janvier, avec près de 4000 militaires/gendarmes/CRS, armés jusqu’aux dents. Des chars d’assauts, des minutions, des cercueils en plastique, des vivres ont également été acheminés en même temps que ces forces de répression.Ce tel dispositif de guerre coûte 3 millions d’euros par jour au contribuable français.Les guadeloupéens auraient préféré que cet argent serve à résoudre quelques uns des 146 points de la plateforme de revendications.L’Etat français a tiré sur la foule à plusieurs reprises en Guadeloupe : 1910 - 1925 - 1952 - 1967.En 1967, suite à un fort mouvement de grève, messieurs MESSMER, MARCELIN et DE GAULLE ont fait tirer sur la foule et tuer plus de 170 personnes .Officiellement seuls 8 morts ont été déclarés par l’Etat.Le gouvernement vient de décider de transférer les rédactions de RFO television à Paris, les émissions locales ne seront plus produites localement.Sarkosy se fabrique sa dictature par ses exactions, voilà que l’Outre-Mer revient 40 ans en arrière avec les pratiques coloniales.
    • Moi Z’oreille amoureux des Antilles
      le lundi 23 février 2009 à 01:59, Jérôme a dit :
      Depuis des années, je suis persuadé qu’il faut regarder l’histoire en face. La tragédie vécue par les déportés africains, victimes de l’ignominie européenne et africaine (et oui les vendeurs étaient africains),doit être dénoncée avec forces. Mais une fois que cela a été fait il faut arrêter de se flageller et avancer et construire notre histoire commune. Les relents de racisme qui émarge de cette crise sont autant de retours en arrière que l’immobilisme de l’État. Comme dans toute crise il est toujours plus facile de monter les ethnies les unes contre les autres (discours de Le Pen) plutôt que de chercher des solutions réelles. Il faut construire notre destin commun
  • Guadeloupe : « Leurs propositions, c’est une blague »
    le vendredi 20 février 2009 à 11:56

    Ce déballage public des disfonctionnements structurels et des iniquités mémorielles qui subsistent entre les Dom-Tom et la métropole pose la question de ces deux entités bien distinctes qui sont vendues à l’Union Européenne et aux agences de voyage comme communes, car la base des réflexions à avoir se porte sur la légitimité, l’identité et l’intégrité territoriale.

    la suite ici : http://souklaye.wordpress.com/2009/02/09/pour-une-poignee-de-bananes…/

  • Guadeloupe : « Leurs propositions, c’est une blague »
    le vendredi 20 février 2009 à 11:29, bob a dit :
    Que les insulaires ultra marins s’insurgent contre la vie chère, les monopoles et le racisme c’est tout a fait légitime, mais derrière tout ca la revendication réelle portée par ses leaders est tout autre ! Un indépendantisme totalement délirant, basé sur des idées préconçues surannées, simplistes de d’une soit disant exploitation des noirs(gentil) par les blancs(méchants) très souvent au delà de la limite du racisme anti-blanc primaire se sont développées de façon rampante… Si les habitants de la Guadeloupe et de la Martinique se donnés la peine de regarder leurs voisins proches indépendants comme Haïti il se rendrai compte ce qu’est la douce vie dans les Caraïbes indépendants… De la même manière que ce qui se passe en Corse ou à Tahiti la France n’exploite pas les habitants de ces territoires mais les a mis sous perfusion depuis bien longtemps ! Exonérations fiscale et sociale a tout les étages, aide au développement, projet d’infrastructure totalement surdimensionné, primes en tout genre et pour couronner le tout 40% de la population active est fonctionnaires(et profite de surrémunérations, d’indemnités d’éloignement, de majorations de retraites et de congés bonifiés et ce même pour les fonctionnaires territoriaux !!!!) et presque 10% au RMI soit 50% des "forces vives" payés "royalement" par l’État Français directement ou indirectement !!!! Comme a dit Raymond Barre il y a longtemps a propos de la Corse, "Si les Corses veulent leur indépendance, qu’ils la prennent !" Et bien aujourd’hui c’est la même chose un grande partie des métropolitains voit les menaces d’indépendance de certain comme la meilleur solution pour stopper les flux financiers colossaux qui ne vont que dans un sens ! La manne financière que représente l’État Français dans les DOM et les TOM est gigantesque et irremplaçable et ceux qui disent le contraire envoi les antillais dans le tiers monde ! Dans cette économie mondialisé un pays qui ne produit presque rien, qui importe tout et qui ne possède aucun avantage concurrentiel dans sa région et voué a la pauvreté et a se transformer rapidement en république bananière !
  • ÉTATS GÉNÉRAUX… Lueur d’espoir ?..
    le vendredi 20 février 2009 à 10:22, PauLo a dit :

    « Convocation des États Généraux »… en Outre Mer seulement !

    Pourquoi pas aussi en Métropole ?

    Louis XVI déjà… (‘paix à son âme’…) avait convoqué les « États Généraux »… juste avant la… 1ère.… Révolution française !

    Les privilégiés de l’époque… noblesse et clergé… ont fait capoter ces « États Généraux »… et ç’a été la fin du régime !

    Les privilégiés de nos jours… Fonctionnaires et Élus… vont-ils accepter « l’ABROGATION de leurs PRIVILÈGES » ou… tout faire capoter ?

    Ces États Généraux certes limités à l’Outre-mer… n’annoncent-ils pas la fin du socialogaullisme… la fin du « régime totalitaire de la Vème » ?..

    Lueurs d’espoir !

  • Guadeloupe : « Leurs propositions, c’est une blague »
    le vendredi 20 février 2009 à 10:20, LMV a dit :

    A PROPOS DE LA MORT DU CAMARADE JACQUES BINO

    Ceci s’adresse au correspont de Bakchich. Jacques BINO était accompagné. Pourquoi n’essayez-vous pas d’interviewer le passager, présent au moment du drame ?

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