L’Afrique cet été s’est surtout intéressée aux élections à venir. La guerre du Liban n’est pas passée inaperçue mais la presse africaine montre comme une lassitude dans un affrontement sans fin qui occupe une place excessive à ses yeux dans les préoccupations internationales par rapport à d’autres situations de crise.
Pour résumer la pensée dominante, il suffit de se reporter à l’éditorial des Dépêches de Brazzaville du 19 août. Il serait temps que les Israéliens comprennent qu’une victoire militaire crée autour d’eux un immédiat besoin de revanche et que simultanément, les gens du Hezbollah, au lieu de chercher à raser Haïfa, envisagent de se précipiter à l’université réputée de cette ville. L’éditorialiste insiste sur le fait que Français et Allemands sont plus heureux maintenant qu’ils sont amis que pendant la longue période de 1870 à 1945 où ils n’ont cherché qu’à se faire la guerre, et conseille aux différentes parties prenantes au Moyen Orient de s’en inspirer. Cela semble pourtant plus facile à dire qu’à faire, car le même journal rend compte des affrontements de l’autre côté du fleuve, à Kinshasa.
La population de Brazzaville qui suit au bruit des rafales de mitraillette l’évolution du processus électoral du pays voisin a du mal à comprendre qui fait quoi et pourquoi. Pour les Dépêches de Brazzaville, l’agression manifeste des partisans de Jean-Pierre Bemba par ceux de Joseph Kabila est incompréhensible. L’inverse aurait pu avoir une certaine logique, mais le parti en position de gagner les élections avait tout à perdre à se comporter en agresseur. Pour le journaliste, plusieurs explications sont possibles, mais la plus plausible est que finalement, on ne sait plus qui contrôle qui. Au Liban, c’est aussi le problème…
L’inquiétude sur l’issue de ces élections conduit certains éditorialistes à demander aux classes politiques africaines à mieux se comporter vis-à-vis de la démocratie. Fraternité-Info, le journal du Bénin, s’interroge sur le travers qui consiste au nom de la démocratie à multiplier les élections et à multiplier les partis politiques. Le président béninois, Thomas Yayi Boni, élu en mars dernier, a été bien inspiré de ne pas chercher à créer un parti politique à sa dévotion selon l’éditorialiste du journal. Mais, le risque qui menace la démocratie béninoise, c’est l’organisation à répétition d’élections. Si tous les ans il y a des élections, on finit par créer un système politique hors de prix, avec des véritables professionnels du contrôle et du dépouillement des scrutins. On va se mettre à créer des emplois permanents de membres des Commissions électorales d’arrondissement, quand le pays a besoin que l’on crée des emplois plus productifs…
A Abidjan, Fraternité-Matin voit un coût prohibitif plutôt dans le désarmement des forces non-gouvernementales. C’est en tout cas l’opinion du numéro 2 de l’Onuci (Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire) qui n’arrive plus à payer tous les miliciens qui rapportent des pétoires plus ou moins efficaces. Vite les élections, même si Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara commencent déjà à en critiquer les modalités annoncées. Ils refusent de laisser au président Gbagbo le dernier mot en matière de code électoral et menacent de dénoncer aux autorités sud-africaines, garantes du processus de retour à la normale en Côte d’Ivoire la manière dont se préparent les élections.
L’Accra daily mail se penche aussi sur les conditions de la démocratie en Afrique. Après avoir mené une campagne de presse pour que les journalistes puissent protéger leurs sources, l’éditorial du 25 août dénonce la nouvelle mode au Ghana : critiquer la police. La police d’un Etat totalitaire doit être critiquée. Mais en démocratie, la police est la garantie des libertés. Et tandis que les vols d’armes se multiplient dans le pays, le journaliste réclame un renforcement des moyens de la police et surtout un soutien moral de la population
Bref, les éditorialistes africains disent à leurs concitoyens : soyez raisonnables, évitez de vous faire la guerre…