Faillites impériales

Afrique adieu

La presse africaine salue l’action de Kofi Annan désormais sur le départ de son poste de secrétaire général des Nations-Unies. Pour les dépêches de Brazzaville, ce départ est douloureusement symbolique. L’Afrique perd là un des postes les plus prestigieux de la diplomatie mondiale sans que l’on voie quel poste équivalent pourrait lui revenir. Le monde s’organise selon un axe américano-asiatique et la désignation d’un Sud-coréen comme successeur de Kofi Annan en est une manifestation exemplaire.

Le journal revient dans un autre article sur son analyse de l’évolution des relations aériennes entre l’Afrique et la France. Après avoir annoncé qu’Air France devrait se méfier car son attitude commerciale allait lui faire perdre des dessertes fructueuses, le journal s’indigne de découvrir qu’à titre de représailles, il n’est plus mis à disposition sur le vol Paris Brazzaville d’Air France. Etrange vision de la liberté de la presse, note le journaliste, où le simple fait de constater une évolution économique vous attire la vindicte de celui dont la stratégie est décrite. Le journal y voit plus que cela. Il y voit une nouvelle manifestation de l’indécrottable racisme des dirigeants français. Pourtant au détour d’une phrase, on découvre une inquiétude plus fondamentale. Et si Air France cherchait en fait bel et bien à abandonner l’Afrique pour mieux exploiter les lignes transatlantiques qui n’en finissent pas de se développer quand les liaisons Nord Sud stagnent.

Le messager de Douala fait dans un de ses éditoriaux également dans le couplet anti-français. Un relent de la vieille terminologie de guerre froide puisqu’il y est question d’impérialisme, comme au bon vieux temps où Moscou venait chercher en Afrique dans lieux d’affirmation de sa rivalité avec Washington. Mais ce qui ressort de l’article consacré au rôle jugé scandaleux de Paris dans le maintien au pouvoir du régime déliquescent de N’djamena, c’est l’interrogation sur le silence de la classe politique, des médias, des intellectuels français face à ce soutien. Les mêmes qui s’indignèrent à juste titre contre la guerre américaine en Irak ignorent la guerre française en Centrafrique et au Tchad. Et si l’auteur annonce que «  l’Afrique va devenir le terrain fertile des enlèvements et des décapitations des blancs venus soutenir les dictateurs et maintenir l’ordre cruel du pétrole ou du diamant », s’il prédit « la faillite des impérialismes », il constate que nous ne sommes plus dans les années 1970 et que les raisons géostratégiques d’alors ont disparu.

L’Afrique souffre non de ses différences mais leur indifférence…

Démocratie

Kofi Konadu Apraku n’est pas content. C’est du moins ce que rapporte l’Accra daily mail. Ce député du nord du Ghana en a assez des insultes et des menaces qui émaillent chaque réunion du parlement. Et les campagnes électorales ne sont plus qu’une longue litanie d’insultes. Il déclare au journal que l’Afrique est en train de faire fausse route en matière de démocratie. Elle a retenu des modèles européens l’art de l’intrigue et de la chausse-trappe mais elle a oublié de ses traditions le sens de la palabre dans le respect de l’autre. La démocratie n’est plus un art de gouverner mais un moyen d’abaisser les autres. Il y a danger à se comporter ainsi. Le journaliste qui rend compte des positions du député ne s’en émeut pas pour autant. Il y a « battre » dans débattre !!

A Abuja, le Daily Trust rend compte de la réunion du PDP, le principal parti, qui cherche à réduire le nombre de ses candidats aux présidentielles. On est sur la bonne voie. On est passé de 20 à 5. Il faut dire que certains parmi ceux qui se sont retirés avaient reçu des menaces anonymes mais suffisamment claires pour être moins anonymes qu’il y paraîtrait. Bref, la sagesse est en train de prévaloir. Une sagesse suscitée bien sûr, mais l’important est que la démocratie s’y retrouve…