Le nouveau positionnement de Ségolène Royal est clair : être le plus anti-Sarko possible pour ramasser la mise en 2012. Et cela commence par des échanges et retrouvailles discrètes avec ses anciens amis de gauche (de Jouyet à Attali) séduits par Sarkozy, hier voués aux gémonies comme des « traîtres ». Petites histoires de ces réchauffements climatiques…
Après avoir essayé de nous vendre la belle histoire d’une femme à la conquête du pouvoir suprême, seule contre tous les machos du PS, Ségolène Royal a changé son fusil d’épaule. Sa nouvelle stratégie est simple : être anti-Sarko, s’en prendre à ce président devenu impopulaire, en essayant de ramasser progressivement la mise, du parti et de l’opinion.
Au lendemain du second tour de la présidentielle, elle demandait à Sarkozy de ne pas nommer Eric Besson sur le thème « on ne récompense pas la trahison », Ségolène Royal ne tient plus le même discours au sujet de ses anciens amis passés chez Sarkozy. Récompenser les traîtres, non. Mais manger avec eux, les recevoir ou leur envoyer des petits mots, pourquoi pas ? Si elle veut être élue présidente en 2012, l’ancienne candidate a tout intérêt à ramener au bercail les brebis égarées chez Nicolas Sarkozy. Tout comme ces brebis ont intérêt à se ménager une porte de sortie, si leur nouvelle aventure tourne vraiment mal.
Depuis cet automne, la socialiste s’est réconciliée avec Jean-Pierre Jouyet et son épouse, Brigitte Taittinger. Le premier est secrétaire d’État aux affaires européennes et ami de Ségolène et François depuis les bancs de l’École nationale d’administration. La seconde, patronne d’Annick Goutal, était une des rares bonnes copines de Ségo, avant de se brouiller sur fond d’explosion du couple Royal-Hollande.
Elle a aussi renoué de bons contacts avec Jacques Attali, conseiller de Mitterrand sous les ordres duquel elle a travaillé naguère à l’Élysée et contre lequel la candidate pestait parfois en privé – « s’il croit que j’ai besoin de lui pour rencontrer des patrons ». Un homme dont elle a salué « l’expertise » et le « désintéressement », le 23 janvier, en dépit des travaux de sa commission sur les « freins à la croissance » commandités par Sarkozy.
Il est vrai que Jacques Attali était venu en personne lui présenter son rapport controversé, dans les locaux de Ségo, boulevard Raspail, accompagné des jeunes rapporteurs de la commission. « Ce qui nous a frappés, c’était à quel point ils défendaient mollement leur bébé. Attali avait l’air sincèrement convaincu de sa mission historique de sauver la France. On s’est plutôt amusé, Ségo était caustique, on leur a demandé pourquoi le rapport n’évoquait jamais le paquet fiscal. Ils étaient gênés, lançant à la fin à Ségo : On est comme vous, plutôt centre gauche », se souvient l’économiste Thomas Piketty, qui assistait à l’entrevue aux côtés de la socialiste. Mais le soutien de Royal au rapport Attali en a surpris plus d’un. « C’était bizarre qu’elle le défende, elle a sûrement été flattée qu’il se déplace », essaie de comprendre une élue proche.
Avec Martin Hirsch, nommé haut commissaire aux solidarités actives, qui avait participé à un débat participatif de la socialiste pendant la présidentielle, les relations sont… épistolaires. « Ségolène Royal l’avait pris à parti publiquement sur les franchises médicales, Martin lui a répondu par écrit, il lui a envoyé ses propositions sur le bouclier sanitaire. Elle lui a répondu qu’elle les avait bien reçues et que c’était intéressant », raconte un proche de l’ancien président d’Emmaüs. « Martin lui a envoyé son livre La chomarde et le haut commissaire , ajoute ce proche. Du coup, elle lui a envoyé un mot personnel en retour ». Ils se sont aussi croisés dans un contexte public, mais « Martin ne se souvient pas précisément duquel » ! Ah, la mémoire…
Autre contexte cette fois-ci avec Alain Minc, consultant et essayiste libéral, resté branché à gauche mais davantage proche, depuis longtemps, de Nicolas Sarkozy. La socialiste s’était plainte d’avoir été maltraitée par le conseiller multicartes, ancien président du conseil de surveillance du Monde. La mise en scène de leurs retrouvailles a été travaillée : un déjeuner mi-décembre 2007 dans un restaurant parisien très en vue, Chez Laurent, avec un troisième larron, Mathieu Pigasse, membre des Gracques, ancien du cabinet de Laurent Fabius, aujourd’hui associé-gérant de la banque Lazard. Une réconciliation un peu acide. Mais six mois plus tard, Alain Minc tient à préciser que le « déjeuner s’est bien passé », même s’il ne veut pas en raconter les détails.
Oubliées aussi les critiques contre les Gracques, ces hauts fonctionnaires, pour la plupart, qui prônaient une alliance Bayrou/Royal pendant la présidentielle. « Ségolène Royal a revu les Gracques depuis la présidentielle, précise Bernard Spitz, leader de ce groupe. On ne passera pas chez elle, on ne rentre pas dans les enjeux de personnes. Il y a chez nous des sympathies très grandes avec presque tous les leaders du PS, sauf avec les gauchistes ».
Reste le cas Eric Besson. Ségolène Royal ne l’a jamais revu depuis qu’il est passé avec armes et bagages chez Nicolas Sarkozy. « Eric a, bien-sûr, revu de très nombreux dirigeants socialistes depuis qu’il est au gouvernement, mais jamais Ségolène Royal », précise une proche de l’auteur de Qui connaît Madame Royal ?, best-seller assassin de la campagne présidentielle. Toute la rancune n’a pas encore été jetée à la rivière…
Le week-end prochain, à lire sur Bakchich.info, la suite de notre enquête sur Ségolène Royal.
Le lynchage recommence ! Cela prouve qu’elle est vécue comme ayant sa chance ! Pourquoi ne pas plutôt s’exciter contre quelqu’un qui est au tréfond des sondages ? Il y a des passages de pure mauvaise foi ! "Récompenser les traîtres, non. Mais manger avec eux, les recevoir ou leur envoyer des petits mots, pourquoi pas ? Si elle veut être élue présidente en 2012, l’ancienne candidate a tout intérêt à ramener au bercail les brebis égarées chez Nicolas Sarkozy. Tout comme ces brebis ont intérêt à se ménager une porte de sortie, si leur nouvelle aventure tourne vraiment mal."
Par exemple :
Jean-Pierre Jouyet a toujours dit dans les interviews qu’il restait un ami intime de "François" et de "Ségolène".
Jacques Attali : a été celui qui l’a repérée et présentée à Mitterrand et si probablement il y a eu des hauts et des bas sur toutes ces années, ils ont une relation d’estime et de proximité.
Martin Hirsch : Il n’est pas un traître ! Il a encore dit récemment qu’il aurait accepté ce même poste si Ségolène avait été élu parce que ce qui compte pour lui c’est que cette cause avance et le plus rapidement possible .
Alain Minc et Mathieu Pigasse : je n’en dirai rien car je ne connais pas les tenants et les aboutissants… et en quoi sont-ils des traîtres …
PAR CONTRE :
Vous reconnaissez qu’il n’y a pas de rapprochement avec Besson mais vous oubliez aussi de dire qu’il n’y en a pas non plus avec Bockel, ni avec Kouchner, ni avec Amara !
Je n’aime pas cet angle de vue qui ne présage rien de bon tant il est partial et peu honnête. je précise que j’observe Ségolène et ne lui donne pas de blanc seing. J’ai simplement horreur de la malhonnêteté intellectuelle !
Je constate que le parti pris de ce monsieur faubert est de tourner en ridicule tout ce qui n’est pas de son sens et valoriser toutes les critiques. C’est un choix éditorial…
En ce qui concerne votre article il est juste. Et d’ailleurs ségolène Royal l’avait annoncé dès sa rentrée politique à Melle en Août 2007. Elle avait dit que si les traitres rentraient au bercail il faudrait savoir les accueillir. Il y a eu une bronca mais on avait compris le message. Pas de jugement de personnes et jugement sur les actes. Elle n’est pas dans une logique de revanche mais dans une logique d’une reconstruction du socialisme avec toutes les bonnes volontés et tous les talents. D’où qu’ils viennent. Seuls ceux qui ont un comportement véritables de traitres comme Besson ne seront pas réintégrés c’est clair.
Vous voudrez bien m’excuser, mais je ne suis pas d’accord avec votre fatalisme à l’égard de la bulle du parisianisme.
En 2007, la droite avait besoin de cette « élite parisianiste » : en effet, elle n’avait pas de programme à défendre mais seulement des slogans populistes à diffuser, pas d’idéal à promouvoir mais seulement un candidat à « vendre » et une « story » à raconter.
Assez logiquement, après avoir raconté des bobards pour faire élire son candidat, la droite continue à en raconter pour essayer de gouverner.
Sauf que ça ne marche pas. Car les faits sont têtus.
De tout ceci, on ne saurait nullement conclure à la nécessité, pour la gauche, de vendre des bobards de gauche pour accéder au pouvoir.
En effet la gauche (du moins quand elle est fidèle à elle-même) n’accorde pas la priorité à son (sa) candidat(e), mais aux valeurs qu’elle défend. Autrement dit, à un programme réaliste et cohérent. La question de la personne qui devra promouvoir et incarner ce programme ne se pose que dans un deuxième temps.
Que reste-t-il des « intellectuels » autoproclamés qui ont soutenu le candidat NS ou se sont ralliés au président NS ? Pas grand-chose : regardez la déconfiture actuelle de Glucksmann, Bruckner, Attali et consorts.
Quant à ceux qui ont su conserver un minimum de distance (BHL, Finkielkraut), on ne voit pas ce que la gauche pourrait espérer de leur tam-tam médiatique.
Elle a même tout à craindre de ces bateleurs professionnels, qui sont prêts à raconter n’importe quoi pourvu que ça leur permette de rester sur le devant de la scène.
Recourir aux paillettes intellectuelles et à la poudre aux yeux médiatique, c’est, fondamentalement, manquer de respect aux électeurs, et montrer qu’on se contrefiche des valeurs citoyennes.
Et, à plus ou moins long terme, c’est se préparer un échec bien mérité.
En 1981, il y avait chez les électeurs de gauche un summum d’ « illusion lyrique ». Et, chez Mitterrand, un maximum de cynisme.
Plus jamais ça !!!
Quand Petit Corps Malade quittera le pouvoir (en 2012 ou pourquoi pas avant), il faudra un gouvernement de gauche solide pour réparer tout ce que ce dingue aura démoli : retraites, couverture sociale, etc.
Ce n’est pas avec un gouvernement de girouettes qu’on y arrivera. L’ « ouverture à l’envers » type Ségolène, ce serait aussi débile que l’ouverture version Sarkozy. Ça reviendrait à donner une position d’arbitres à des gens qui sont seulement intéressés par le pouvoir et la bonne soupe.
Alors Attali, passé à droite pour y rater ce qu’il avait déjà raté à gauche…
Alors les « Gracques », qui se prennent pour des rebelles parce que leur centrisme prudent se teinte d’un rose aussi discret que symbolique…
Alors Besson, prototype du traître de mélodrame, figure absolue de l’arrivisme en politique…
…eh bien, qu’on se débarrasse une bonne fois de ces gens-là, et qu’on passe à autre chose.
Ce qu’il nous faut, c’est un renouvellement drastique, voire brutal, des personnels politiques de la gauche. Y’en a marre de tous ces vieux chevaux de retour ! Place aux 30-40 ans !