Ce bon apôtre de Jouyet

Président de l’Autorité des marchés financiers (AMF), Jean-Pierre Jouyet, un ancien socialiste converti au sarkozysme triomphant, n’arrête pas de faire des moulinets contre les méchants spéculateurs qui perturbent les marchés financiers, ouvrant un jour une enquête, critiquant le lendemain les hedge funds, appelant le surlendemain à un axe franco-allemand. En ces temps de disette budgétaire, il se dit même prêt à réduire son salaire plutôt confortable de 300 000 euros par an.

Bref, cet ancien directeur du Trésor passé par le gouvernement de Super Sarko (aux Affaires européennes) avant d’atterrir à l’AMF fin 2008 en pleine crise financière semble en mesure de régler tous les problèmes de la planète finance.

La poigne de Jouyet faiblit parfois, comme l’illustre le dernier rapport de l’AMF publié cette semaine.

L’AMF devait interpréter une directive européenne imposant la création d’un comité spécialisé au sein des conseils d’administration des entreprises cotées en bourse pour suivre les comptes.

Ce comité devrait être placé « sous la responsabilité exclusive et collective des membres » du conseil d’administration, selon les eurocrates.

Pas du tout, rétorque l’AMF, la responsabilité collective n’existe pas en droit français et ne servirait à rien. Les administrateurs, poursuivent nos « sages », peuvent déjà s’opposer à une décision fautive prise par le conseil et même présenter leur démission.

A-t-on déjà vu un administrateur français critiquer une décision prise par le président de la société ? Oui, une fois, dernièrement, lorsque le représentant de la Caisse des dépôts a démissionné du conseil d’Accor. Mais de telles décisions restent extrêmement rares. Les conseils d’administration sont des chambres d’enregistrement.

Et ce n’est pas Jouyet, trop occupé à pourfendre les spéculateurs, qui bouleversera le capitalisme de papa.

Dessin de Ray Clid

-----