Delanoë a particulièrement la cote ces jours-ci, entre la sortie de son livre « De l’audace ! » et ses multiples pages, couvertures, et passages dans les médias. Il en profite le malin. Et pour atteindre son objectif n°1, être majoritaire au Congrès, il est prêt à tout. Enfin presque.
François Hollande aux abonnés absents, comme sonné par un coup qu’il n’avait pas vu venir, Ségolène Royal ne jurant plus que par Jaurès, elle qui l’avait laissé à Nicolas Sarkozy pendant la présidentielle, force est de constater que l’entrée en campagne de Bertrand Delanoë sur le thème « Je suis libéral et socialiste » est rondement menée.
Les proches de Ségolène Royal sont d’autant plus surpris que Bertrand Delanoë, tout en multipliant les critiques contre l’ancienne candidate, semble avoir fait un copier-coller de sa recette : elle avait surfé sur la vague des régionales de 2004, profitant de sa victoire emblématique et des divisions socialistes ; le maire de Paris entend, lui, surfer sur celle des municipales de 2008 et profiter des querelles internes.
L’offensive a été menée en plusieurs temps, orchestrée par un Delanoë qui, dans sa vie, a jonglé entre des années d’apparatchiks et des années de communicant, ami de Lagardère et fidèle de Jospin, en somme !
Tout commence par la couverture du Point du 15 mai autour d’un sondage réalisé par IPSOS, institut qui a travaillé avec Ségolène Royal pendant la présidentielle et qui tend à montrer que les Français, en général, et les socialistes, en particulier, penchent vers l’élu de la capitale : d’après l’étude, 59 % des Français et 52 % des sympathisants socialistes préfèrent que Bertrand Delanoë succède à François Hollande à la tête du PS (contre respectivement 28 % et 40 % pour Ségolène Royal).
La semaine suivante, une du Nouvel Observateur et bonnes feuilles de De l’audace, livre d’entretiens avec Laurent Joffrin. En une, une petite phrase lancée comme un pavé dans la mare par Delanoë pour tester l’opinion : « je suis libéral et socialiste ». Et la mayonnaise monte, le débat tourne alors autour de cette sortie médiatique, obligeant tous ses rivaux au PS à se positionner par rapport à lui. « Ordre juste », « encadrement militaire des mineurs délinquants », « suppression de la carte scolaire », critique des 35 heures… cette tactique avait été payante pour Ségolène Royal, lui permettant d’être désignée haut la main. « Bertrand réussit un joli coup, il pique la modernité à Ségolène et l’oblige à devenir ringarde. Elle est tombée dans le panneau immédiatement », reconnaît un dirigeant socialiste pourtant pas delanoïste.
Et comme ces sorties sont dans l’air du temps médiatique, l’opération réussit ! La presse, Libé, l’Obs, et le Monde notamment, qui ne cessent de demander au PS de se réformer, d’assumer sa social-démocratie comme s’il était aux mains de dangereux gauchistes, donne de l’ampleur à cette querelle. Une telle opération suppose un plan média bien huilé, « Bertrand joue des complicités médiatiques qui avaient bénéficiées à Ségolène », avoue un député socialiste. Au centre de cette opération : Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération et intervieweur de Delanoë dans un livre…. édité par sa femme, Sylvie Delassus, éditrice chez Robert Laffont ! Mais ce plan média a connu quelques ratés. Avant la parution du Nouvel Observateur, Le Figaro et France Inter notamment dévoilent la querelle libérale. Bévue du service de presse de la maison d’édition, qui avait envoyé le livre dans les rédactions non par coursier mais par simple courrier, pariant, en vain, sur la lenteur de la poste !
Libé, qui normalement ne parle pas des ouvrages de ses collaborateurs, évoque à plusieurs reprises le livre, titrant lundi sur « le tournant libéral » du PS. Un ton critique qui a surpris des proches du maire de Paris « Comment peuvent-ils s’offusquer de ce tournant alors qu’être libéral et de gauche, c’est ce que fait Libé depuis vingt ans ? », raille un élu delanoïste. Ami de Lagardère et admirateur de Veltroni, rival de Berlusconi qui a fait campagne en Italie sur le thème : « je suis réformiste, je ne suis pas de gauche ». Delanoë est effectivement libéral.
Mais derrière cette opération médiatico-idéologique, pointe aussi, voire surtout, un coup tactique de celui qui a commencé sa carrière d’apparatchik socialiste si jeune (il était porte-parole du PS puis secrétaire national aux fédérations à 35 ans ) . Ce coup vise à piquer le courant Strauss-Kahn, et à ramener à lui les anciens rocardiens. Michel Destot, maire de Grenoble, le maire de Rennes, Daniel Delaveau l’ancien ministre Alain Richard, l’« intellectuel », Alain Bergougnioux…, les proches de Delanoë égrènent avec un plaisir évident la liste de leurs « prises ». Harlem Désir, quasi porte-parole de l’édile parisien dans cette opération, se réjouit de cette « première dynamique qu’on veut élargir. On veut lancer le congrès sur des idées. Les mots d’ordre sont la clarification et le rassemblement sur une orientation claire, sauf que je ne sais pas comment on va rassembler des courants qui pensent différemment sur l’Europe ou sur l’économie ». En ligne de mire aussi, l’assèchement des « reconstructeurs », cette alliance des amis de DSK, Fabius, Montebourg, Aubry, Hamon qui veulent faire un bout de chemin ensemble sans être d’accord sur tout.
Delanoë fait bien un calcul d’appareil pour être majoritaire au congrès et virer en tête devant Hollande, Royal et les reconstructeurs. Dans ce qui n’est pour l’instant qu’une hypothèse, il s’agira alors de refermer la parenthèse Hollande - Royal, et revenir aux belles années jospiniennes !
« La méthode ce n’est pas la politique du 20 heures, il ne suffit pas d’aller à la télé et de proclamer “la carte scolaire c’est fini” », avoue un député delanoïste qui poursuit, alignant cette fois-ci François Hollande : « il faut faire des choix, clarifier et en finir avec les congrès de synthèse qui aboutissent ensuite aux pires divisions ». Etats généraux, conventions thématiques sur les retraites, la flexisécurité, compétition internationale, les moyens de retrouver de la compétitivité et de la croissance, les amis de Delanoë veulent revenir à ce qu’avait fait Lionel Jospin à la tête du PS de 1995 à 1997. Quand on écoute les proches du maire de Paris, on se dit que le libéralisme n’est pas le dernier « tabou » qu’ils veulent faire tomber. « Oui, on a eu un discours conservateur, reconnaît un député. On veut un parti qui n’a pas honte de son pragmatisme. C’est ce qu’on fait localement, mais nationalement, on était tétanisé, et on n’a pas travaillé. On disait qu’on était contre la réforme des retraites, mais on était incapable de dire qu’il fallait supprimer les régimes spéciaux, qu’il fallait réformer le travail parce que les gens ne gardent plus le même boulot toute leur vie ».
Le pari de Delanoë va-t-il réussir ? « Il prend un énorme risque, il pense que le parti s’est tellement droitisé qu’il va basculer, mon sentiment est inverse », prédit Julien Dray, porte-parole du PS et candidat au poste de premier secrétaire. « Je ne sais pas si on sera majo, mais je sais que l’on dit ce que pense la majorité des dirigeants », lui répond un député proche du maire de Paris. En clair, les socialistes vont-ils tenir publiquement le discours qu’ils tiennent si souvent « off » the record ? Réponse en novembre au congrès de Reims.
Lire ou relire dans Bakchich :
Si Delanoë prépare le champagne pour 2008, Sarkozy, lui, prépare la bière de Delanoë pour 2012. Il ne restera plus qu’à l’ensevelir. Sarkozy y jettera une rose socialiste.
Si vous ne voyez pas que toute l’UMP et les médias inféodés à Sarkozy poussent pour Delanoë, c’est que vous êtes vraiment bouchés à Bakchich ! A votre avis qui est l’actionnaire principal de votre Joffrin libéré ?
Enfin… si vous existez encore en 2017, vous aurez encore à supporter Sarkozy pour de longues, très longues années encore.
Annie a bien raison, imaginons le niveau de la campagne quand on va ressortir les photos de Delanoe a son époque village people !!!
Et vous aurez toujours un ex petit ami aigri pour sortir un livre avant les éléctions recaontant leur vacances à mikonos et la trahison du beau bertrand pour le premier vendeur de kebab qui passait par la.
Delanoe a pris Paris parce que chirac ne voulait pas qu’elle tombe dans les mains de son propre camp (rappelez vous la campagne de Seguin, et voyez comme chirac l’a récompensé pour avoir réussi sa mission).
La droite ne lui fera pas de cadeau la prochaine fois, donc Delanoe est un mauvais cheval.
Maintenant, de là à dire que la cheftaine a plus de chance que lui de gagner !
A mon sens, si le PS n’ait pas capable de zapper cette génération de loosers pour les Dray et les Valls, je via encore me ruiner en Champ en 2012.
LE MUSEE DES HORREURS :
1 / « Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération et intervieweur de Delanoë dans un livre…. édité par sa femme, Sylvie Delassus, éditrice chez Robert Laffont ! »
2 / « Libé, qui normalement ne parle pas des ouvrages de ses collaborateurs, évoque à plusieurs reprises le livre » « Comment peuvent-ils s’offusquer de ce tournant alors qu’être libéral et de gauche, c’est ce que fait Libé depuis vingt ans ? »
3 / « Je ne sais pas si on sera majo, mais je sais que l’on dit ce que pense la majorité des dirigeants », lui répond un député proche du maire de Paris.