La BD « Commandant Achab » aux éditions Quadrants s’inscrit dans la tradition du polar noir au souffre enivrant.
Le capitaine Hachab, héros du roman « Moby Dick » paru en 1851, ne cesse d’accoucher de frères d’imaginaire. D’une adaptation cinématographique française en 2008, l’homme, que le féroce cachalot blanc a rendu unijambiste, traverse les arts comme un danseur de patinoire. Jusqu’à terminer dans l’assiette du dessinateur BD Stéphane Douay qui a cuisiné à feu doux le vieux briscard des mers pour en faire un commandant de police grognard et répugnant. Le genre de type qui se sert de sa jambe désarticulée comme cendrier, enfume son chat de volutes de pétards et va aux putes qui acceptent son infirmité. Une vie de solitude à hauteur d’homme. Et d’un sens aiguisé de la nature humaine qui en font un inspecteur de la Police Judiciaire hors-pair.
La trame scénaristique suinte le polar noir. D’une histoire familiale entre flics. Comme souvent. Karim, muté à la Crim’, doit faire équipe avec le commandant Achab sur une affaire de meurtres de députés aux mœurs dépravées. Le marmouset va apprendre la vie du métier dans les pas du vieil homme au flair coupant comme une serpe de vigne. Cette relation entre deux générations de flics se frotte d’une intimité particulière : la mort du père de Karim dont Achab aurait été, dans le passé, plus ou moins mystérieusement lié…
L e dessin restitue, par un trait précis et fin, les détails qui font qu’un polar BD est réussi : fond noir brisé d’éclats de lumière vive, dialogues ciselés et retenus, attention aux détails du quotidien, enquête qui n’écrase pas les personnages. Sans fard ni dérangeants rebondissements, le scénariste et le dessinateur des Éditions Quadrants ont su trouvé un équilibre de style sans tirer les ficelles du genre maintes fois épuisées.
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