Le régime soudanais contre-attaque aux accusations le désignant pour les crimes commis au Darfour en ouvrant les portes d’un camp militaire où sont retenus 91 enfants-soldats. Des gamins kidnappés au Soudan et au Tchad par le Mouvement pour la Justice et l’Egalité (JEM), le principal groupe rebelle du Darfour. Un reportage de « Bakchich ».
Le camp militaire n’a même pas de nom. Ou du moins, on ne nous le donne pas. Il est « après la raffinerie d’El-Geili », à une heure et demie de route, puis de piste, au nord de Khartoum, la capitale soudanaise. Un camp planté au milieu du désert. Un désert plat comme la main avec, çà et là, quelques maigres buissons jaunis. Depuis le 10 mai dernier, il abrite 91 enfants, âgés de 11 à 15 ans. Ils ont participé au raid contre Khartoum, lancé par Khalil Ibrahim, le leader du Mouvement pour la Justice et l’Egalité (JEM), le principal groupe rebelle du Darfour. Un raid insensé de 1600 kilomètres dans le désert. Partis du Darfour, à bord de 250 véhicules, les rebelles darfouriens n’ont été bloqués que sur les ponts qui enjambent le Nil, séparant Omdourman de Khartoum, par l’armée soudanaise. Soit très tardivement… Au milieu des combattants aguerris du JEM, des gamins apeurés, qui abandonnent leurs armes, et tentent de se cacher.
Le plus jeune à 11 ans, il aidait à la cuisine et servait le thé aux combattants. Les plus âgés, 15 ans, étaient contraints de porter les armes. Tous racontent la même histoire. Mohammed a 14 ans, il est Tchadien et parle quelques mots de français. « J’ai été enlevé avec trois de mes copains après un match de football par des gens du JEM. Je ne savais pas où ils nous emmenaient. Ils ne nous disaient rien ». Ses poignets sont encore marqués. Pour qu’ils ne puissent s’échapper durant ce raid qui a duré une semaine, les rebelles les attachaient aux véhicules, jeeps, 4X4, camions. « Quand les soldats soudanais nous ont tiré dessus, trois personnes à côté de moi ont été tuées et une autre blessée. J’ai pris peur, je me suis enfui », ajoute-t-il.
Tous les témoignages confirment le rapport d’Anna Schmitt, de l’ONG de défense des droits de l’homme Waging Peace, dont le siège est à Londres. Selon des « entretiens approfondis » avec des chefs de camps de réfugiés à la frontière du Tchad et du Soudan, « les enfants sont enlevés à l’intérieur même des camps de réfugiés, en plein jour, avant d’être vendus à des groupes rebelles opérant dans les environs ».
Logés par groupe de douze dans des dortoirs, au premier étage d’un bâtiment en dur, les gamins paraissent correctement traités. Ils font du sport, regardent la télévision, dessinent, prient ensemble à la mosquée. Mais ils ne peuvent pas sortir de ce camp militaire.
« Ces enfants ne sont pas en prison. Il ne s’agit que d’un camp de réinsertion, de réhabilitation. Rien à voir avec Guantanamo », assure-t-on. Alors, pourquoi les parquer au milieu du désert, loin d’une ville, et surtout loin d’écoles ? Et pourquoi ne pas les rendre à leurs familles, au Darfour et au Tchad ? « C’est pour assurer leur sécurité », répondent, embarrassées, les autorités soudanaises. Les Nations Unies estiment que 7 à 10 000 enfants ont été kidnappés à l’Est du Tchad en 2007. Nial, 15 ans, a été enlevé dans un camp au Darfour. Il a passé quelques semaines avec les rebelles, avant de partir attaquer Khartoum. « Je n’ai pas eu d’entraînement militaire et je n’ai pas tiré un seul coup de feu », jure-t-il. « Khalil Ibrahim disait qu’il allait devenir président et que nous serions tous riches. Même nous les enfants nous toucherions des millions », assure ce gamin en tenue de sport bariolée.
Cette visite, organisée par le pouvoir soudanais, est, pour lui, un moyen de montrer que l’opposition au Darfour n’est pas non plus très respectueuse des droits de l’homme. Et que si elle parvenait un jour à prendre le pouvoir, elle ne ferait sans doute pas grand cas de la démocratie.
Mais quand ces enfants retrouveront-ils la liberté, et leurs familles ? Jiji Ganga, l’officier soudanais qui dirige le camp, reste très vague. « Bientôt, bientôt. Ce sont des enfants, ils ne sont pas responsables de l’attaque contre Khartoum », souligne-t-il. En revanche, les adultes, les « vrais » rebelles, sont actuellement jugés par un tribunal spécial de Khartoum pour « terrorisme ». Ils risquent la peine de mort.
Lire et relire sur Bakchich :
En attendant, le tyran Bachir a été condamné par le TPI de La Haye. Il doit être arrêté et jugé… !!
En ce qui concerne les enfants soldats, malheureusement il en existe des milliers dans toute l’Afrique et ce n’est qu’en aidant davantage ce continent, que les conflits s’arrêteront et que les jeunes Africains pourront éviter ce calvaire dans lequel ils sont enrôlés de force ou en donnant de l’argent à leurs parents miséreux… !!