Le « sens de l’histoire » va-t-il vers une Europe des régions plutôt que des États ? Les élus français ont en tout cas compris que c’est à Bruxelles, où elles ouvrent des bureaux à tour de bras, que tout se passe. Reste à savoir comment exister dans une Europe forte de 344 régions. L’enquête de « Bakchich ».
Si nos énarques tricolores considèrent l’Europe comme un père castrateur, d’autres la voient comme une bonne mère. Et pour cause : le budget annuel de la Commission pèse 129 milliards d’euros. Miam ! Les agriculteurs en mangent certes une bonne partie au titre de la fameuse PAC (Politique agricole commune) mais un bon tiers de cette manne est distribué aux régions européennes. Derrière des noms barbares comme Feder (Fonds européen de développement régional) ou FSE ( Fonds social européen), se cachent de juteuses aides aux territoires et à leurs entreprises. En effet, l’Europe met un euro au pot régional si le pays et les collectivités en ajoutent autant. Sur la période 2007-2013, les fonds ainsi distribués à la France s’élèveront à 2 milliards d’euros par an.
Si le pékin français moyen ignore ces détails comptables, nos élus régionaux français ont vite fait leurs calculs. Résultat : tous les conseils régionaux se ruent à Bruxelles. « C’est là que tout se passe. 80 % des lois hexagonales sont inspirées par l’Europe. Il vaut mieux être près des sources pour y voir clair », reconnaît cet officiel français sur place. Les 22 régions tricolores y possèdent maintenant bureaux et permanents, si possible à proximité des lieux de pouvoir que sont le Parlement européen et la Commission. Certains s’allient même pour partager les frais, comme le trio de régions Poitou-Charentes-Bretagne-Pays de Loire. Au total, si on met de côté les Dom-Tom, représentés par Eurodom, elles emploient une soixantaine de permanents.
Pour peser plus lourd encore dans la capitale européenne, l’Eurorégion constitue un must. Kesako ? Un regroupement transfrontalier à l’instar de l’Eurorégion Alpes-Méditerranée qui réunit cinq régions françaises et italiennes (Rhône Alpes, Provence-Alpes-Côte-d’Azur, le Piémont, la Ligurie et le Val d’Aoste). Le 31 janvier, dans une joyeuse ambiance, leurs présidents respectifs qui revendiquent d’être « unis par le vin, la bonne chère et par des patois communs », inauguraient le siège de leur association. Un immeuble acheté par le Piémont qui loue les bureaux à chacune des représentations. Simple association, l’Eurorégion constitue surtout un pas vers l’étape suivante. Quand l’encore très rare statut de GETC – Groupement européen de coopération territoriale – sera reconnu des deux côtés des Alpes, cet ensemble transfrontalier pourra même recevoir et gérer directement des fonds de l’Europe, en faisant la nique à leurs États respectifs.
On ne le soulignera jamais assez, cette danse du ventre de nos élus régionaux devant Bruxelles est aussi le résultat d’un puissant dépit amoureux. « On est parfois plus en phase avec Bruxelles qu’avec l’État », avoue Alain Rousset, président de l’Aquitaine et de l’ARF, l’Association des régions de France. « Il ne s’agit pas forcément d’être présent à Bruxelles pour réclamer des subventions », détaille un connaisseur. « Mais c’est important pour un président de région comme la Bretagne, par exemple, de connaître le commissaire chargé de la pêche. Cela évite de se faire enfumer par le gouvernement qui, sur ces questions, met parfois sur le dos de l’Europe des refus qui vienne de lui ». Et un des permanents de l’ARF d’enfoncer le clou :« L’énarchie va contre le sens de l’histoire. Cela fait 25 ans qu’elle n’a digéré ni la décentralisation, ni la montée en puissance de l’Europe et nous coupe les ailes financièrement. Nos moyens fiscaux sont ridicules face aux charges qu’on nous a confié ». Ambiance…
En réalité, nos belles provinces bavent d’envie devant les Länder allemands, les régions italiennes ou espagnoles. Dans ces pays décentralisés, celles-ci négocient directement avec la Commission décrochant ainsi un pactole plus important.
En France, les discussions se déroulent sous la tutelle des préfets de région. Un hyper centralisme qui horripile nos élus locaux. Seule l’Alsace, grâce à Jean-Pierre Raffarin, a obtenu un régime expérimental pour jouer les grandes. Mais ce n’est pas gagné… « Les Français ne pèsent pas très lourd. Allez voir le “château de la Bavière”, installé en face du Parlement », suggèrent plusieurs observateurs en désignant un bâtiment en forme de camembert debout. Il abrite une bonne trentaine de représentants de ce Land. Il faut dire que, contrairement à la France, les Länder allemands comptent d’avantage de représentants à Bruxelles que l’État fédéral. Ce n’est donc pas un hasard si les régions d’autres États fédéraux comme l’Espagne ou l’Italie disposent aussi de délégations conséquentes.
Et avec l’élargissement à de nouveaux pays, la concurrence devient rude. L’Europe compte désormais 344 régions. Les françaises, classées parmi les plus riches, risquent de ne pas toucher autant d’argent après 2013 que dans le budget en cours. L’Europe a en effet promis de verser sa manne vers les régions des nouveaux arrivants. Une échéance encore lointaine même si la bataille du lobbying fait déjà rage.
Comment devenir une "région européenne", dans un état "fédéral" à peu près acceptable pour la psychologie des individus ?
Suppression de tout echelon préfectoral en France, de quelque nature que ce soit.. C’est à dire suppression de l’idéologie "republique indivisible" française. Démocratie directe à la suisse ; démocratie représentative à l’Américaine Personnellement je suis pour…….
les plus astucieux sont les dom tom…eux ne regardent plus vraiment vers la métropole, mais directement vers les fonds européens