Cité dans l’affaire Clearstream, l’avocat Alain Guilloux souhaiterait que les juges d’Huy et Pons auditionnent le secrétaire général de l’Elysée pour que ce dernier éclaircisse le rôle de l’ancien patron des RG, Yves Bertrand. Etrangement, les deux magistrats n’en voient pas l’intérêt.
Comme beaucoup d’autres, Alain Guilloux, avocat, aimerait beaucoup savoir qui a eu cette idée folle, un jour, de l’impliquer à l’insu de son plein gré dans l’affaire Clearstream, instruite par les juges Jean-Marie d’Huy et Philippe Pons - en ajoutant son nom à la liste, longue, des bénéficiaires imaginaires de comptes bancaires offshore qui ne l’étaient pas moins.
Guilloux a, sur le sujet, son idée : il pense (très fort) que c’est un coup des Renseignements généraux (RG), dont l’ancien patron, Yves Bertrand, l’avait, pense-t-il, dans le nez.
Alain Guilloux n’est pas complètement seul à formuler la hardie supposition selon laquelle les RG seraient mouillés dans les faux listings Clearstream : Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée, soupçonne également Yves Bertrand, et n’en fait pas mystère, d’avoir été l’un des « instigateurs de l’affaire Clearstream » - et le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, est du même avis, là, que son fidèle secrétaire. Cela ne fait certes pas une preuve, mais cela aurait sans doute justifié l’audition, par les magistrats instructeurs, de Claude Guéant, qui a quand même été, dans une vie récente, et avant l’Elysée, le directeur général de la police nationale – et qui par conséquent doit en savoir long comme le bras sur le fonctionnement des RG.
Cette audition, l’avocat l’a fort logiquement demandée. Mais les juges lui ont répondu, le 15 mai, par une ordonnance, qu’elle s’imposait d’autant moins que les propos de Claude Guéant sur l’affaire Clearstream étaient « totalement étrangers aux faits objets de (leur) instruction ». Donc : les deux magistrats en charge de l’affaire Clearstream savent qu’un ancien grand chef policier a des choses à dire sur l’affaire Clearstream – mais considèrent que ça ne vaut pas le coup de procéder à son audition.
Ému, sans doute, par l’extrême cocasserie de ce choix procédural, le défenseur d’Alain Guilloux, Daniel Vaconsin, a fait appel et vient d’adresser, le 26 mai, au président de la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris, Daniel Magdeleine, une lettre pleine de gros morceaux de raillerie.
Daniel Vaconsin doute, par exemple, que « le fait de s’interroger sur l’identité des commanditaires et des auteurs de la manipulation Clearstream constitue vraiment une démarche intellectuelle « totalement étrangère » à » l’instruction de l’affaire Clearstream – et comme on le comprend. Taquin, il observe qu’ « alors que l’enquête » menée par les juges d’instruction « n’a pas permis de découvrir avec certitude les responsables de cette affaire, voici que l’on apprend que le premier magistrat français et l’un de ses principaux conseillers », comprendre Nicolas Sarkozy et Claude Guéant, disposeraient « d’éléments suffisants pour accuser » les RG « d’être mêlés à cette opération » - et il s’étonne que « les magistrats instructeurs » jugent « inutile d’entendre un homme qui a pourtant exercé les fonctions de directeur général de la police » et « de lui demander la nature des renseignements sur lesquels reposent les accusations » qu’il a formulées.
Daniel Vaconsin estime quant à lui qu’« il paraît impossible de faire l’impasse » sur les propos de Claude Guéant, et conclut : « Alain Guilloux forme le vœu que le « filtre » détenu désormais par la présidence de la chambre de l’instruction » de la Cour d’appel « ne se transforme pas en « philtre » dont les vertus stupéfiantes viendraient frapper les avocats téméraires s’obstinant dans la recherche d’une vérité inopportune ».
C’est pas gentil, de se moquer.
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Moi aussi je m’y perds et ce ne sont pas vraiment les journalistes qui répètent en bon télégraphistes tous les propos dictés par le juge Courroye (si, ça commence à se savoir !) qui vont nous aider à comprendre mieux.
Je suis journaliste et suis atterré de voir le fonctionnement de la presse aujourd’hui qui préfère sombrer dans la partialité et le mensonge plutot que de risquer de se griller une source d’info précieuse…comme un juge d’instruction par exemple.
Journalistes, faites votre boulot même si ça vous demande de vous creuser plus la tête on vous méprisera moins.