Quel monde odieux que la finance ! Jérôme Kerviel, accusé d’avoir fait perdre la bagatelle de 5 milliards d’euros à la Société générale, début janvier 2008, se fait fort, dans l’ouvrage qu’il publie, de nous instruire sur un monde sans pitié. « Aucun trader ne ménageait sa peine. C’est tout juste si nous nous autorisions une ou deux fois par demi-journée une courte pause-café ou cigarette au pied de la tour. » De l’esclavage moderne ?
Songez que les traders, parfaitement désintéressés, n’ont qu’une obsession : faire gagner de l’argent à leur banque. Notre ami Kerviel passe rapidement sur les bonus pouvant atteindre jusqu’à dix fois le salaire annuel. Ainsi, JK avait obtenu la promesse d’avoir 300000 euros au titre de l’exercice 2007 en plus de son salaire de base de 40000 euros, le lot de tous les Français ou presque.
À quelques semaines de l’ouverture de son procès, Kerviel veut prouver que c’est le système qui l’a écrasé et pour cela il a besoin d’aide. « Je lance donc ici, écrit-il, un appel à témoin. » Ce chevalier blanc reconnaît avoir pris des positions un peu osées sur les marchés boursiers, plaçant jusqu’à 50 milliards d’euros – quasiment deux fois les fonds propres de la banque – ou réalisant des opérations fictives. Mais ses supérieurs, nous explique-t-il, le couvraient. La preuve ? Leur manque de réaction face aux multiples alertes des services de contrôle. Et là, on découvre que notre trader favori peut aussi être très drôle. Car les courriers électroniques qui figurent dans le dossier judiciaire montrent qu’à chaque alerte il inventait une explication suffisamment convaincante pour que ses chefs le croient. Des chefs, il est vrai, pas très curieux.
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