Un homme providentiel va faire renaître de ses cendres le Groupe Caisse d’épargne et le marier au Groupe Banque Populaire. François Pérol, énarque et ancien du Trésor, va donc quitter le calme feutré de son bureau à l’Élysée et son poste d’influent secrétaire général adjoint en charge des affaires économiques pour se transformer en patron de banque commerciale.¨
Premier grief contre la nomination de François Perol, ce proche de Sarko fut, dans une autre vie, banquier d’affaires. Autant dire qu’il ne connait rien au métier de banquier commercial. Et rien non plus aux arcanes de ces deux grands réseaux bancaires, aux mains de vieilles baronnies, et où rien n’est simple. Ne dit-on pas que c’est le Grand Orient qui fait la loi aux Caisses d’épargne et la Grande Loge de France aux Banques populaires ?
Le pantouflage de hauts-fonctionnaires à la tête des banques, n’est pas une première en France. Et l’Inspection des finances à laquelle appartient Perol (et dont il recevait un traitement alors qu’il était à l’Elysée) a jeté son dévolu sur le système bancaire français depuis au moins quarante ans. Mais cette fois, on en revient au temps de l’économie administrée où les plus fervents vassaux du prince sont récompensés par des promotions qui se font au mépris des traditions républicaines.
François Pérol a été en charge du dossier des Caisses d’épargne lorsqu’il était directeur adjoint du cabinet de Françis Mer au ministère de l’Économie en 2002. Il pilote alors le divorce entre la Caisse des dépôts et les Caisses d’épargne qui avaient créé ensemble Eulia-Ixis, une banque d’affaire et d’investissement. François Perol obtient gain de cause, exit la Caisse des Dépôts.
En 2005, c’est encore François Pérol, passé chez Rothschild en tant que banquier d’affaires, qui conseille le Groupe Banque Populaire, pour fusionner sa banque de financement et d’investissement Natexis avec celle des Caisses d’épargne, qui portera le nom de Natixis. Une idée de génie, qui se solde par l’un des plus beaux désastres bancaires français : Natixis devrait annoncer cette semaine plus de 2 milliards d’euros de pertes, après deux recapitalisations de 6,2 milliards et une injection de fonds de 2 milliards d’euros.
Et ce n’est fini, on évalue à 40 milliards d’euros, les actifs risqués que porte la filiale de l’Ecureuil et des Banques Populaires dans son bilan.
Mais François Pérol connaît le dossier par cœur. Depuis son arrivée à l’Élysée en juin 2007, il est en charge des dossiers économiques - c’est d’ailleurs lui qui a reçu Bernard Tapie au Palais comme l’avait révélé Bakchich - et bien sûr du plan de sauvetage des banques. Depuis des mois il scrute à la loupe, l’inéluctable descente aux enfers du Groupe Caisse d’épargne, plombé par des investissements hasardeux et des interventions débridées sur les marchés financiers.
Si la morale réprouve la nomination de Perol, le droit ne la condamne sans doute pas. La Commission de déontologie qui devrait se prononcer dans le mois qui vient sur le cas quii nous occupe s’oppose en effet aux transferts consanguins lors qu’il s’agit de hauts fonctionnaires membres du Trésor. En revanche, lorsqu’ils appartiennent à un cabinet ministériel ou à celui du Président de la République, ils échappent à la loi commune. Pour l’instant, la commission ne s’est pas réunie. Seule son président, Olivier Fouquet, et à titre personnel, indique que l’actuel conseiller de Sarko peut rejoindre le groupe.
La voie est libre pour François Pérol. Pour le moment…
À lire ou relire sur Bakchich.info :
Puissance de l’Etat et mutualisme, sont à l’honneur cette semaine, avec ce grand pari du côté des banques françaises, chez les Caisses d’Epargne et les Banques Populaires. Medias, observateurs, politiques… Après le temps de l’information émotion, voici celui de l’information morale. Le trouble mental est le même. On se mobilise pour débattre, polémiquer sur la nomination de François Pérol à la tête du 2e groupe bancaire français (juste derrière Crédit Agricole-LCL) et l’un des tout premiers ensembles européens. Le projet économique est passé le plus souvent au second plan. Sa nomination est-elle ou non déontologique ? Que disent les sages ? Curieuse pratique de recrutement toutefois qui n’interroge pas l’impétrant sur son projet économique ? Comment François Pérol fusionnera deux cultures qui, un grand siècle durant, ont façonné leurs différences, alors qu’elles avaient tant de points communs ? Comment managera-t-il 110 000 personnes ?
En ce début d’année 2009, en pleine crise économique, quelque chose a basculé. Les deux premières banques françaises sont désormais des banques mutualistes. Voilà le vrai sujet. L’Etat revient dans l’économie… Les réseaux mutualismes, jugés ringards voici dix ans et poussés vers des modèles capitalistiques qui leur coûtent des pertes historiques, portent un modèle de gouvernance, « un homme, une voix », utile pour la réflexion sur la moralisation du capitalisme.
http://labetiseeconomique.wordpress.com/
Dans le courrier du président de la Commission de déontologie, M. Fouquet, au Secrétaire général de la Présidence de la République, un oubli est flagrant dans l’étude de la jurisprudence citée.
En effet, le cas très similaire d’un secrétaire adjoint à la Présidence de la République passant dans le secteur bancaire exsite : dans son avis n° 06.A0882 du 28 septembre 2006, la Commission a émis un avis de compatibilité, mais sous réserve que l’intéressé s’abstienne de toute relation professionnelle avec le secrétariat général de la Présidence. Ce qui serait bien évidement plus que génant pour M. Pérol puisque le secrétariat de la Présidence est en charge du suivi de l’ivestissement de l’Etat dans le groupe bancaire (ou du moins des modalités de sa mise en oeuvre), et l’on comprend tout à fait qu’il ne souhaite pas que son dossier soit étudié par la Commission de déontologie !
Ces éléments figurent à la page 43 du rappor 2006 de la Commission disponible ici : http://www.fonction-publique.gouv.fr/IMG/rapport12eme_deontologie_2006-2.pdf