L’Education nationale est en pleine crise financière, et ce 24 novembre, les profs manifestent. En revanche, les écoles des riches se portent bien, merci ! Enquête sur l’école Bilingue de Paris.
Multiplication des établissements privés au détriment du public dans le second degré à Paris (103 lycées privés pour 75 publics), révision des programmes, engorgement des classes, suppression de 16 000 postes dans l’Education nationale en 2010 (portant ce chiffre à 50 000 en 3 ans).
Depuis plusieurs années, l’enseignement public vit une période particulièrement sinistrée.
L’occasion de relire aussi :
Article publié le 13 novembre 2008
Les établissements privés sous contrat d’association, eux, se portent bien. Merci aux familles de ces chers petits, qui mettent la main à la poche. Et merci à l’État qui, via des contrats d’association, finance une large partie des dépenses de ces écoles « privées ».
Bakchich a mené l’enquête à l’École Active Bilingue Jeannine Manuel (EABJM), située dans le XVe arrondissement de Paris, qui fait à la fois école, collège et lycée. Un bon exemple d’école tout particulièrement privilégiée.
Créée en 1954, l’école, associée de l’UNESCO, est aujourd’hui, d’après son site Internet, « l’école privée sous contrat d’association non confessionnelle la plus importante de France ». De bonne réputation, elle peut se vanter d’un excellent taux de réussite au bac (100%). Et de fait, Dame bilingue fait partie des écoles les plus recherchées par l’élite parisienne. Pourtant, d’après le magazine L’Express, qui effectue chaque année une enquête – qualifiée de « très sérieuse » par le rectorat de Paris – sur les lycées français, Jeannine Manuel est loin d’être le meilleur. Et n’est classé que 278ème sur 1871. Explication, « la moitié de la note finale est due à la performance (taux de réussite au bac), l’autre moitié à la capacité du lycée à accompagner et faire progresser tous ses élèves ».
Sont assis sur les bancs de l’école bilingue ou ont été assis : Louis, le fils de Nicolas Sarkozy (aujourd’hui inscrit pour 4600 euros l’année à Dubaï), les enfants de Jean-François Copé, ceux de Bouygues, de la dynastie des Servan-Schreiber, les enfants des Schlumberger, de la famille Bic (stylos), des Paretti (Crédit lyonnais), ceux de Pouzilhac, de Christian Clavier, d’Alain Delon, de Patricia Kaas, de Thierry Ardisson, ou encore d’Arnaud Lagardère et de Denis Kessler, l’ancien du Medef.
Un gentil microcosme de représentants de très hauts milieux d’affaire, politique, médiatique, et du show-biz. C’est que pour intégrer Bilingue, il faut payer son ticket d’entrée.
L’inscription d’abord. 1 395 euros par trimestre pour le lycée (plus les « frais de dossier » : de 40 à 60 euros), et 4 090 euros par trimestre pour l’inscription en terminale, option Baccalauréat international. Des broutilles !
Après l’inscription, il faut se nourrir. Et ouvrir de nouveau grand les porte-monnaies. Le ticket-repas est à 13,50 euros pour les externes [1].
Les enfants peuvent aussi apporter leur panier repas. C’est le système du « lunch-box ». Dans ce cas, les parents payent également. 7,30 euros le ticket ! Car, pour cette somme, « un four micro-ondes est à disposition des élèves, et la surveillance est assurée par l’école. » Une surveillance, apparemment, de tous les instants !
Des activités annexes s’ajoutent au programme de l’Éducation nationale : ateliers création, tricot, musique, théâtre en langue anglaise, tennis - jeux de raquettes - motricité, cours de japonais, stages linguistiques internationaux, etc. A chaque fois, il faut passer à la caisse.
Bakchich a essayé d’inscrire sa fille, Marie-Charlotte, en classe de première. Nous avons imaginé que Marie-Charlotte habitait jusqu’à aujourd’hui à Rouen et que son père allait être muté à Paris l’année prochaine. Bilingue, a-t-on entendu dire, est une bonne école. La journaliste de (Bakchich) s’est présentée à l’accueil de l’école.
– C’est pour l’inscription de ma fille, Marie-Charlotte…
– Ah, lui répond la secrétaire, mais si votre fille ne vient pas d’une école bilingue, je vous préviens tout de suite, cela risque d’être difficile.
Nous tentons de plaider notre dossier.
– Même si elle maîtrise assez bien l’anglais ? Je l’ai envoyée un mois et demi aux États-Unis l’an passé.
– Oui, même dans ce cas-là. Le mieux est d’être inscrit à Bilingue dès le primaire.
– Tout de même, j’imagine qu’il y a de nombreux admis en classe de première ?
– Cette année, sur quarante sept nouveaux dossiers, nous n’en avons admis que deux.
Ce dialogue montre au moins une chose : l’inscription à Bilingue se prévoit dès la naissance. Voire dès la conception de l’enfant !
Mais les parents d’élèves ont les moyens. Certains, même, en rajoutent dans le don facile, pour faire plaisir au corps enseignant.
Un jour, il y a une dizaine d’années, Papa Lagardère a (très gentiment), apporté des paniers pique-nique à un certains nombre d’enseignants de l’école. Dans ces paniers, il y avait toutes choses dignes de ce qu’un riche industriel et patron de presse, peut offrir. À savoir, du champagne, du foi gras, du caviar, etc. Un cadeau équivalent à un demi-smic à l’époque, selon un prof qui, ayant reçu un panier, a fait le calcul.
Un enseignant de Bilingue explique : « Ce ne sont évidemment pas toujours des cadeaux aussi importants, mais ces pratiques sont très courantes à Bilingue. Elles font parties d’un système « naturel » chez les personnes riches. C’est un peu : "tu me donnes, je te donne" ». Il ajoute : « Je ne crois pas que ce soit pour augmenter les notes de leurs enfants. Mais c’est vrai qu’après ça, c’est difficile de rester objectif ».
Des tickets de cantine exorbitants, des activités coûteuses, des cadeaux généreux… Autant de signes qui montrent sur quel pied vivent les élèves. Mais ce mode de vie n’est pas du tout celui des enseignants…
À lire ou relire sur Bakchich.info :
[1] Les « externes » désignent les élèves qui ne mangent pas régulièrement à la cantine
Les écoles privées sont et resteront des écoles de la discrimination sociale, oserai-je de l’ostracisme social… Ma chère tête blonde ne fréquentera pas le vulgus pecus.
Le soi disant absentéïsme des profs du public est contredit par les enquêtes, ils ne sont globalement pas plus absents que d’autres professions, c’est là un argument fallacieux.
Une école privée payante… ben mince, c’est un scoop !
En plus, avec la liste des enfants, on y inscrirait presque ses gosses juste pour demander des autographes en réunion de parents d’élèves !
Pour ma part, j’ai "fait les deux écoles" comme le chantait Sardou "et ça n’a rien changé"… Si ce n’est que dans le privé, mes parents savaient que l’ensemble des cours prévus sur mon planning seraient assurés, et ce toute l’année scolaire. Je n’ai jamais été assis à coté de l’enfant d’une star (à mon grand regret^^) mais j’y ai en revanche cotoyé des enfants de profs du public… qui devaient sans doute savoir ce qu’ils faisaient !
Vrai pour l’absentéisme des prof dans le public( désolé pour ceux que ça ne concerne pas, étant donné que sont toujours absents les mêmes !).
Il manque dans l’article quel est le taux(en pourcentage) de subventions d’état pour ces écoles. Cela permettrait de savoir si ça vaut le coût (financier) d’en subventionner ou pas, c’est à dire si c’est juste pour aider les "riches".
Pour ma part, pas riche, mais choix d’une école privée à cause de l’absentéisme et du je-m’en foutisme de certains profs du public.
Les bons résultats s’obtiennent, entre autres, avec des moyens : les profs d’une ecole sous contrat sont payés par l’état, quasiment autant que les profs du public. Les sommes versées par les parents permettent de payer le reste de l’encadrement, d’offrir de meilleures conditions de travail … et de verser aux profs des heures sup ou de permettre des sorties scolaires : l’implication suopérieure des profs du privé n’est donc pas désinteressée.
Quant aux profs du public, leur conditions de travail, matérielles tant que morales peuvent expliquer leur découragement. Imaginez que nos statuts et la plupart des textes de référence datent de 50 ans …
Enfin pour ce qui est de l’absentéisme, pensons qu’il y a plus de 60% de femmes dans ce métier, et que beaucoup ont des enfants…
Cela dit, il y a des profs non professionnels, qui ne font pas leur boulot, qui sont souvent absents … comme dans toutes les profession. La question est de savoir si cela est plus ou moins tolérable dans l’éducation nationale qu’ailleurs !!!
Guillaume, prof dans une école catho sous contrat.