Rahmadin, un jeune Afghan, est mort à Dunkerque en voulant fuir vers l’Angleterre, caché sous un camion. Et le transfert de sa dépouille vers Kaboul est retardé par le nuage de cendres.
Rahmadin, c’était son prénom, a trouvé une fin tragique sous les essieux d’un camion, la nuit du samedi 10 avril. Selon une enquête de la police, aujourd’hui classée sans suite, sa cage thoracique aurait été enfoncée accidentellement juste avant que le camion ne monte dans le ferry de Loon-plage, dans la région de Dunkerque.
Mathieu Quinette, en mission dans la région auprès des migrants pour Médecins du Monde, précise : « Les camions ont souvent trois séries de roues, dont l’une peut être surélevée avant une embarcation. Le jeune homme devait être caché au mauvais endroit… » Version confirmée par les Afghans du camp de Loon-plage selon le médecin et notamment par un ami qui le suivait de près, caché lui-même sous les roues du camion précédent. A la vue du drame, il est sorti de sa cachette et s’est rendu à la police.
Une fin tragique évoquant Welcome, le film de Philippe Lioret où en épilogue un jeune Afghan se noie en voulant traverser la Manche. La réalité calquée sur la fiction, les associations sur le terrain sont encore choquées.
Françoise Lavoisier, représentant Salam-Dunkerque, le connaissait. « Il est arrivé ici il y a plus d’un mois avec son cousin. Ce dernier souffrait d’une appendicite, on l’a opéré et il a séjourné, avec Rahmadin à ses côtés, à Bailleul, dans une maison de convalescence. Calmes, discrets, ils avaient un sourire d’ange. La barrière de la langue a empêché qu’on en sache plus sur eux. Apparemment son cousin est passé en Angleterre une semaine avant la tentative tragique de Rahmadin. »
Mardi 13 avril, selon Mathieu Quinette, un proche de la famille a débarqué d’Angleterre à Dunkerque et a obtenu son rapatriement par l’ambassade afghane. Mais le transfert vers Kaboul a été interrompu par le nuage de cendres qui paralyse le trafic aérien, et la dépouille de Rahmadin attend pour l’heure en Allemagne.
Tous les pays n’offrent pas une telle solidarité selon Michel Candat, du MRAP Dunkerque. « Il y a quelques mois, un jeune Vietnamien décédé dans l’un des camps de la région a été incinéré. Ses cendres renvoyées à sa famille. Nous avions l’intention d’organiser une collecte pour renvoyer son corps mais c’était beaucoup trop coûteux…nous avons fait une cérémonie religieuse sur le camp avec le Père Dominique, prêtre de la paroisse de Téteghem, où ce trouve le camp, celui-ci a pris en charge le coût et les démarches. Leur ambassade n’ayant pas voulu s’en occuper. »
Mathieu Quinette dénonce des contrôles sans cesse renforcés sur le littoral et qui « poussent les migrants à toujours plus de risques ». « Se cacher sous des essieux devient de plus en plus fréquent. » Peaux arrachés, amputation voire décès ; les organisations Salam, Médecins du Monde, MRAP, toutes ont des anecdotes plus ou moins glauques sur ces tentatives de passage.
« Il est temps de changer les choses, on ne peut plus assister à ce massacre » se désole Michel Candat. Cette région semble bel et bien un cauchemar : Destruction permanente des campements, du matériel humanitaire, pression sur les bénévoles. Aujourd’hui même, le camp de Téteghem (au sud de Dunkerque), selon nos informations, serait détruit.
Pour autant, Quinette rappelle que la France n’est pas le pire des pays. « Sur les chemins migratoires, entre l’Iran et la Turquie, beaucoup meurent de froid dans les montagnes ; entre la Turquie et la Grèce, ce sont des bateaux qui coulent. Mais ce qui me désole en France, c’est de voir ces hommes anonymes, sans aucun statut, aucune protection, ils peuvent être jetés en pleine mer sans qu’on puisse y redire. C’est un déni d’humanité. »
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J’ai du mal à comprendre où va cet article.
Doit-on en conclure que vous lancez une pétition en vue d’obtenir :
l’interdiction en Europe des modèles de camions équipés d’essieux retractables,
l’installation de télésièges à sièges chauffants (si si, ça existe !) en Iran et Turquie,
l’obligation pour les passeurs d’équiper leurs bateaux de cannots de sauvetage performants.