L’homme d’affaires vedette de l’Angolagate, Pierre Falcone, n’hésitait pas à financer Charles Pasqua, Jean Charles Marchianni, mais aussi, un certain John McCain, alors sénateur de l’Arizona.
Les envolées lyriques de l’avocat de l’Angola demandant l’arrêt du procès retombées, les coups de boutoir contre la procédure écartés, les audiences de l’Angolagate ont repris. Bientôt les énormes flux financiers qu’ont généré les ventes d’armes russes à Luanda en 1993 et 1994 seront étalés aux yeux de tous. Retracés sur de grandes feuilles, les virements bancaires internationaux et les retraits en cash révèlent l’étendue des paiements faits aux VIP comme aux petites mains, amis et obligés du duo Falcone/Gaydamak : aux Mitterrand fils, Sulitzer, Attali, Pasqua, Marchiani, Tassez (un lobbyiste proche des patrons du CAC 40), destinataires de beaux millions, comme aux jeunes hôtesses d’accueil de la société de Pierre Falcone, qui se sont contentés de quelques milliers d’euros, voire d’une bagnole.
Mais les virements au sénateur John McCain, l’actuel candidat républicain à l’élection présidentielle américaine, ne seront pas détaillés par le tribunal. Révélateur, ce financement politique effectué par le couple Falcone au début des années 2000 au profit de celui qui n’est alors qu’un sénateur inconnu met en évidence la capacité (voire le besoin ?) de l’homme d’affaires français et de sa femme Sonia de se créer un réseau d’obligés à tous les niveaux. Notamment en se faisant bien voir des politiques. Les juges de l’Angolagate y reviendront à l’heure de se pencher sur le cas Pasqua.
Installés en Arizona dans une immense propriété de style toscan au cœur d’une vallée de happy few, à Scottsdale, payée 10 millions d’euros, les Falcone ont régulièrement organisé des soirées de collecte de fonds pour les Républicains. A chaque fois, des dons ont été déclarés dans les comptes de campagne. Oh, pas des sommes énormes. La loi permet à ce moment là de financer un membre du Sénat – ce fut le cas de Scott Bundgaard, membre du Sénat de l’Arizona – à hauteur de… 256 dollars par personne physique. John McCain, membre du Sénat de Washington, a quant à lui touché quelque 6 000 dollars. Sonia Falcone avait effectué un don de 1000 dollars à George W. Bush. Apprenant l’incarcération de l’homme d’affaires-marchand, l’équipe de W. a retourné le chèque à sa bienfaitrice.
Ancienne Miss Bolivie, Sonia Falcone court de vente de charité en vente de charité et aime se montrer aux meetings républicains. En septembre 2001, alors que son mari dort en prison en France, elle assiste à l’annonce de candidature de Matt Salmon pour le poste de gouverneur de l’Arizona. Un jour elle adresse 250 dollars à la candidate républicaine Susan Collins. Et via sa société, elle verse 2000 dollars à l’escarcelle des Démocrates en mai 1999. De l’argent provenant en partie des juteuses affaires de son mari. L’ordonnance de renvoi de l’affaire, signée du juge Courroye, retrace le parcours des comptes de Falcone à ceux de sa tendre épouse et de sa société : quelque 5,6 millions de dollars.
Mieux vaut ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, au cas où. Mais ces gentilles attentions n’ont pas empêché la miss de subir quelques ennuis judiciaires aux Etats-Unis. L’immigration américaine soupçonne en effet, comme Bakchich l’a raconté, Sonia Falcone d’avoir menti pour être naturalisée et de s’être mariée pour obtenir une carte de résidente américaine. Résultat, une bonne trentaine d’agents a perquisitionné un beau matin de février 2006 la maison de Scottsdale. Après avoir subi ces pratiques fort peu hospitalières de l’administration américaine, la petite famille a déménagé en Espagne.
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