La chose nous est née au printemps, période où l’on se découvre. Il y avait urgence à interdire en France le port de la Burka…
On aurait pu imaginer que ce dénuement ait été réclamé par un énergumène du genre Philippe de Villiers, notre Charles Martel, notre vaccin sacré qui nous protège du virus islamique. Pas du tout. Même l’agité du bocage n’avait pas pensé à abaisser les voiles sauf celui de l’Immaculée Conception.
L’idée est venue d’un dénommé André Gérin, député PCF (il en reste) de Vénissieux, dans le Rhône. Qui propose un projet de loi : « Nous sommes aujourd’hui confrontés, dans les quartiers de nos villes, au port par certaines femmes musulmanes de la burka, voilant et enfermant intégralement le corps et la tête dans de véritables prisons ambulantes ou du niqab qui ne laisse apparaître que les yeux ».
Dixit Gérin, membre d’un PCF qui nous rappelle ici le temps heureux où des cocos envoyaient un bulldozer pour détruire un foyer d’immigrés. Le projet n’a pas eu de mal à convaincre deux autres élus du parti communiste et sept du PS ; mais surtout un paquet de mandatés de droite, 48. L’objectif, on le répète, est de libérer la femme. C’est bien.
Le premier accroc vient de ces salauds de flics qui, tout comptes faits, ne repèrent en France qu’environ 350 femmes ainsi camouflées. Pis, quarante pour cent d’entre elles sont de bonnes françaises qui portent le grand voile « par conviction personnelle, sans pression extérieure ». Ah, si nos poulets se mettent à jouer dans le camp de l’anti France… Donc, l’affaire de la burka fait du surplace.
Le second accroc provient d’autres salopards, inattendus, les laïcs de la Libre Pensée ! Les libres penseurs sont contre cette offensive anti-burka. C’est à y perdre son latin de messe. Heureusement, Christian Eyschen, le Secrétaire général de cette association de mal pensants, vient dire à Bakchich ce qu’entendent faire valoir, dans ce dossier qui occupe tant les médias, les gardiens du temple laïque : « Plus on donne de pouvoir au pouvoir, plus les libertés disparaissent. Nous avons déjà 49 fichiers de police différents, et on a interdit le port de la cagoule… Peut être que ça suffit comme ça ! »
Cet Eyschen ne serait-il pas un peu anar ? Oui, et il se dévoile : « Quand j’étais jeune, nous nous habillions n’importe comment, avec des tresses interminables, des ponchos, ou des cheveux en pétard. Personne n’a fait une loi pour nous faire porter la cravate. Sur la non existence du voile dans l’espace public, comme les lieux d’enseignement, les hôpitaux, les administrations, nous sommes bien sûr sans partage : pas de voile. Hors de cela, chacun fait ce qu’il veut et pas de place pour un jugement de valeur étatique. Mieux, si l’interdiction de la burka est votée, nous exigerons que le texte s’applique aux curés et aux bonnes sœurs ! »
Ca, au moins, ce serait rigolo. Mais en fait, pourquoi l’excellent député Gérin se démène-t-il tant autour de ce problème majeur, et a-t-il prévu de faire déshabiller les princesses saoudiennes quant elles viennent acheter des Rafales sur les Champs-Elysées ? C’est qu’il a envie d’être réélu et que, sur le terrain, le Front National risque de le grignoter en agitant des questions comme celle qui l’occupe tant. Et des humoristes prétendent que, maintenant dans la ville de Vénissieux, Gérin envisage d’interdire la rue à tout cycliste roulant avec une roue voilée. Inch Allah.
Lire ou relire sur Bakchich :
Jacques-Marie,
Excellent article plein d’humour et de bonne humeur comme les aiment les libres penseurs de toutes opinions politiques (dont je suis).
Une seule remarque, mais très amicale : pourquoi ne pas rattacher ce projet de loi liberticide qui verrait l’Etat dicter aux citoyens dans leurs vie privée les vêtements qu’ils devraient porter avec toutes les normes de plus en plus contraignantes sur tous les sujets (et au profit des grosses sociétés privées et/ou privatisées) que l’Etat met en place de tous côtés ?
Je pense aux normes qui se mettent en place pour, selon les cas, l’environnement (taxe carbone sur les citoyens pauvres en lieu et place de la Taxe Professionnelle sur les sociétés), les fichiers les plus divers, le passeport biométrique, la sécurité (interdiction de la cagoule, même par grand froid ?), les produits de consommation basique, le logement, la loi HADOPI, etc….
La logique de ces normes qui se multiplient de tous côtés et envahissent de manière "doucereuse" la vie de la cité au sens social du mot, est en effet double : garantir la mainmise de l’Etat sur la société pire que dans les ex-pays de l’Est d’un côté et de l’autre soumettre de force les citoyens aux seuls besoins d’un système économique en faillite, par le biais de contraintes administratives strictes.
Ce projet de loi liberticide -sur la burqa- est en effet, à mon sens, à relier à beaucoup d’autres qui visent à imposer un véritable et intolérable diktat sur la vie privée des citoyens et à affermir l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du corps social au compte final des très grosses entreprises privées.
Il est par contre comique - et aussi instructif-que ne soient pas visés par le texte annoncé les habits des curés, nonnes, rabbins, pasteurs et moines bouddhistes….
Une réflexion sur ces "normes" qui normalisent la société, comme disaient les Tchèques et les Slovaques après août 1968 semblerait opportune car le mal gagne comme un cancer qui étouffe démocratie et libertés, publiques et privées.
Bien cordialement,
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