Le feuilleton du débat sur l’interdiction de la burqa et du niqab a pris fin avec le vote du Parlement ce 14 septembre. L’épilogue se jouera au Conseil constitutionnel.
Le Parlement français a adopté mardi le projet de loi interdisant le port du voile intégral dans les lieux publics. Une première en Europe.
Par 246 voix contre 1, le Sénat a approuvé le texte voté par l’Assemblée nationale le 13 juillet dernier. Lequel proscrit "la dissimulation du visage dans l’espace public", incluant commerces, transports, parcs, cafés, mairies, écoles et hôpitaux. Il interdit donc le port du niqab -qui ne laisse voir que les yeux- et de la burqa, qui masque l’ensemble du corps. Tout(e) contrevenant(e) pourra se voir infliger une amende de 150 euros accompagnée ou remplacée par un stage de citoyenneté.
La loi prévoit aussi un délit de "dissimulation forcée" - qui vise toute personne obligeant une femme à porter le voile intégral - sera quant à lui puni d’un an de prison et de 30.000 euros d’amende.
Sans attendre, Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, et Gérard Larcher, à la tête du Sénat, ont indiqué dans un communiqué mardi soir avoir saisi le Conseil constitutionnel. But de cette saisine, "que la conformité [du texte] à la Constitution ne puisse être affectée d’aucune incertitude".
Les mises en garde du Conseil d’Etat sur la faisabilité juridique d’une interdiction générale font craindre au gouvernement que le Conseil Constitutionnel ne retoque le projet de loi. Anne Levade, professeur de droit public à Paris Est Creteil, revient pour Bakchich sur ces arguties juridiques.
Bakchich : Peut-on interdire le port de la burqa ?
- Anne Levade : Oui, une telle interdiction est possible, il en existe déjà dans notre droit, telle celle de la polygamie ou des conventions de mères porteuses. Elle ne peut viser le seul port du voile intégral, au risque d’être discriminatoire, raison pour laquelle le projet de loi prévoit d’interdire « toute tenue destinée à dissimuler le visage » . Sont ainsi également visés les cagoules, les masques de ski….etc.
Bakchich : Quel principe de droit peut être invoqué pour justifier cette interdiction ?
A.L : La laïcité qui impose à l’Etat et à ses agents le respect de la liberté de conscience de l’individu ne peut constituer un fondement. Seul l’ordre public peut être mis en avant, mais pas au sens classique, car le port du voile ne met pas en cause qu’occasionnellement les composantes traditionnelles de cette notion juridique que sont la tranquillité et la sécurité des personnes.
Seule une conception non matérielle de l’ordre public peut être invoquée, comme lorsque le Conseil d’Etat a interdit « le lancer de nain ». Il s’agit de sauvegarder une certaine conception de la vie en société, autrement dit un ordre public démocratique et républicain
Si la loi reçoit l’aval du Conseil Constitutionnel, qui se prononcera d’ici un mois, les nouvelles dispositions entreront en vigueur dans six mois, au printemps 2011.
Au fait, quel est le profil de la porteuse de niqab ? Maryam Borghée prépare depuis quelques mois un mémoire sur le voile intégral en France sous la direction du sociologue Michel Wieviorka. Au cours d’une table ronde à laquelle Bakchich a assisté, elle a livré quelques-uns des premiers constats établis à partir des entretiens réalisés avec un panel représentatif des Françaises qui portent le voile intégral sur l’ensemble du territoire. De quoi dresser un premier profiling ici résumé de ces « fantômes » et autre burniqab girls qui hantent tant les Sarko boys…
Celle-ci a généralement entre 15 et 35 ans – mais surtout entre 18 et 25 ans. La plus jeune est une Française convertie de 14 ans et la plus vieille compte 50 ans printemps qu’Allah a fait. Elle est issue soit de la bourgeoisie soit de milieu populaire. Elle est le plus souvent ré-islamisée, « born again » comme disent les britanniques, c’est-à-dire d’origine familiale musulmane : c’est d’abord la beurqa girl, d’origine nord africaine, suivie de la française d’origine de pays d’Afrique musulmans, puis la Comoréenne et l’Antillaise. Enfin, la « pure » convertie.
Elle perçoit généralement sa décision comme « un acte religieux, et s’appuie sur les textes d’inspiration salafite », explique la chercheuse, quand elle ne le vit pas comme « une sorte d’expérience initiatique, un rituel de passage pour changer », visant une « renaissance symbolique ».
En choisissant le voile intégral, elle s’inscrit dans une logique d’affirmation qui « passe par un processus de distanciation » d’avec non seulement les non-musulman (e)s, surtout les mécréant(e)s et autre produit franchouilles athé(e), ou encore les musulman(e)s non pratiquant(e)s, mais aussi avec sa « sœur » voilée…du seul hijab ! Normal, la burniqab girl se considère « meilleure musulmane », et la longueur de son tissu est proportionnel à la profondeur de son engagement. Il constitue une « valeur ajoutée par rapport au hijab » dans le « désir de dépassement » de la femme qui le porte.
Transmis aux pandores qui auront pour mission de faire respecter la nouvelle loi.
Si le débat sur le port du voile intégral a souvent divisé, il sait aussi réconcilier. Et réunir dans une même adversité pour ou contre, les courants les plus opposés, au point de créer des alliances bien inattendues.
Défenseurs des droits de l’homme, main dans la main avec les islamistes, pour le défendre au nom de liberté religieuse, féministes militantes aux côtés des catholiques pratiquants pour le rejeter au nom de l’asservissement de la femme, c’est l’effet magique de ce bout de tissu : celui de faire tomber des clivages politiques et idéologiques considérés comme définitivement infaillibles.
Et pas seulement en terres européennes de tradition judéo-chrétienne.
En Algérie par exemple, le très laïque et progressiste Front des Forces Socialistes (FFS), dirigé par le kabyle Hocine Aït Ahmed s’est ainsi rangé dans le camp des islamistes très conservateurs d’El-Islah et de l’Association des Oulémas pour fustiger l’obligation de retirer le voile pour les femmes – mais aussi de se raser la barbe pour les hommes – sur la photographie imposée par les nouveaux passeports biométriques récemment mis en service par le gouvernement. Et la liberté des individus, alors ?
En Egypte, les organisations de défense des droits de l’homme et les associations militantes d’écrivains laïques ont bruyamment protesté contre les restrictions gouvernementales imposées au port du niqab ou de la burqa dans certains espaces publics, toujours au nom de cette sacro-sainte liberté et contre la discrimination faite aux femmes des quartiers populaires, où le voile intégral connaît une montée en puissance plus importante encore qu’au sein de la bourgeoisie.
Et qui ont-ils trouvé comme meilleurs alliés ? Les partis islamistes, bien sûr, Frères musulmans associés aux durs de la Gammaa Al-Islamiya et à un nouveau front comprenant un courant frondeur de Docteurs en loi islamique issus de l’université d’Al-Azhar du Caire. Et tous de conspuer d’une même voix la fatwa du Grand Imam de la Mosquée du même nom, le Professeur Mohamed Sayed Tantawi, autorité religieuse de fait dans un islam sans clergé, pour avoir qualifié le voile intégral de « tradition contraire à l’esprit de l’islam ». Un vendu au régime, qui brade les principes religieux et la démocratie sur l’autel du pouvoir politique ! se sont-ils offusqués de concert. Non sans arrière pensées. Ici comme ailleurs, les consensus contre-nature se forment sous couvert d’arguments à variables géopolitiquement correctes, que chaque camp s’attribue et s’arrache.
Lire ou relire sur Bakchich.info :
"… mais aussi avec sa « sœur » voilée…du seul hijab ! Normal, la burniqab girl se considère « meilleure musulmane », et la longueur de son tissu est proportionnel à la profondeur de son engagement. Il constitue une « valeur ajoutée par rapport au hijab » dans le « désir de dépassement » de la femme qui le porte."
Le Prophète (Sallâhou Alayhi Wa Sallam) a dit : ’ Celui qui aura un atome d’orgueil dans son coeur n’entrera pas au Paradis. ’
Je les vois mal parties dans l’au-delà vos copines ….
Normal, la burniqab girl se considère « meilleure musulmane », et la longueur de son tissu est proportionnel à la profondeur de son engagement.
Et ben ! Si les femmes se mettent elles aussi à comparer leurs engins pour savoir qui a la plus grosse, on a pas fini de se taper sur la gueule…
A noter qu’on mesure ici la "profondeur" de l’engagement et non sa longueur ou sa vigueur.
Ok je sors…