Les gendarmes ont déniché 450 000 fichiers porno dans le réseau informatique d’Air France. Les révélations de « Bakchich ».
En septembre dernier, un communiqué du champion du transport aérien proclamait fièrement : « Air France, transporteur de Sa Sainteté le Pape Benoît XVI ». Sa Sainteté ignorait alors certainement à quel point divers services, et celui de la sécurité en particulier, étaient portés sur une gaudriole très particulière…
Déjà évoquée par Bakchich, l’affaire des fichiers pédo-pornographiques prend de l’ampleur. Contredisant les démentis filandreux d’Air France arguant qu’il s’agit d’un « cas isolé », l’instruction judiciaire en cours, comme divers témoignages, indiquent que la fièvre du porno sévit jusqu’au cœur des services en charge de la sûreté. Inquiétant. Pour l’heure, la direction a pris le parti d’étouffer l’affaire à coups de mutations et mises en arrêt de maladie.
Bakchich a reconstitué les faits. En janvier 2007, une association signale à la gendarmerie la découverte de fichiers pédophiles en circulation via une société française. 13 images pédo-pornographiques dont il s’avèrera que ce fichier a été téléchargé 21 255 fois dans le monde et par 344 adresses IP en France. L’une de ces adresses correspond au siège d’Air France à Roissy. L’enquête menée par la gendarmerie du transport aérien (GTA) aboutit à l’arrestation sur son lieu de travail (au pôle logistique immobilière) d’un premier employé. Ce dernier reconnaît les faits. Une perquisition effectuée à son domicile permet « la saisie de 100 000 images de mineurs pour une capacité de 90 Go (gigaoctets) ».
Minimisant l’infection massive de son informatique par des fichiers pédophiles et pornographiques, le service de presse d’air France s’est manifesté auprès de Bakchich et des quelques confrères, lefigaro.fr, LCI, ayant évoqué ce dossier. Un argumentaire qui s’appuie sur deux points : a) Une (et une seule) brebis galeuse a bien été licenciée après sa mise en examen pour recel d’images pédophiles. C’est un cas isolé, immédiatement sanctionné.
b) La sécurité informatique d’Air France n’est pas en cause, la compagnie étant dotée « d’un service de sécurité informatique de filtrage parmi les plus performants et qui empêche l’accès à des sites illicites sur internet ».
Sur les autres points révélés par Bakchich et notamment sur le fait que l’un des employés a été arrêté sur son lieu de travail porteur d’une arme de poing, AF garde le silence. Ni démenti, ni confirmation. Autant d’affirmations ou de non dits contredits par les éléments du dossier d’instruction ainsi que par des sources internes à l’entreprise.
Lors de son audition, l’intéressé explique « que depuis 1998, il naviguait au bureau sur Internet à partir de son ordinateur ». Par ailleurs, lors de son interpellation, il est trouvé porteur d’un pistolet Beretta N° A151199, un chargeur engagé, ainsi que d’une boîte de munitions de 50 cartouches. Sans permis. Interrogé à ce propos, il déclare aux gendarmes avoir acheté cette arme « à un vigile d’air France ». A la question de savoir pourquoi il vient avec sur son lieu de travail, il répond : « parce que je la trimbale toujours avec moi. Elle est toujours dans mon sac ».
L’enquête établit que pour ses consultations Internet, cet employé utilise le mot de passe d’un de ses collègues ; à la retraite depuis des années… Elle établit surtout qu’il échange au sein de l’entreprise avec de très nombreux collègues de travail ses sulfureux fichiers. Certains sont à caractère pédophile d’autre seulement pornographique. Certains fichiers semblent litigieux, car, comme l’explique en défense l’un de ses correspondants, « il n’est pas toujours facile » de distinguer une mineure d’une majeure.
Le 16 janvier, un second employé du service immobilier, supérieur hiérarchique du précédent, est mis en cause. Il reconnaît avoir échangé via l’intranet d’Air France des fichiers pédophiles. Et deuxième mise en examen donc… Remontant les traces informatiques, l’enquête des gendarmes quitte alors le service immobilier pour celui de la sûreté de la compagnie aérienne.
15 février 2008, un des responsables du service sûreté admet avoir reçu des « photos érotiques » et des fichiers qui lui étaient adressés par Lotus Note – l’intranet d’Air France. Mais réfute toute image « pédo-pornographique ». A la question posée par les gendarmes « receviez-vous ou adressiez-vous régulièrement ce genre de photographies entre vous ? » Ce responsable de la sécurité réplique « Ce n’était pas régulier. Nous avons d’autres choses à faire . On y passe pas notre temps. » Il ne nie pas… Et de conclure : « les images que j’ai pu voir ne portent pas à confusion par contre il est vrai qu’il est difficile de faire une différence entre une jeune adulte et une fille de 17 ans ». Question : « Cela fait-il longtemps que ce genre d’images sont diffusées ? » Réponse : « C’est en arrivant dans le service sûreté d’Air France que j’ai vu ces images. Dans mes précédentes activités, c’était beaucoup moins courant ».
Le 18 février 2008, c’est un responsable « opérationnel » de la sûreté d’Air France qui est mis à son tour sur le grill. Entendu comme témoin, il reconnaît recevoir - via l’un des mis en examen -, toujours au travers de l’intranet de l’entreprise, « des images plus ou moins pornographique, érotiques ». Depuis son arrivée dans le service en 2004, précise-t-il. Interrogé sur le fait de savoir si les images et vidéos qui lui parvenaient étaient bien transmises par l’intranet d’Air France, il répond : « Oui, exclusivement. M. X n’était pas seul à m’en envoyer. Cela arrivait de partout. On peut même dire que ce phénomène s’est institutionnalisé. (…) je faisais suivre ce que j’avais reçu dans la mesure où je trouvais cela « rigolo » et non préjudiciable ». Dans la foulée, l’un de ses subordonnés est placé sous statut de témoin assisté.
Le 26 février 2008, c’est encore un cadre du service sûreté d’air France qui est entendu comme témoin et toujours pour avoir reçu des fichiers pornographiques de son collègue de l’immobilier. Il déclare : « j’en recevais tous les jours, via le système intranet de notre société. Il m’adressait 2 à 3 mails par jour (…) des fichiers humoristiques ou pornographiques. (…) Parfois, il m’est arrivé que le système de protection informatique d’Air France me bloquait mes demandes d’accès » à certains sites.
Voilà pour le caractère « isolé » défendu par Air France (lire encadré) comme « du service de sécurité informatique de filtrage parmi les plus performants » décrit par la direction. Une source interne rapporte à Bakchich : « ça a défilé sec devant les gendarmes. Air France leur a même prêté un bureau au siège pour pouvoir nous recevoir. Je vous dis pas l’ambiance. Quant à la sécurité informatique, laissez-moi rigoler ! Tout le monde était au courant à la sûreté ».
L’expert informatique désigné par le juge Marc Sommerer, en charge du dossier, ne paraît pas non plus impressionné par les performances du système de sécurité d’Air France. Dans son rapport dont Bakchich a pu prendre connaissance, il constate tout d’abord la production saisie par les gendarmes aura « démontré la grande quantité d’images à caractère pédo-pornographique dépassant les 450 000 images dont plus de 2 000 fichiers vidéo à caractère pédophile. » Des images « le plus souvent stockées sur les serveurs de la Direction informatique ».
Et de poursuivre : « il convient dès lors de s’interroger sur l’efficacité des règles des fire-wall(s) protégeant les réseaux particulièrement permissifs, dont les noms de fichiers et sites, plus qu’évocateurs (les mots « young » et « teens » étaient autorisés) ». Une hypothèse serait que personne ne parle anglais…
Quant à la question de savoir comment 450 000 fichiers pornos ont pu atterrir sur les serveurs d’une des premières compagnies aériennes du monde, notre expert ne penche pas pour l’acte d’un « isolé » qui aurait sournoisement perverti l’informatique high-tech au moyen d’une modeste « clé USB » comme certains ont tenté de le faire croire. Il estime en effet que « les éléments IP fournis en procédure tendraient à prouver de façon indéniable que le réseau fut bien utilisé à ces fins, au moins pour une partie des images découvertes ».
Lire ou relire dans Bakchich :
<< il convient dès lors de s’interroger sur l’efficacité des règles des fire-wall(s) protégeant les réseaux particulièrement permissifs, dont les noms de fichiers et sites, plus qu’évocateurs (les mots « young » et « teens » étaient autorisés)>>
Ni le soit disant expert, ni l’auteur de cet article ne doivent parler anglais pour écrire et recopier une réflexion aussi idiote.
Même si l’informatique n’est pas votre truc, à votre avis combien de sites parfaitement légaux contiennent les mots "jeune" et "adolescent" ?