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Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain

Afrique / vendredi 29 février 2008 par Babacar Wouetu
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Le bon président Nicolas Sarkozy rend visite à une nation en crise. Petit tour d’horizon du pays sorti des limbes de l’apartheid.

La "nation arc-en-ciel" de Nelson Mandela et Desmond Tutu qui nous avait illuminés en 1994 n’est plus. Si cela n’est pas évident vu de Paris, les signes du déclin le sont pour les millions de Sud-Africains qui vivent au quotidien la criminalité, une corruption endémique, un système de santé défectueux et des coupures d’électricité de plus en plus fréquentes. Le temps de l’unité et de l’espoir qui avait marqué les années 90 est un souvenir qui a vieilli avec les deux derniers justes, Desmond Tutu et Nelson Mandela.

L’usure du pouvoir se fait sentir pour l’ANC. A l’image du parti de la cause anti-raciste a succédé l’image d’un club de profiteurs politiques, reconvertis dans le conflit d’intérêts permanent. Après les années de vache maigre qui conduisirent Nelson Mandela sur le chemin de Tripoli (1995), l’ANC a affiché l’année passée un patrimoine de 1,7 milliards de rands (147 millions d’euros). Un bilan bénéficiaire pour un parti politique étant un phénomène assez rare, cela a déclenché une enquête interne dont plusieurs dignitaires du régime Mbeki devraient être victimes. Censé bénéficier aux "populations historiquement défavorisées", le "black economic empowerment" a été transformé en jeu de casino pour le clan de Thabo Mbeki à tel point que l’événement sociologique majeur de ces 15 ans d’ANC est l’émergence d’un petit groupe de grands capitalistes africains, à la fois détestés et enviés par les townships.

Affaires judiciaires et coups bas

En même temps que le casino du pouvoir faisait son œuvre parmi les syndicalistes et communistes de l’ANC, la grande politique cédait le pas à la petite, voire la toute petite. Thabo Mbeki et son vice-président Jacob Zuma se battaient à coup de dossiers judiciaires interposés et de coups bas qui ont, pour le moment, tourné à l’avantage du second et dont Bakchich s’est fait l’écho.

Mais le vrai problème n’est pas les turpitudes de l’ANC et le passage de relais entre Mbeki, l’Africain britannique, et Jacob Zuma, le populiste Zoulou. Le vrai problème, c’est l’état de la nation dont le déclin devient maintenant visible, voire trop visible, à travers des signes qui ne trompent pas : le retour de la tuberculose résistante et l’incapacité du système de santé public à faire face aux pandémies, un taux de SIDA parmi les plus élevés au monde, une délinquance qui malgré les milliards investis dans la police figure toujours parmi les plus élevés au monde et une électricité qui se raréfie. L’absence d’investissements dans l’énergie pendant des années ne pénalise plus seulement les ménages des grandes villes qui se sont habitués à avoir des coupures régulières tout au long de la journée, mais elle pénalise maintenant l’industrie en forçant certaines mines à cesser leurs activités. Dans un pays dont la richesse a été construite grâce à l’industrie minière, l’arrêt temporaire de mines d’or faute d’électricité est un symbole fort.

Après 15 ans d’ANC, le rideau est maintenant levé sur les luttes intestines du parti et le déclin devient de plus en plus visible, même pour les intellectuels africains qui n’y voyaient que la mauvaise humeur des Blancs. Très récemment, le frère du président, Moeletsi Mbeki, a lui-même tiré la sonnette d’alarme sur le déclin sud-africain. La "nation arc-en-ciel" perd de ses couleurs et risque de sombrer dans le crépuscule quand Nelson Mandela et Desmond Tutu, les deux consciences de la nation, auront soufflé leur dernière bougie.


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7 MESSAGES

Forum

  • Un peu de perspective….
    le mardi 4 mars 2008 à 03:27

    Je voudrais ajouter quelques commentaires sur la plupart des articles sur l’Afrique du Sud. Reduire la composante sociale de la RSA aux riches blancs et aux pauvres noirs est assez reducteur. L’Afrique du Sud c’est aussi (et de plus en plus) une immigration de diverses origines. Mis a part les presences historiques (Boers et Anglais), on y trouve en masse du Portugais, du Grecque (depuis longtemps), du Malaisien, du Chinois (de plus en plus), de l’Indien-Pakisatanais et tout un tas d’autres migrants qui vivent joyeusement en communaute. Et il me semble que ces derniers ne s’en tirent pas trop mal au niveau economique.

    Pour ma part, j’ai travaille en 97-98 au deploiement de reseaux telephoniques en RSA, dont une grande partie de nos systemes etaient installes dans tous les townships de Joburg (social). A l’epoque, ca n’etait deja pas fameux, et pour certains (ex : Thembalihle,etc…) je ne vois pas comment ca pouvait etre pire. Quand on vit dans une cabane faite de palettes et de portes de voiture, et que la temperature descend en dessous de 10 degres l’hiver, c’est franchement pas la joie. Cote sous-traitant, une tripotee de sud-af blancs, et pour vous dire pas franchement des lumieres…. donc l’education pour les blancs, que dalle pour les noirs n’est pas 100% vrai. Il y a comme partout pleins de type qui reste sur le carreau, en marge du systeme educationel (Blanc, Noirs et autres couleurs inclus). Mais il est vrai que depuis la mise en place de l’"Affirmative Action", c’est de plus en plus dur pour les blancs non diplomes (voire non eduque), les "privilegies" de l’ancien regime….

  • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
    le vendredi 29 février 2008 à 09:55, sylvain a dit :
    Article intéressant, mais je pense qu’il ne faudrait pas oublier un "détail" : d’où vient l’Afrique du Sud. Il faut garder à l’esprit qu’à la fin des années 80, le pays était toujours sous administration de la politique d’Apartheid. Ainsi, le pays était en quasi guerre civile. Donc plusieurs générations de sud africains noirs comme blancs (et métis) qui avaient été élevés dans la lutte et la violence sont maintenant comme des soldats démobilisés. S’ajoutant à cela une persistance de comportements à risques ce qui engendre, entre autres, violences et sida. En outre, concernant les statistiques sur la pauvreté et la tuberculose, étaient-elles fiables auparavant ? Ne découvre-ton pas depuis quelques années les réelles conditions de vies des townships ? Enfin, je voudrais ajouter, que l’Afrique du Sud est aussi victime des turpitudes de la Démocratie. J’avais entendu quelque part que Nelson Mandela ne voulait pas de Thabo Mbeki comme successeur, mais il s’était finalement incliné devant le choix démocratique. Mandela aurait t’il dû s’accrocher au pouvoir comme certains ? Le pire c’est qu’il aurait pu avoir l’autorité morale pour le faire. Donc, il est vrai que l’Afrique du Sud traverse des difficultés, que certains cadres de l’ANC ne sont pas à la hauteur, mais c’était un pays en guerre dans un continent en crise permanente.
    • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
      le dimanche 2 mars 2008 à 10:47, Clémence a dit :
      Oui c’est vrai, il y avait l’apartheid. Les Sud-Africains (les Blancs, pourquoi précisé-je ?) vivaient dans une sorte de rêve, des paysages à couper le souffle, pas de townships, du boulot pour tous, pas de sida, des routes entretenues sans embouteillages, une éducation privilégiée (enfin, évidemment, une éducation qui omettait pas mal de trucs)… Et j’en passe. J’aimerai juste préciser, pour rire jaune, que l’apartheid avait pour fondement "la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes" (non c’est pas une blague). L’ANC et tous les mouvements qui sont issus de la lutte contre l’apartheid avaient une raison d’être à l’époque. Maintenant qu’il est au pouvoir, l’ANC s’en fout plein les fouilles. Vous me direz, les gouvernements d’apartheid s’en foutaient aussi plein les fouilles. Et je répondrai, faut-il prendre exemple sur eux ??? L’Histoire justifie-t-elle le comportement douteux des dirigeants d’aujourd’hui ? (là je fais référence à Zuma, ou aux parlementaires, qui ont majoritairement un casier judiciaire ou ont été soupçonnés de quelconque trafic ! Et ça ne date pas de l’apartheid, je précise car Mandela a fait 25 ans de prison mais ça n’en fait pas un criminel, hé) Les dirigeants n’ont pas de "frères de couleur"… ils ont des actions dans les multinationales, et le frère noir, il peut crever. Le blanc aussi d’ailleurs. Sauf que le blanc il peut émigrer en Australie. (Entre autres) Le BEE (Black Economic Empowerment), une idée super. Une IDEE super. En pratique c’est super… foireux. Pourquoi ? Parce que maintenant, dans les entreprises, il y a un quota. Tant de blancs, tant de noirs. Résultat, dans les petites annonces, on lit "Noir seulement" (discrimination positive). Avant de continuer, il faut que je précise que l’éducation là-bas atteint des abysses. Le frère noir, on le laisse dans son ignorance. (Le frère blanc, bah, de toute façon il a(encore)assez d’argent pour se payer une école privée.) Donc, disais-je, on se retrouve avec des incompétents à tous les postes (et ça n’est pas leur faute). J’en sais quelque chose, j’y vis. Alors l’économie, beh, elle en prend un coup. D’où vient la persistance des comportements à risque ? De la non-éducation des masses. Entre une ministre de la santé qui dit que manger des betteraves c’est bon pour le sida, et un futur président qui prend une douche pour éviter une contamination (d’une femme qu’il a violée, au passage), on est mal barrés. L’électricité, c’est une blague. Au moment où j’écris il est possible qu’une coupure (durée indéterminée) survienne. Ils avaient amplement le temps de trouver des solutions pour palier à la demande croissante en énergie. Juste ils avaient plus important à faire. Et on se demande quoi. Car entre l’éducation, l’énergie, l’emploi, les aides financières,… on a que choisir comme cheval de bataille. Non, pas assez important. Ces messieurs préfèrent s’offrir deux sous-marins nucléaires !!!??? Que 14 ans après l’apartheid, il y ait toujours des pauvres et des dysfonctionnements, c’est normal. Que les inégalités se creusent et que le pays se casse la figure, ça n’est pas acceptable. L’économie de l’Afrique du Sud soutient les autres pays, que va devenir l’Afrique sans elle ? L’Afrique du Sud est un pays magnifique, à tous points de vue. C’est vraiment dommage ce qui s’y passe en ce moment. Après Mandela et l’espoir, la débandade. Je croise les doigts pour ça ne devienne pas un nouveau Zimbabwe. Voilà, je déverse ma diarrhée verbale librement et je m’en excuse, mais c’est trop facile d’invoquer l’apartheid comme source de tous les maux.
      • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
        le lundi 3 mars 2008 à 11:40, sylvain a dit :

        Bonjour, Clémence.

        Il a certes été précisé que l’apartheid avait joué un rôle dans cette situation (ce qui est une évidence) et les responsabilités des personnes au pouvoir (l’ANC) n’ont pas été minimisées. Mais il n’a jamais été dit que l’apartheid était la source de tous les mauxs.Il ne faut quand même pas déformer les propos. Cela serait bien que lorsque l’on parle d’un pays africain, on fasse preuve de recul et de modération, les choses sont plus complexes qu’elles ne le paraissent, même en Afrique ! Un peu de rigueur intellectuelle… Merci.

        • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
          le mardi 4 mars 2008 à 07:52, Clémence a dit :
          Il faudrait que vous fassiez preuve d’un peu plus de condescendance encore, Sylvain. Si votre commentaire ne disait pas que l’Histoire du pays justifiait tout ce qui s’y passe maintenant, je m’excuse d’avoir compris exactement cela. Si vous croyez que je (et l’auteur de l’article en question) suis (sommes) assez stupide(s) pour ne pas voir la partie submergée de l’iceberg de l’Histoire contemporaine c’est bien dommage. Lorsqu’on parle d’un pays en général, il faudrait faire preuve d’un peu plus d’engagement et de passion. La rhétorique, la modération, la rigueur et le français fleuri des dissertations, les pauvres, ils s’en foutent. D’ailleurs ils se foutent bien de cet échange. Désolée ça me démangeait il fallait que j’aille gratter là.
          • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
            le mardi 4 mars 2008 à 18:37, Clémence a dit :
            Pardon je n’aurais pas dû. Je suis d’ailleurs étonnée que le message précédent ait été accepté par le modérateur.
            • Le crépuscule de l’arc-en-ciel sud africain
              le mercredi 5 mars 2008 à 12:53
              Clémence, désolé si mon poste semblait condescendant.Cela n’était pas le but. Cependant, je pense que l’on peut tout à fait parler d’un pays sans tomber dans l’excès comme la passion. Il faut garder de la distance (ce que j’essaie de faire et j’y arrive pas toujours.) La rigueur, la modération et le français fleuri des dissertations,tout le monde peut y attacher de l’importance, même les pauvres, d’ailleurs, j’en suis un ! Cordialement et sans rancune.
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