Six associations ont été habilitées par Hortefeux en 2008 pour venir en aide aux étrangers dans les centres de rétentions. L’une d’entre elles, le « Collectif respect », intrigue et génère des interrogations.
La résolution gouvernementale d’habiliter le « collectif respect », à gérer l’aide aux étrangers détenus en CRA (Centre de Rétention Administratif) pour l’Outre- Mer, est pour le moins surprenante. Le collectif n’avait absolument pas cette vocation quand il s’est créé. Ses liens avec l’UMP semblent avoir fait pencher la balance dans la prise de décision finale du gouvernement.
Contre cette décision, un référé précontractuel a été déposé le 15 avril, au tribunal administratif de Paris par la Cimade pour contester en justice l’attribution aux six associations la réalisation de cette mission.
Créé au lendemain du match France-Algérie en 2003 le « collectif respect » voulait relooker une Marianne galvaudée. C’était en réaction aux « sifflets contre la Marseillaise au Stade de France », explique ainsi Frédéric Bard, ancien président du collectif. Il poursuit : « Nous entendions remettre notre République sur ses pieds, reprendre ces trophées abandonnées à l’extrême droite : la Patrie, l’hymne national, le drapeau tricolore ».
Frédéric Bard courtise et se lie à l’UMP peu dès la création du parti en 2002. En attestent ses multiples fonctions au sein du parti majoritaire.
Délégué départemental-UMP de la Culture en 2003, militant UMP dans le 17ème, chargé de mission pour le compte du Ministère de l’immigration et de l’Identité Nationale en 2008. Missi dominici de Chirac avant de passer sous la férule de Brice Hortefeux, le militant de droite passe le flambeau début 2008, à Maryse Lechesne, elle-même acoquinée avec le parti Sarkozyste puisqu’elle fut inscrite, en position non éligible, sur la liste UMP Ile-de-France menée alors par Jean-François Copé pour les régionales de 2004.
Comment analyser dès lors la décision du gouvernement de mettre fin au monopole de la Cimade qui, depuis 1985, par l’intermédiaire du protestant Pierre Joxe, était seule autorisée à intervenir auprès des réfugiés ?
L’habilitation récente du collectif à gérer les étrangers des CRA répond, en réalité, à une double volonté politique : sortir de l’anonymat une association en accord avec la politique de rétention actuelle. Mettre fin au monopole de la Cimade qui faisait de l’ombre à la politique du gouvernement.
La fibre humanitaire se révèle, en ce sens, au collectif le 28 août 2008, tel sainte Catherine à Jeanne d’Arc, quelques jours après la parution du décret gouvernemental qui prévoyait la répartition des CRA à plusieurs associations.
La divine providence leur permet de déclarer à la préfecture une modification de ses statuts en vue de pouvoir faire acte de candidature auprès du ministère de l’Immigration et mettre un terme à l’hégémonie de Sainte Cimade.
Pour le porte-parole du collectif, et Président par ailleurs de SOS Emigration, Aliou Tall, juriste spécialisé dans les droits de l’Homme et communautaire, qui ne se définit « ni de droite ni de gauche » mais du « parti de l’humain », le rôle de la Cimade ne peut être « celui d’être juge et parti » et proclame le droit « aux associations d’émettre des critiques » dans une logique « de partenariat et pas de concurrence ». L’attribution du lot ultramarin n’est donc, selon ses dires, « que le prolongement de ce que nous faisions depuis 2000 ». Le collectif, sans salariés, concentre actuellement un réseau majoritairement d’associations de communautés africaines (l’association Congolaise de France, les Amis d’Haïti ou les Jeunes Maliens). Mais sans prise avec la réalité des centres de détentions ultramarins.
Selon Damien Nantes, responsable du « service défense des étrangers reconduits » à la Cimade, le gouvernement a fait le « choix de l’éclatement, du démantèlement et de la mise en concurrence » avec un « changement d’objectif de la mission, soit d’une mission d’aide à une mission d’information ». Et de conclure que les « étrangers ont de moins en moins la possibilité d’exercer leurs droits ». L’adage diviser pour mieux régner semble s’appliquer depuis que l’association dirigée par Patrick Peugeot émet des rapports de plus en plus critiques quant aux conditions de détention et de traitement des réfugiés. Dernier en date, celui de 2008 qui décrypte la politique du gouvernement en ces termes : « Éloignement des migrants, faire du chiffre en réduisant leurs droits », rapport dont M. Tall affirme « n’être pas d’accord avec les conclusions ».
Dès lors, l’appel d’offre lancé par Doc Hortefeux en octobre 2008 s’apparente à une opération chirurgicale de grande ampleur : amputer la Cimade de ses quatre membres et lui greffer des associations capable de survivre sans le monopole du cœur de l’austère protestante.
Inconnu des cinq autres associations ayant bénéficié d’un lot de Centres de Rétentions (France Terre d’Asile, Forum des Réfugiés, Ordre de Malte, ASSFAM), « Le collectif Respect » sera en charge de ceux ou il y a le plus de reconduites à la frontière. Soit 12.000 par an. Et de faire dire à Damien Nantes que « c’est un révélateur de la logique d’ensemble et une caricature avec moins d’obstacles à la réalisation des choix de l’administration », en choisissant l’association « la moins critique a sa politique de reconduite a la frontière ».
La lettre de mission signée Sarko et Fillon le 31 mars dernier adressée au dernier promu, Eric Besson, donne le la des reconduites à la frontière pour 2009 : 27.000 souhaitées en « privilégiant la lutte contre l’immigration irrégulière » tout en consacrant le principe que « les régularisations doivent conserver un caractère exceptionnel ». Autant dire que les CRA ultramarins sont dans le viseur de l’Élysée.
Ajoutez à cela le fait que le collectif d’obédience sarkozyste, qui avance tapi dans l’ombre, ne figure pas au sein du comité de pilotage décidé le 17 avril (ASSFAM, France Terre d’Asile, Forum Réfugiés, Ordre de Malte) censé donner des gages à la Cimade pour une action conjointe et efficace. Faire cavalier seul en Guadeloupe, Guyane et Réunion, vaste combat quand on sait que les trois centres de rétention concentrent plus de la moitié des cas d’expulsion. Selon M. Tall, « une dizaine de juristes sont prêt pour la mission ». Quelle sinécure !
La Cimade a obtenu trois des huit « lots » définis par le ministère : les lots 1 (Bordeaux, Nantes, Rennes, Toulouse et Hendaye), 4 (Nîmes, Perpignan et Sète) 6 (Mesnil-Amelot, en Seine-et-Marne, 1, 2 et 3).
Les cinq restants sont attribués à l’Association service social familial migrants (Assfam) pour Bobigny et Paris, France Terre d’Asile qui obtient les lots de Palaiseau, Plaisir, Coquelles et Rouen-Oissel, l’Ordre de Malte ceux de Lille 1 et 2, Metz, Geispolsheim (Bas-Rhin), Forum Réfugiés ceux de Lyon, Marseille et Nice, et le Collectif Respect les CRA d’outre-mer.
À lire ou relire sur Bakchich.info :
Faites la sommes des ambitions, vous obtenez une dictature.
L’ambitieux pantin Besson (pantalon) met en "concurrence" les associations d’aide juridique aux sans papiers.
Montrer ces activités comme un "marché commercial", attiser les ambitions de certains sur cette "niche" ; c’est tout simplement monstrueux. C’est glisser vers une définition de l’être humain quelque peu abjecte : du bétail, des têtes, etc…
Le pire ce n’est pas le très très douteux "collectif respect" ; c’est la manipulation du sens des mots et l’épuisement des engagés sur des scandales orchestrés.
Il faut savoir que certains idéologues nihilistes sont capables de vous exciter sur des sujets dont ils méprisent la gravité. Car ils ont sur la balance leurs ambitions de reconnaissance sociales et/ou leur mégalomanie. Elles pèsent plus lourd ! Surtout pour ceux qui ont peur du monde, pour ceux qui ont peur de l’autre, pour ceux qui pensent tirer leur épingle du "jeux" dans un monde sécuritaire…
Henry