Le procès du détournement du navire Pascal Paoli s’ouvre demain. Mais les ferries de la compagnie qui relie la Corse ne sont pas toujours détournés par des syndicalistes. De bien plus stupéfiantes cargaisons transitent par leurs fonds.
A peine achevée leur semaine de grève, le 14 octobre, les syndicalistes STC (syndicat des Travailleurs corses) de la SNCM (Société Nationale Corse Méditerranée) vont devoir se remobiliser. Le procès des quatre marins qui avaient détourné le navire Pascal Paoli en 2005 va en effet se tenir les 19 et 20 novembre. Une façon comme une autre de compenser la baisse d’activité inexorable qui s’annonce à l’approche de l’hiver. Indispensable pour les soutiers hyperactifs de la plus connue des compagnies (dont Veolia et l’Etat sont les deux plus gros actionnaires) qui assure le trafic entre le continent et la Corse. Un trafic continu et parfois stupéfiant…
Le 13 janvier dernier, les flics de Bastia ont en effet serré tout un réseau qu’ils suivaient depuis avril 2008, dont le job principal consistait, selon leur enquête, à faire transiter dans les soutes des ferries de la SNCM quantité de shit et de coke. Près de 800 kilos, selon les limiers, acheminés par des professionnels. « Du grossiste à l’échelon local, une structure efficace semble s’organiser afin de faire parvenir des stupéfiants en grande quantité vers la Corse depuis le continent », écrivent, impressionnés, les enquêteurs corses.
Dans le rôle du grossiste présumé, un marchand de bagnoles marseillais, Christian Giomi, alias « le gros », comme l’ont révélé les écoutes de ses conversations téléphoniques avec ses comparses, déjà condamné pour trafic de bagnoles et…« fiché par erreur au grand banditisme », peste son avocat. Lequel nie toute implication de son client dans cette affaire.
Les policiers bastiais ont aussi mis la main sur Eric Carboni, dit« les Yeux verts », un Ajaccien en charge d’écouler la dope, et Jean-François Mouren, une des têtes du réseau, qui navigue entre la Corse et le continent. Un garçon décidément incorrigible : on venait de lui enlever un bracelet électronique (déjà une vieille affaire de stups…) au moment où on lui a passé les menottes.
Mais c’est l’ « associé » principal de Mouren qui a demandé le plus de boulot aux limiers : Michel Vadi, dit « Manu », incarcéré à Borgo depuis janvier, en charge « des filières d’écoulements en Corse, de l’acheminement de la marchandise et de l’encaissement du produit des ventes ».
Un marin de la SNCM bon pied bon œil, âgé de 39 ans, ex du STC, dont l’ancienneté au sein de la compagnie lui a fait profiter d’ « un réseau de connaissances et d’amitiés lui permettant d’être de bon conseil pour les membres du réseau désirant effectuer un passage anonyme dans le cadre d’une traversée via sa compagnie ». Taquins, les flics notent que Manu, représentant syndical, a l’avantage d’être « un homme en place » au sein de la SNCM, « malgré les nombreuses fluctuations que cette dernière avait traversée » …
Depuis son arrestation, nul mouvement de soutien n’est venu perturber la marche de la compagnie. Alain Mosconi, le très bagarreur patron du STC (syndicat des travailleurs Corses) nous a expliqué ce désintérêt pour son ancien camarade syndiqué : « Michel VADI a quitté notre syndicat il y a plusieurs années et au moment des faits reprochés, il était délégué du SAMMM (syndicat concurrent du STC, NDLR) ». Quant à la SNCM, contactée à de nombreuses reprises par Bakchich, elle ne juge pas utile de communiquer sur cette affaire. Une rupture de trafic, ce n’est jamais bon pour l’image d’un transporteur….
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