Les avocats du convoyeur Tony Musulin devaient présenter une demande de mise en liberté ce 5 janvier. Une perspective qui donne des sueurs froides aux policiers et fait cauchemarder la chancellerie.
L’ex-convoyeur de fonds Tony Musulin va-t-il prochainement recouvrer la liberté ? Pour sembler incongrue, la question est pourtant pertinente et ses avocats, maîtres Hervé Banbanaste et Christophe Cotte-Bretonnier, ont présenté une demande de mise en liberté ce 5 janvier au matin.
Une telle demande a-t-elle des chances raisonnables d’aboutir ? Une remise en liberté n’aurait rien d’infondée sur un plan purement juridique. Car Tony Musulin n’est poursuivi que pour un simple vol. Son casier judiciaire est vierge, il n’a commis aucune violence. Surtout, élément essentiel, il s’est rendu de son plein gré, la garantie sérieuse qu’il se présentera bien à son procès. Pour un vol simple –quand bien même il s’agit de 11,6 millions d’euros ! –, son maintien en détention préventive ne peut excéder quatre mois. Ainsi le veut la loi !
Pour contrer cette logique judiciaire, une véritable course contre la montre s’est engagée ; et l’instruction est menée au pas de charge : « Une instruction TGV », commente un observateur du Palais de justice, qui estime que le procès pourrait se dérouler dès le mois de mai. « Les commissions rogatoires fusent dans toutes les directions. » Les poulets sont mis à rude contribution.
L’objectif ? Empêcher que Tony Musulin ne comparaisse libre à son procès et trouver l’élément qui permettrait d’alourdir la barque. Notamment une complicité, afin de requalifier les faits en « vol en réunion » ou, mieux, « association de malfaiteurs ».
Bakchich peut confirmer que des investigations ont eu lieu à la Loomis, la boîte de transport de fonds de Musulin, pour tenter de lui trouver un complice. Les peines encourues dans ce cas seraient de cinq à quinze ans de prison.
Pour l’instant, aucun élément à charge n’est venu alourdir le dossier du convoyeur. Qu’il s’agisse de la dizaine de comptes qu’il possède ou de la Société civile immobilière dont il est co-actionnaire, pour l’achat d’un immeuble de trois étages, après avoir souscrit un crédit à 100%.
Comme beaucoup de convoyeurs, dont l’emploi du temps est généralement fait de demi-journées, Tony Musulin complétait son salaire de 1 600 euros en bossant le soir. Les enquêteurs se sont également penchés sur le cas de la Ferrari que le convoyeur s’était offerte il y a quelques années. En effet, Musulin avait porté plainte il y a un an pour s’être fait dérober son bolide par deux adeptes du « car-jacking », qui l’avaient braqué en moto avant de lui dérober son véhicule.
Cette version est contestée par la PJ, qui prétend avoir les preuves d’un discret voyage effectué par le convoyeur à Belgrade. Là, il aurait vendu sa voiture au marché noir avant de rentrer en bus. Autant de zones d’ombre qui lui valent aujourd’hui une autre mise en examen, celle-là pour tentative d’escroquerie.
Les avocats du convoyeur craignent désormais qu’il ne soit plus « puni » que « jugé » : « Musulin a ridiculisé le système. Il a eu la faute de goût de se rendre sans se faire prendre ».
Les histoires de braquage finissent mal. En général. Mais de petites exceptions motivent encore les larrons. Bien plus futé que le Lyonnais Tony Musulin, le Berrichon Jean-François Aubrun a mis la main sur un butin, certes plus modeste, mais sans jamais se faire prendre… Les faits datent de plus d’une vingtaine d’années.
Le 22 décembre 1986, alors âgé de 28 ans, ce convoyeur employé de la Société de surveillance de l’Ouest, à Orléans, avait réussi à persuader ses deux collègues de le laisser finir seul la tournée… Qui n’a jamais vraiment cessé. Depuis, on ne l’a jamais revu. Pas plus que les 4,5 millions de francs (686.000€) avec lesquels Jean-François Aubrun a disparu. Selon la légende, le seul signe de vie jamais donné par le nouveau millionnaire aurait été un bouquet de fleurs adressé, une semaine après son forfait, à… son ex-femme. Un peu pingre, comme cadeau de rupture !
Vingt-trois ans après, du fait de la prescription, le convoyeur ne risque en théorie plus aucune poursuite pénale. Il préfère quand même rester discret. On connaît bien l’adage « pour vivre heureux vivons caché ». Sûr qu’un braqueur se doit de respecter une telle règle de vie.
Si Tony avait si bien organisé son casse comme tous les autres casses connus, jamais la fin n’aurait été aussi ridicule car le plus difficile était fait (quoique… le reste du casse non récupéré n’est pas mal.)
Complices "post-casse" défaillants, casse trop gros pour un trop petit cerveau ? Mais aussi, casse très intelligent car les risques de prison encourus, sont insignifiants par rapport au gain. Et donc, pas la peine de s’épuiser en cavale interminable ou tout l’argent aurait fondu comme neige au soleil.
La morale de cette histoire est qu’aussi performante soit elle, la sécurité est toujours, aux extrémités de la chaîne, une affaire humaine (avec ses défaillances).
Et puis c’est vrai quoi : une idée simple, pas de violence, un gros paquet de fric, la police un peu en retard et … bientôt une libération sur un beau tapis de billets ! Bravo quand même l’artiste !