La célèbre Barbouze française se ballade maintenant dans la riante Lettonie où il attire encore les foudres de la collante justice.
Pauvre marchand d’armes ! La justice cherche noise à Robert Montoya depuis qu’il a livré au président de Côte d’Ivoire Laurent Gbagbo deux avions Sukhoï, dénichés en Biélorussie, qui ont servi à bombarder le camp des soldats français de Licorne, en décembre 2004, entraînant la mort de 10 personnes dont neuf militaires français. Mais l’ancien gendarme, proche de la cellule des coups tordus à l’Élysée sous Mitterrand, qui préfère depuis quelques années résider dans la chaleur accueillante du Togo, où il s’est rapproché du dictateur Eyadéma avant d’être inculpé de « trafic d’armes » par ses anciens protecteurs Togolais, fait l’objet d’une nouvelle enquête à Paris.
Il faut dire que l’empire Montoya s’étant subitement agrandi en Lettonie, début 2004, un flic tenace de l’ambassade locale s’est mis sur le dossier. Et n’a pas manqué de bombarder sa hiérarchie de notes alarmistes. Car l’ancien képi tricolore se pique désormais de jouer au banquier à Riga, comme l’a raconté Le Canard enchaîné. Début 2004 donc, il a créé à Riga « RM Holdings », une société de droit letton au capital de 2 millions d’euros, et pris une petite participation (400 000 euros tout de même) dans le capital de la principale banque locale, la Parex Banka, « la plus grande banque de Lettonie », selon un rapport confidentiel de juillet 2004 que Bakchich a pu consulter.
Sa société est représentée à Riga par un ancien banquier, Patrick Imbert, et a ouvert un compte bancaire à la Parex Banca. La boîte est même propriétaire d’un avion bi-moteur de tourisme et d’un hélicoptère russe MI 8 « dont le pilote n’est autre que Ricardo Ghiazza », explique le rapport. Ghiazza, comme le savent les connaisseurs du Togo et les lecteurs de Bakchich, n’est autre qu’un proche de feu Eyadéma, dont il bichonnait les animaux, et promoteur d’un grand parc national au nord du pays. Et comme l’empire Montoya déborde largement des affaires de sécurité et de défense, RM Holdings a également acquis 51% d’une fabrique… de sacs de coton, dans la région de Nantes.
Le commissaire de l’ambassade en Lettonie s’est pris de passion pour Robert Montoya et a enquêté tous azimuts sur notre bon gendarme expatrié et voit partout malice. Sa prise de participation dans la banque lettone ? « Cela pourrait lui permettre, le cas échéant, de blanchir, pratiquement en toute impunité, des capitaux d’origine suspecte (ventes d’armes, trafics d’animaux) », s’inquiète-t-il en septembre 2004. Quelle langue de vipère ! S’en prendre à un fabricant de sacs…
Mais à force de déranger les pontes de l’Intérieur sur son sujet fétiche, le flic a suscité une enquête de Tracfin. Le service anti-blanchiment de Bercy s’est penché sur les comptes bancaires du pandore et n’a pas manqué de remarquer d’importants transferts et sorties d’argent entre les comptes français et lettons, avec de beaux versements en provenance de Côte d’Ivoire. Résultat, Tracfin s’est fendu d’une transmission au parquet de Paris qui s’est fait un plaisir d’ouvrir une information judiciaire pour « blanchiment de capitaux », confiée au juge Henri Pons, et sur laquelle la Division nationale des investigations financières (DNIF) est chargée de faire la lumière.