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Le « Macaque » colombien restera t-il en prison ?

Paramilitaire / mardi 22 avril 2008 par Joan Tilouine
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Aujourd’hui en prison, le « Macaque » est l’ancien chef des sanguinaires paramilitaires d’extrême droite colombiens, doublé d’un narcotrafiquant accompli. Le président Alvaro Uribe essaie de le faire extrader aux Etats-Unis avant qu’il ne se mette à table.

Plus connu en Colombie sous le pseudo du « Macaque », Carlos Mario Jiménez Naranjo est ce qu’on appelle un gros calibre. Tout à la fois narcotrafiquant notoire encore en activité et ancien chef de l’organisation paramilitaire d’extrême-droite Autodéfenses Unies de Colombie (AUC), une organisation criminelle qui a semé la terreur dans les campagnes (cf. encadré).

Aujourd’hui sous les verrous, le Macaque se trouve au cœur d’une bataille politico-judiciaire entre les Etats-Unis, le gouvernement colombien et les victimes de la violence en Colombie. D’un côté, la justice américaine réclame l’extradition du narcotrafiquant et, de l’autre, en Colombie, une partie de la société civile exige que le seigneur de guerre soit jugé pour ses « crimes de lèse-humanité ». Et au beau milieu de cette cacophonie, le gouvernement colombien et le président Alvaro Uribe trépignent de colère.

Il faut dire que le Mouvement des victimes des crimes d’Etat (Movice), une Ong colombienne, a fait fort en faisant suspendre provisoirement la livraison du Macaque aux Américains, grâce à une pétition nationale et à un recours bien senti devant le Conseil de magistrature de la région de Bogota. Après le rendu de la Cour suprême colombienne le 17 avril, qui se prononce contre l’extradition des paramilitaires démobilisés n’ayant pas accompli leur devoir envers les victimes, la coupe est pleine pour le président Alvaro Uribe. Ce dernier avait pourtant avalisé la livraison du criminel aux Américains…

Il faut dire aussi que la taille de la bête, et la poursuite de ses activités délinquantes depuis sa cellule de la prison de Medellin ont de quoi pousser Bogota à s’en délester. Furibond, le ministre de l’Intérieur colombien a même critiqué avec virulence la suspension provisoire de l’extradition, martelant que selon la Constitution et le code de procédure pénale, le Président a le dernier mot en matière d’extradition. Mais l’acharnement du gouvernement colombien à vouloir éloigner « le Macaque » et sa détermination à faire plier la justice montre qu’il y a anguille sous roche.

Plus de 1000 victimes, 500 cadavres retrouvés

La Colombie est en effet toujours en plein scandale dit de la « parapolitique », qui n’en finit pas de rebondir. Il est en effet de notoriété publique que les « paras » avaient amplement infiltré les cercles du pouvoir et vice-versa. Dans ce contexte, le gouvernement aurait tout intérêt à payer le charter au Macaque avant qu’il ne se mette à table pour de bon. D’autant qu’au Congrès colombien, il y a le feu au lac : pas moins de 51 de ses membres sont visés par une enquête du Procureur général de la nation pour leurs connivences avec les « paras » et 29 croupissent déjà derrière les barreaux. Tous appartiennent à des partis pro-Uribe. Sans parler des pontes du milieu politico-industriel que le Macaque est susceptible de faire chuter…

Guerre et paix en Colombie

Pour se défendre et attaquer les guérillas de gauche (Farc, ELN…), les narcos et les grands propriétaires terriens, avec l’appui de certains pontes du sérail politico-industriel de droite, créent et financent les Autodéfenses Unies de Colombie (AUC) en 1997. Naît alors une organisation mafieuse paramilitaire d’extrême-droite, qui perpètre des massacres dans les villes et campagnes stratégiques. Dans le cadre du processus de paix, initié exclusivement avec les « paras » par le président Alvaro Uribe, 32 000 miliciens des AUC se sont démobilisés entre 2003 et 2006. En l’échange des armes, la controversée loi « Justice et paix » de juillet 2005 amnistie les petites mains. Un chef « para », responsable entre autres de crimes de lèse-humanité et de narcotrafic, encoure une « peine alternative » de 5 à 8 ans de prison s’il rompt avec ses activités criminelles, confesse ses crimes et répare financièrement ses victimes. Cette loi protège les narco-terroristes de l’extradition s’ils remplissent leur devoir envers les victimes. Fait rarissime de leur part, jusqu’ici.

J. T.

S’il est jugé en Colombie, le Macaque devra dédommager les victimes des AUC et révéler la vérité sur les horreurs commises pendant plus d’une décennie par sa milice de 5 000 hommes. Tous appartenaient à la redoutée faction des AUC appelée « Central Bolivar », autrefois implantée dans dix départements. « Beaucoup d’hommes au pouvoir craignent les révélations sur la machine « para ». Mais l’important pour les victimes, c’est la vérité. Vu que le Macaque est exclu du processus « Justice et Paix » (cf. encadré), nous nous battrons pour un jugement normal », précise le leader du Movice, Ivan Cepeda.

Depuis sa démobilisation en décembre 2005, le Macaque a reconnu sa responsabilité concernant 1000 victimes, et révélé aux autorités la localisation de 54 fosses communes où ont été retrouvés plus de 500 cadavres. « La milice du Macaque était l’une des plus violentes de la mouvance paramilitaire. Elle était crainte et redoutée dans les campagnes. Une sorte de cyclone paramilitaire qui emmenait tout sur son passage : la vie, la terre cultivable, l’habitat », rappelle l’observateur des droits de l’Homme, Marco Fidel.

Dans le cadre du processus « Justice et paix », il a aligné sur la table de la Commission de réparation des victimes (cf. encadré) une liste de biens d’une valeur de 113 millions de narcopesos (40 000 euros), en guise de dédommagement. Une broutille pour le Macaque qui, en baron de la drogue qui se respecte, compte entre autres dans son empire des milliers d’hectares de terre, des mines d’or, des parts d’un club de foot et d’entreprises agro-industrielles…

Business florissant depuis sa prison

« Le Macaque a surestimé les faveurs judiciaires du processus de paix négocié avec le gouvernement. Il a rendu les armes mais pas les clés de son entreprise de narcotrafic », constate, sous anonymat, un chef AUC démobilisé. Accro aux sommes faramineuses engrangées grâce au trafic de poudre, il a continué à fourbir son business depuis sa prison par le biais de ses hommes de main et son large réseau. Erreur, puisque c’est à cause de cela qu’il a été exclu du processus « Justice et paix » qui protège de l’extradition en cas d’arrêt total des activités illégales.

Selon les informations du DAS (police secrète colombienne) et du Département d’Etat américain, l’animal a même hérité du puissant réseau de Don Hernando Gomez, narcotrafiquant assumé et financier des AUC, livré l’an passé aux Américains !

Plus récemment, dans une étonnante missive (datée du 25 janvier 2008 et en cours d’authentification par Interpol) débusquée sur l’un des ordinateurs de feu Raul Reyes, un chef des Farc informait le Secrétariat général du mouvement sur ses liens avec les émissaires du Macaque. « Les escortes du Macaque offrent leurs services pour développer des activités militaires, logistiques… L’orientation qu’ils ont au niveau national est de négocier avec les Farc tout ce qui a à voir avec le narcotrafic ».

Mercenariat et trafic de drogue… Autant de prestations de services crapuleux qui font oublier à l’animal sa prétendue idéologie de paramilitaire, viscéralement hostile à toute guérilla de gauche.

En attendant que tout le monde se mettent d’accord sur son sort, le destin carcéral du Macaque est suspendu à la liane judiciaire. Il continue à engranger les narcodollars mais dort à l’ombre. Une maigre consolation pour ses nombreuses victimes.


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4 MESSAGES

Forum

  • Le « Macaque » colombien restera t-il en prison ?
    le mardi 22 avril 2008 à 18:51, anonyme a dit :
    C’est rare de parler des paramilitaires colombiens, complètement zappés par vos confrères. Bravo car c’est presque unique et on a tendance à fixer sur les farc. Le monstre a de quoi faire des grimaces mais il a du sang sur les pattes. C’est dingue 5 ou 8 ans de prison …pour un type comme ca.
  • pour compléter le portrait
    le mardi 22 avril 2008 à 10:12, olivier p a dit :

    http://www.rue89.com/2007/09/12/la-colombie-arrete-son-plus-gros-trafiquant-de-cocaine-au-suivant :

    extrait :

    " Qu’est-ce qui vaut tant d’honneur à celui que l’on surnomme plus trivialement "le cycliste" et qui n’est officiellement que propriétaire de ranch ? D’être le leader supposé du Cartel de Norte del Valle, "la plus puissante et la plus violente des organisations colombiennes trafiquant la coca", à en croire la biographie que lui consacre le FBI. Elle contrôlerait, toujours selon le FBI, 60% de la cocaïne entrant aux Etats-Unis. Le cartel est en fait le dernier rejeton des grandes organisations colombiennes, qui, dans les années 80 et 90, contrôlaient toute la chaîne, de la culture de la coca à la distribution dans les rues des Etats-Unis.

    Don Diego est également accusé de connivence avec les AUC, paramilitaires d’extrême droite classés comme organisation terroriste par les Etats-Unis.

    (…)

    Son arrestation tombe à un moment plus qu’opportun pour le gouvernement Uribe : le mois dernier, la presse colombienne révélait que des policiers et des militaires avaient été payés par Don Diego pour fermer les yeux (et ceux de leurs radars) sur le passage de ses chargements de cocaïne. Vingt-six d’entre eux avaient été contraints à la démission.

    (…)

    Quant à savoir qui prendra le relais du "Seigneur de la guerre" ? Les guérillas d’extrême gauche (les Farc) ou d’extrême droite (AUC) semblent de plus en plus contrôler le trafic, tandis que les organisations mexicaines prennent le pas sur leurs homologues colombiens. "Le meilleur dealer du monde est probablement un total inconnu", me confiait il y a quelques années un homologue britannique de Montoya. Bien malin qui peut dire où se terre le "Seigneur de la guerre" de demain. "

    • pour compléter le portrait
      le mardi 22 avril 2008 à 10:49
      Euh, ce post est incompréhensible. Quel est son intérêt ? Ou alors il faut donner une explication de textes.
      • "cycliste" et "macaque"
        le mardi 22 avril 2008 à 11:53

        cet article sur le "macaque" m’a fait penser au "cycliste"

        … par ailleurs, il me semble que les deux articles, celui de bakchich et de rue89 se complètent clairement, les analyses se croisent.

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