La plainte du chef de l’État contre l’ancien patron des RG, Yves Bertrand, fidèle grognard du chiraquisme, annonce la fin de l’armistice entre Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac.
Ces derniers jours, tout annonce la fin de l’armistice qui semblait avoir été conclue, depuis l’arrivée de Sarkozy à l’Élysée en 2007, entre sarkozistes et chiraquiens. Le Parquet de Paris, aux ordres de la Chancellerie, demande le renvoi de Dominique de Villepin devant les tribunaux dans l’affaire Clearstream. Le patron de la DGSE, nommé par Chirac en 2002, est prié de faire ses valises. La cheftaine de l’Intérieur, MAM, se trouve plus proche de la porte que de la promotion. Les officines, qui avaient le vent en poupe avant 2007, sont dans le collimateur. Enfin, voici Nicolas Sarkozy lui même, qui porte plainte contre l’ancien patron des RG, Yves Bertrand, après la publication par le Point des carnets secrets que ce dernier noircissait consciencieusement.
Ce haut fonctionnaire passait l’essentiel de son temps à enquêter sur les supposées frasques de l’actuel chef de l’État, de Charles Pasqua ou encore de Lionel Jospin. Autant dire de tous ceux qui pouvaient nuire à Jacques Chirac, notamment au moment de la Présidentielle de 2002. Au cœur de l’appareil d’État, les obsessions du commissaire Bertrand ne sont pas une découverte. Ce qui est nouveau, en revanche, c’est que sa prose, versée à l’instruction du dossier Clearstream dès l’hiver dernier, soit aujourd’hui livrée en pâture. Au delà de son cas, c’est tout le système qui a sévi, pendant douze ans, sous le règne de Jacques Chirac, qui pourrait bien se trouver dans le collimateur.
Dans l’entourage immédiat de Chirac à l’Élysée, deux hommes ont été toujours chargés des basses œuvres et des coups tordus : Philippe Massoni, l’ancien Préfet de police, devenu conseiller du Président de la République et Yves Bertrand, à la tête des RG. L’entourage proche de Sarko soupçonne ces deux-là, non sans raisons, d’avoir joué un rôle important dans l’affaire Clearstream.
Dans cette fine équipe, Massoni était plutôt le cerveau et Bertrand le bras armé, recevant de multiples journalistes ou quelques flics amis à qui, moyennant finance, il confiait de discrètes missions parallèles. Au quatrième étage du 11 de la rue des Saussaies, les portes doublement capitonnées de son bureau étaient toujours largement ouvertes, samedi compris. Autour d’un whisky, « Grincheux », comme le surnommaient ses hommes, recueillait les informations avec délectation, une sorte de jubilation dans le regard, avant d’en distiller d’autres, vraies ou fausses.
C’est ainsi qu’à quelques mois des présidentielles de 2002, il fit tout pour qu’un livre sur le passé trotskiste de Jospin, écrit par un de ses proches, le journaliste Jean Paul Cruse, soit publié. La manœuvre échouera, mais Bakchich publie ci dessous la première page de cet ouvrage magistral. Avec, en prime, des annotations de Didier Rouch, le chef de cabinet et le principal collaborateur à l’époque d’Yves Bertrand et promu pour l’occasion « conseiller littéraire ».
La légende veut qu’Yves Bertrand, nommé par la gauche en 1992, ait servi sept ministres, une sorte de Fouché qui aurait su se rendre indispensable par son dévouement à la chose publique. En fait, plus proche du Sergent Garcia que du ministre de la police de l’Empereur, Yves Bertrand ne doit sa longévité qu’à la protection de son mentor, Jacques Chirac.
Dès les années 2002-2003, la guerre des réseaux fait rage entre chiraquiens et sarkozistes. Sarko est nommé à l’Intérieur et veut la peau de Bertrand dont il sait qu’il a enquêté sur le financement de la campagne balladurienne de 1995. Quant à Philippe Massoni, il espérait obtenir de Chirac son baton de maréchal, le poste de ministre délégué à la police. Mais le « niet » de Nicolas Sarkozy met fin à cet espoir. Disons que le climat est totalement délétère dès le début du quinquennat de Chirac.
Bakchich s’est procuré le verbatim d’un entretien qui a eu lieu en octobre 2002 entre Didier Rouch, bras droit donc du patron des RG, et Hubert Marty Vrayance, un commissaire du SGDN, à qui Yves Bertrand avait confié de discrètes missions, avant de s’en débarrasser.
Dans cet échange, « Saroyan » ou « Saro » est le surnom que les deux hommes donnent à Yves Bertrand, faisant référence au personnage joué par Louis de Funès dans le Corniaud. Et « le Squale » n’est autre que Bernard Squarcini, numéro deux des RG à l’époque, proche de Sarkozy et aujourd’hui patron de la DCRI (Direction centrale du Renseignement Intérieur).
Le dialogue est savoureux. Et il montre à quel point les relations sont exécrables entre les proches de Chirac et d’Yves Bertrand et les collaborateurs de Sarkozy, type Bernard Squarcini.
Didier Rouch : « Saro » en a gros sur la patate, il est écœuré…Je me demande s’ils n’ont pas foutu la ligne de « Saro » sous l’écoute du « Squale ».
Hubert Marty Vrayance : Oui, et la tienne aussi…
D.R : C’est un exécutant, le Squale
HMV : Un exécutant de qui ?
D.R : Mais pour Charles Pasqua, Guéant…..
Plus tard dans la conversation, Didier Rouch développe une analyse extravagante, voire divertissante, sur la mort de Pierre Bérégovoy, qui fut longtemps une des obsessions d’Yves Bertrand.
« Et bien, je peux te dire que c’est Bernard Tapie, deux jours avant le premier Mai, était sur le secteur de Nevers. Il se déplaçait avec deux individus qui portaient des mallettes, ostensiblement hein, avec menottes, chaines au poignet. Et dans l’une des auberges, ils avaient réservé une salle à l’écart… Et l’une des aubergistes, qui, elle, est en liaison avec des gens très intéressants, a entendu leur propos sur la liquidation de Béré ». Et d’insister : « Et attention, l’argent. Il y avait des fonds illimités dans cette affaire. Parce-que les types, dans leurs mallettes, ils ne transportaient pas des archives »
Et l’autre, un peu surpris, lui répond : « Mais on le remarque quand même Tapie ! » Même dans un mauvais film de série B, aucun scénariste n’oserait un tel galimatias. Le collaborateur d’Yves Bertrand, si ! Mais il faut admettre que Didier Rouch est lucide sur les limites de son propre patron : « C’est une personnalité complexe, il n’a pas que des qualités Saroyan…Il s’est pris longtemps pour Talleyrand. Le problème, c’est qu’il n’a pas l’envergure de Talleyrand et il s’imaginait qu’il allait pouvoir jouer les uns contre les autres, que les gens allaient être dupes…qu’il allait monter des coups tordus de fil blanc et que tout le monde allait marcher dans la combine ».
Apparemment, tout le monde ne marche plus dans les combines du bon commissaire Saroyan-Bertrand.
L’histoire de ces carnets, c’est celle de l’arroseur arrosé. Il y a un an, les juges d’Huy et Pons enquêtent sur le rôle de la commissaire Brigitte Henry, très proche et d’Yves Bertrand, mais aussi d’Imad Lahoud, soupçonné d’être le faussaire. Une perquisition n’est pas impossible chez Bertrand, il s’y prépare. C’est lui en effet qui déchire certaines pages, fait disparaitre les carnets d’avant 1998 et d’après 2003, date du début de la manipulation des listings Clearstream. Et lui enfin qui dépose le tout dans sa cave. Avec l’idée que les deux juges d’Huy et Pons, s’ils découvrent le contenu explosif des carnets, n’auront qu’une hâte, celle de refermer la marmite. Effectivement, les juges vont perquisitionner chez lui, enterrer les carnets et surtout ne pas l’inquiéter. Cet été, Yves Bertrand, qui a publié un livre de souvenirs, paraissait hors d’atteinte. tout en laissant entendre, mi amusé, mi menaçant qu’il pourrait en écrire un second. Apparemment, Yves Bertrand a perdu la main.
À lire ou relire sur Bakchich.info :
Monsieur, En application de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ( LCEN art. 6 IV), qui protège les droits du citoyen des torts causés par la diffusion d’informations volontairement ou involontairement inexactes, voire malveillantes, je vous prie de bien vouloir publier en intégralité dans les délais légaux et dans les formes imposées par la loi le droit de réponse ci-dessous, survenant à la suite de l’article contre moi publiés sur votre “blog” :
“Auteur d’une synthèse argumentée de plusieurs livres publiés sur Lionel Jospin, publiée par mes soins sous forme de brochure à petit tirage, à l’intention de quelques amis, sous le titre “Les cauchemars en rose et brun qui hantent Lionel Jospin”, disponible depuis longtemps sur internet (http://www.lemondereel.fr/jospin.html) et jamais démentie ni contestée par l’intéressé (qui en avait, bien entendu, reçu copie pour avis et rectification avant mise en circulation), je démens formellement les assertions d’un commissaire des RG chassé depuis de la fonction publique pour des raisons que je n’ai pas à commenter (n’étant ni en charge de la déontologie policière ni expert psychiatre) assertions que, lançant un des livres à grand bruit mais à réputation éphémère dont vous vous êtes fait la spécialité, vous répandez un peu partout sans avoir eu la correction d’être entré en relation avec moi pour avoir mon son de cloche.
Comme il était pourtant facile de me le demander, ou, à défaut de cette courtoisie élémentaire, plus facile encore de le lire gratuitement sur le même site internet (http://www.lemondereel.fr/Lapidation.html), où tous mes arguments et preuves contre une campagne d’origine précisément policière (RG) sont disponibles en ligne, je n’ai eu nul besoin, pour la réalisation de ce texte sur Jospin, de quelque aide que ce soit d’Yves Bertrand.
Je n’ai fait que remettre en perspective, ce qui manquait, les abondantes informations publiées longtemps avant “Les cauchemars…” dans les livres de Christopher Nick, Raffy, Askolovitch, etc, largement repris dans la presse sans que son véritable éclairage soit donné à l’histoire des Jospin (père et fils…), et à leur relation commune avec la tradition historique de la résistance, qui est la mienne après avoir été celle d’un père couvert de gloire, et de sang.
J’ai mis publiquement, et mets, au défi qui que ce soit d’y trouver le moindre “tuyau” qui, non “sourcé”, pourrait provenir des RG. Il n’y en a pas.
Même chose pour les relations avec le monde de l’édition, à fin de publication. Aucun puissant personnage ne m’y a aidé, bien au contraire. La preuve : il n’y a pas eu de livre. Thierry Pfister, d’Albin Michel, se souvient très probablement des raisons qu’il avait personnellement données à un refus, ou plus précisément, à un différé, succédant à mes précédentes démarches personnelles auprès des éditions Carnot, dont le représentant, Patrick Pasin, auteur d’un fax inhabituel (s’il s’avère authentique…), étrangement adressé au Secrétariat Général de la Défense Nationale (SGDN), organisme confidentiel rattaché directement,à l’époque, au cabinet d’un premier ministre appelé…Lionel Jospin, qui y avait nommé Marty-Vrayance, semble avoir disparu du paysage aussi mystérieusement qu’il y était apparu, et ne répond plus, en tout cas, à mes courriers.” Jean-Paul CRUSE rf.oodanaw@ignobmI
d’où viennent donc les milliards que Sarkozy a sorti de son chapeau pour la recapitalisation des banques quand il peine à trouver les fonds pour financer son RSA ?
http://www.impots-utiles.com/crise-d-ou-viennent-les-milliards-de-sarkozy.php
Votre commentaire est remarquable.
Si la guerre entre chiraquiens et sarkozyste n’existe pas, comment expliquez-vous que l’ensemble de la presse nous laisse penser qu’il y a deux camps adverses ?
Qu’en est-il réellement ?