Défendus par l’avocate et prix Nobel de la paix iranienne Shirin Ebadi, sept membres de la minorité religieuse bahaïe risquent d’être lourdement et injustement condamnés en Iran pour le bon vieux classique « espionnage en faveur d’Israël ».
Bien que musulman chiite à 90 %, l’Iran abrite de nombreuses minorités religieuses. Selon l’édition 2003 du rapport sur la liberté religieuse dans le monde du Département d’état américain, outre 7 millions de sunnites iraniens, on compte entre 20 000 et 30 000 juifs (contre 80 000 avant la révolution iranienne de 1979), environ 300 000 chrétiens mais aussi entre 35 000 et 60 000 zoroastriens. Mais la communauté religieuse non musulmane la plus importante est de loin celle des Bahaïs (cf. encadré sur la religion bahaïe), dont le nombre varie entre 300 000 et 350 000 membres.
Ce qui contrarie au plus haut point le pouvoir de Téhéran qui lance régulièrement à son encontre des vagues de répression. Pourtant l’Iran est le berceau de la religion bahaïe qui y a vu le jour au 19è siècle. Réputée pacifiste, apolitique et tolérante, elle accepte le Coran, le prophète Mahomet et loue même l’enseignement du Coran. Mais prône son indépendance religieuse, la justice sociale, la tolérance et l’égalité hommes-femmes.
C’est dans ce contexte qu’entre mars et mai 2008, comme Bakchich s’en était fait l’écho, les autorités iraniennes ont arrêté puis embastillé sept bahaïs. Ces cinq hommes et deux femmes sont respectivement industriels, psychologue, ingénieur, directrice d’école, assistant social et opticien. Tous ont en commun d’avoir déjà été harcelés par le pouvoir iranien (au point parfois d’avoir dû abandonner leur travail) et d’occuper des fonctions au sein des « Amis en Iran », un organe informel de coordination de la communauté bahaïe en Iran.
Le 11 février dernier, la justice iranienne, en la personne du vice-procureur de Téhéran, a fini par communiquer, sans avancer de preuves, la mise en accusation des sept Bahaïs : appartenance à « l’organisation illégale bahaïe » et « blasphèmes, propagande contre la République islamique et espionnage en faveur d’Israël ». Une accusation qui sert aussi au pouvoir iranien à régler le sort de ceux qu’il considère comme des opposants politiques mais qui coûte la vie dans le second pays au monde, après la Chine, où la peine de mort est la plus appliquée.
Pour les pairs des sept bahaïs qui vivent en France, l’accusation d’« organisation illégale » ne tient pas la route : les différents gouvernements qui se sont succédés en Iran ont toujours été informés de l’existence des « Amis en Iran » et étaient même en contact officieux avec les interlocuteurs responsables de la communauté bahaïe.
Pas plus que celle d’« espionnage pour le compte d’Israël ». « Depuis le début des années 1930, la nouvelle religion est taxée de secte politique créée par les gouvernements impérialistes pour affaiblir l’Islam. Les bahaïs ont été accusés tour à tour d’être à la solde de l’impérialisme russe, du colonialisme britannique, de l’expansionnisme américain, et plus récemment du sionisme » s’insurgent-ils dans un communiqué diffusé le 12 février dernier.
Si les pays arabes qui abritent des communautés bahaïes de par le monde (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte…) mettent, comme d’habitude, un point d’honneur à se taire, les pays occidentaux assurent un service minimum. Ainsi, aux Etats-Unis, le Département d’Etat a condamné le 15 février « la décision du gouvernement iranien de retenir des charges totalement infondées d’espionnage à l’encontre des sept responsables de la communauté iranienne bahaïe ».
De son côté, dans une déclaration en date du 17 février, l’Union européenne appelle sobrement la République islamique d’Iran a « autoriser des observateurs indépendants à suivre les procédures judiciaires et de rééxaminer les accusations portées contre les intéressés ».
Hélas, tout laisse à penser que la justice iranienne restera de marbre. L’avocate des sept Bahaïs, la célèbre Prix Nobel iranienne de la paix Shirin Ebadi, n’a même pas eu accès à leurs dossiers et a de surcroît été victime de harcèlement, d’intimidations et de menaces après avoir accepté de les défendre.
La religion bahaïe a été créée en 1863 en Perse par Mirzâ Husayn’Alî connu sous le surnom de Baha’u’llah, la « Gloire de Dieu ». Cette foi croit en trois unités : l’unité de Dieu, celle de la religion et celle de l’humanité. Les Bahaïs considèrent qu’en fonction des époques, Dieu se révèle aux hommes au travers de messagers comme Abraham, Zoroastre, Moïse, Bouddha, Jésus, Mahomet et bien sûr Baha’u’llah. Pour eux, d’autres apparitions de Dieu sont à venir mais mille ans après l’apparition du bahaïsme. La communauté est accréditée aux Nations Unies comme Ong (organisation non gouvernementale). Le centre mondial du bahaïsme de trouve à Haïfa, en Israël, pour des raisons historiques. En 1868, soit 80 ans avant la création de l’Etat d’Israël, Baha’u’llah, banni par les empires perse et turc du 19è siècle, a été exilé de force dans la ville d’Acre (Akko), aujourd’hui située en Israël.
A lire et relire sur Bakchich.info :
En tant que baha’i marocain, j’aimerais remercier de tout mon coeur l’auteur de l’article.
La Foi Baha’ie non seulement prône l’amour de l’Islam et de son prophète fondateur, mais reconnait également l’origine divine de la révélation apportée par Muhammad. Il s’agit là de la seule Religion au monde dans ce cas en dehors de l’Islam. C’est pourquoi la persécution dont sont victimes nos coreligionnaires en Iran semble injuste, et éloignée de l’esprit d’amour et de fraternité que nous enseigne l’Islam.
Quelle tristesse. L’islamisme poursuit son oeuvre de destruction obscurantiste. Le reste du monde continue à réagir vaguement, histoire de pouvoir dire qu’il l’a fait.
Le peuple des Bahais vaut visiblement moins qu’une Ingrid Betancourt …
Merci d’avoir parlé d’eux.