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Delanoë empêtré dans le stade Jean-Bouin

Paris / mardi 31 août 2010 par Émile Borne
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En choisissant un nouveau gestionnaire pour le complexe sportif de Jean-Bouin, le maire de Paris veut faire oublier le cadeau fait à Lagardère en 2004. Mais les dessous du dernier appel d’offres sont plus que bizarres.

Grand seigneur avec Chirac contre lequel il renonce à se porter partie civile dans l’affaire des emplois fictifs du RPR, le maire de Paris Bertrand Delanoë rêverait qu’une affaire le concernant finisse par se tasser : celle du Stade Jean-Bouin qui lui vaut plusieurs ennuis judiciaires.

En voulant faire plaisir à ses copains du sport business Arnaud Lagardère, fana de tennis et Max Guazzini, flamboyant patron du Stade Français, club de rugby du Top 14, le maire de Paris s’est fourré dans un sacré guêpier. Plus il veut s’en extraire, plus il risque de s’enferrer comme le raconte Bakchich.

L’odieux du stade - JPG - 15.9 ko
L’odieux du stade
Dessin de Nardo

Un site en or

Tout démarre en 2004 lorsque la mairie refile sans mise en concurrence le droit d’exploiter pendant 20 ans le stade Jean-Bouin à l’association Paris Jean-Bouin. Laquelle est associée au groupe Lagardère qui y installe son fameux Team sportif.

Un site en or que ce complexe situé dans le 16e arrondissement entre le Parc des Princes et Roland-Garros : un stade mais surtout 17 courts de tennis couverts - denrée rare dans Paris – des surfaces de bureaux et plusieurs places de parking. L’association n’a aucune obligation d’investissements. Elle occupe les lieux pour pas un rond ou presque, versant à la mairie un modique loyer de 59 000 euros par an ( plafonné à 100 000 euros), soit 1 euro du m2 ! Bref c’est cadeau. L’association a obligation de sous-louer l’enceinte du stade au club de Guazzini, ce au prix d’ami de 32 000 euros. ( Lequel Stade Français a parallèlement reçu pour 2006 par exemple un coup de pouce de la mairie de 823 225 euros…)

Bien qu’adossé à l’excellent Lagardère, Paris Jean-Bouin perd régulièrement du fric : entre 3 891 euros en 2005 et près de 90 000 euros en 2008. Et comme prévu par convention avec la mairie, c’est au contribuable parisien de casquer ! Paris Jean-Bouin touche ainsi pour 2007 une aide annuelle de 91 470 euros comme l’a noté l’Equipe Magazine.

Pourtant, les rentrées sont loin d’être ridicules : outre les cotisations de ses quelque 8000 membres, environ 130 000 euros par ci grâce à des panneaux de pub, 35 à 40 000 euros par là grâce au loyer que verse le rectorat pour y faire courir les scolaires du quartier, etc.

Aujourd’hui, Delanoë, qui a augmenté les impôts locaux des Parisiens, dispose d’une occasion rêvée de mieux tirer profit du beau patrimoine sportif de la ville. En 2009, la mairie a en effet cassé le fameux contrat de 2004 avec redistribution des cartes à la clé. Le rugby ne fait plus partie du périmètre. Pour faire plaisir à Max Guazzini, Bertrand décide de lui construire un superbe écrin de 20 000 places signé de l’architecte Rudy Ricciotti à la place du vieux stade dont la démolition contestée a débuté cet été.

Un piège

Paris lance donc un appel d’offres pour la gestion de la seule partie tennis de Jean-Bouin. Mais ce marché est aussi un vrai piège pour Delanoe. « Mettre plusieurs candidats en compétition, c’est faire monter les enchères au risque de souligner le manque à gagner flagrant engendré par le cadeau fait à Lagardère en 2004. C’est aussi affaiblir leur défense au pénal » résume un acteur du dossier.

Deux candidats sont en lice : Lagardère qui propose à terme de payer un loyer annuel de 85 000 euros à la Ville. Et Paris Tennis Club, qui offre un maximum de 225 000 euros à partir de 2014.

La bête noire de Delanoë, ce club de tennis ! Son patron, Hervé Picard qui voulait concourir en 2004 est à l’origine de l’instruction au pénal pour favoritisme et prise illégale d’intérêt. Aucun protagoniste n’a été mis en examen, mais l’audition l’an passé par les juges d’instruction de Bertrand, Max et Arnaud a fait du boucan. Et cette épée de Damoclès judiciaire met le maire de fort mauvaise humeur.

Paris Tennis Club a aussi enclenché une partie de ping-pong endiablée entre juges administratifs au sujet de la nature du contrat de 2004. Si le tribunal administratif et la Chambre administrative d’appel jugent que le maire n’était pas en droit de donner Jean-Bouin sans appel d’offres, le Conseil d’Etat – où Delanoë a au moins deux copains bien placés - lui, a passé l’éponge. Courant septembre, la juridiction suprême, appelée à statuer en cassation cette fois-ci, doit trancher ce point capital.

L’argent, c’est pas si important…

Pour revenir à l’appel d’offre, il se termine en fait en eau de boudin. En décembre 2009, la Mairie déclare la procédure « infructueuse » au motif un brin faux-cul qu’aucune proposition ne répond aux attentes notamment sur « le niveau de la redevance versée ». Il reproche au Paris Tennis Club de s’inscrire « dans une logique commerciale à rentabilité immédiate et maximale ».

Rebelote donc avec une seconde consultation lancée début 2010, les offres ayant été déposées en juin. Comme pour freiner toute surenchère, la mairie précise que les candidats seront d’abord jugés sur le projet sportif et le niveau d’investissement proposés. Leurs propositions sonnantes et trébuchantes pèseront moins.

Sans surprise, la Fédération française de tennis (FFT) qui a candidaté avec le Paris Jean-Bouin sortant et la Ligue de Tennis de Paris devrait être retenue à l’issue d’une réunion des élus parisiens ce mardi 31 août. Car en face, il n’y a qu’un candidat, l’acharné Picard avec son Paris Tennis Club. La Ville fait les yeux doux à la FFT qui menace de déménager à Versailles ou ailleurs le tournoi de Roland-Garros, trop à l’étroit Porte d’Auteuil. Avec l’enceinte de Jean Bouin, “Roland“ pourrait s’y étendre et rester dans la capitale. La FFT propose de verser dans un premier temps 40 000 euros à la ville avant de passer à 200 000 euros en 2016.

Pas une si mauvaise affaire…

Bizarrement, ce complexe de rêve a donc suscité peu d’intérêts. Outre Lagardère, cinq candidats ont retiré un dossier auprès de la mairie avant de jeter l’éponge : un groupe d’avocats membre du club, le Stade Français (pas celui de Max), un groupe de gestion d’équipement sportif d’Aix en Provence, un autre baptisé ACP. « Quand on a vu les comptes de l’association sortante transmis par la mairie, on a compris que le jeu n’en valait pas la peine » explique l’un de ces échaudés. En somme, les tennis couverts de Jean-Bouin seraient une mauvaise affaire.

Ainsi pour l’année 2009 – après rupture du contrat - la version des comptes fournie par la ville fait ressortir un maigre résultat d’exploitation de seulement 1185 euros. En contradiction avec les déclarations de Jacques Lelièvre, le propre gestionnaire de l’association Paris Jean Bouin. « Au 31 août 2009, le résultat d’exploitation du Paris Jean-Bouin était excédentaire de 370 508 euros. La bonne santé financière et la qualité de la gestion de notre Club ne peuvent donc être remises en cause » expliquait-il il y a plusieurs mois dans un droit de réponse à L’Equipe magazine. Des résultats 300 fois plus élevés qu’indiqué, ce n’est pas rien !

Et ce n’est pas tout, au cours des deux derniers appels, la mairie s’est fait tirer les oreilles pour communiquer le chiffre d’affaires exhaustif de l’association sortante (recettes liées aux activités obligatoires + recettes commerciales ). S’agissait-il là aussi de dissuader quiconque de se lancer dans une surenchère en présentant l’affaire sous un jour peu reluisant ?

Le 23 juillet, cédant aux demandes de Picard, « par un souci de totale transparence », la Ville finit par communiquer par courrier les trois derniers comptes certifiés récapitulant «  l’activité globale » de Paris Jean Bouin. » ( Et confirmant du coup l’excédent de 370 000 euros ). Ce n’est plus la même chose ! En 2009, l’association a brassé au total 3,3 millions d’euros et pas seulement 1,34 million comme le laisse croire la première version transmise par la ville, qui n’est pas fausse mais incomplète. Idem pour 2008, on passe du simple ou double : 3,23 millions en 2008 au lieu de 1,45 million et ainsi de suite.

Interrogé sur ces chiffres en folie, la mairie n’a pas répondu à Bakchich. On va finir par croire que Bertrand est un petit cachottier.

Documents

En plein été, comme le montre cette lettre adressée le 23 juillet, la Mairie de Paris accepte finalement de transmettre les comptes exhaustifs de l’association gestionnaire sortante du stade Jean-Bouin à l’un des deux candidats de l’appel d’offre en cours. Pour la forme, car la procédure de remise des offres est close depuis plus d’un mois et il n’est plus possible de les ajuster. La fédération de Tennis qui est le candidat favori connaît forcément les comptes d’exploitation du sortant puisqu’elle est associé avec le Paris Jean Bouin :

Lettre de la mairie de Paris à l’association Paris Tennis - PDF - 103.9 ko
Lettre de la mairie de Paris à l’association Paris Tennis

Voici ci-dessous un extrait de la version des comptes minorées du Paris Jean Bouin pour 2009. Petit chiffre d’affaires et maigres bénéfices de 1155 euros :

Les comptes de Jean-Bouin - JPG - 182.7 ko
Les comptes de Jean-Bouin

… et cette fois-ci en prenant en compte toutes les recettes du club, ce n’est plus la même chose. Le bénéfice (indiqué sur le deuxième page) s’élève à plus de 370 508 euros :

 - JPG - 103 ko
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Lire ou relire sur Bakchich.info :

Arnaud Lagardère sera-t-il blanchi dans l’affaire du Stade Jean Bouin à Paris où lui et Bertrand Delanoë se trouvent en mauvaise posture ? Si c’est le cas, il pourra dire merci à un copain du (…)
Il n’y a pas que le tennis et Roland Garros à Auteuil ! L’hippodrome vit ses dernières heures et attise les convoitises voraces de promoteurs.

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2 MESSAGES

Forum

  • Delanoë empêtré dans le stade Jean-Bouin
    le mercredi 1er septembre 2010 à 16:10
    Ha les hommes politiques , ça n’est que magouille et grands arrangements entre amis . Ils n’ont peur de rien et viennent pavaner ensuite à la télévision leurs bonnes actions . Ce sont des malhonnêtes avec un grand M .
  • Delanoë empêtré dans le stade Jean-Bouin
    le mardi 31 août 2010 à 16:46
    Delanoe est le roi de la combine. Il n’y a pas d’argent pour les logements insalubres ou la construction d’HLM. Paradoxalement, il en trouve pour planter des milliers de piquets métalliques tous les 1,5 m sur tous les trottoirs. Il trouve encore des centaines de milliers d’euros pour Paris plage. Cela permet à quelques bobos de venir, entre deux séjours de vacances, exposer leur bronzage sur les quais aménagés avec les impôts des smicards
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