Chaque semaine, Jacques Gaillard ouvre son dico perso et taille un costard aux mots à la mode.
Grâce à un reportage d’un intérêt contestable sur Carlita, on a pu visiter des coins bizarres de l’Élysée. Entre autres, une pièce avec des murs gris souris et une lumière diffuse genre bobinot pour échangistes. De l’art pompidolien, sans doute.
En tout cas, « tout ça est classé », comme le répétait la maîtresse des lieux et du Président, à moins qu’elle n’ait voulu dire « glacé » parce que le chauffage tirait mal. Une chose est certaine : dans ce boudoir glacé classé, on a installé une table de ping-pong bleu Décathlon, ce qui est vraiment classe. Bon, quelques trotskistes prétendent qu’il y a aussi un jokari planqué dans la salle d’audience des ambassadeurs et un diabolo dans le tiroir du Président. Quant aux jeux sur le mobile, ils rendraient moins longuets les sommets européens, et notre jeune monarque aurait longtemps cru que G20 était un coup gagnant à la bataille navale.
Certes, on pourrait se demander qui paie tous ces joujoux. La Cour des comptes a l’œil sur ça, c’est sûr. Alors, saluons cette invasion du politique par le ludisme, en parfait unisson avec le mouvement de désintellectualisation des loisirs qui est le signe de la modernité, selon le boss. Pédaler en rond autour du lac Daumesnil, gerber son Benco en joggant comme un djeun, jouer au babyfoot avec MAM , se faire expliquer le sudoku par le subtil Hortefeux, c’est, de sa part, montrer le bon exemple. Et faut-il vraiment féliciter le futile Mitterrand de l’avoir dissuadé de faire écrire « Lire tue » sur tous ces livres qui cancérisent nos lycéens en les éloignant du stade anal ?
On polémique pour savoir si les kitscheries de Koons ou de Murakami ont leur place au château de Versailles. Soyons justes, c’est un sale coup pour l’art contemporain : les ors et la belle harmonie qu’aimait ce bouffon de Roi-Soleil désavantagent considérablement leurs bibelots de plastoc vachement pensés, et donc difficiles à apprécier. Mais en fait, on a échappé au pire : si on avait confié la galerie des Glaces à Nicolas Ier, il y aurait peut-être installé un bowling !