Chaque semaine, Jacques Gaillard ouvre son dico perso et taille un costard aux mots à la mode. Campagne, n. f. : espèce de pâté(e).
Depuis trois mois, il n’est question que de la pâtée que Sarko and Co vont se prendre aux régionales. Et tout le monde trouve ça normal. Pourtant, il n’est pas courant qu’un score s’impose aussi longtemps à l’avance : même pour la qualification de l’équipe de Domenech, le suspense a duré jusqu’au bout, et il y a même des allumés qui « y croient » pour juillet. Là, on en viendrait à penser que l’Elysée manoeuvre par des sondages péremptoires pour que les râleurs aillent aux pissenlits plutôt qu’à l’isoloir, en considérant que le coup est joué…
C’est peut-être le cas, puisque le monarque va bousiller ces régions qui donnaient des pions à l’adversaire. Françaises, français, vous allez voter pour des sursitaires, d’ici deux ans, on les remplacera par des vrais pros quasiment désignés d’office par un mode de scrutin encore inconnu dans nos institutions, obtenu par croisement entre le berlusconisme, la sélection de Miss France et le concours général agricole.
D’où ces surréalistes images de campagne : des tête de liste UMP, ministres quelquefois, baillant à 7 heures du mat’ sur un quai de gare désert, ou se défendant d’être des agents d’assurance lors d’un porte-à-porte laborieux ; des zombies roses sur les marchés, taillant le bout de gras avec le poissonnier, avec l’aisance des sortants et l’illusion d’être populaires ; des gauchistes enfoulardés et des lepénistes diaphanes (leur objectif, ces quelques sièges-morphine pour survivre, est garanti). Sans, de temps en temps, un couinement de Xavier Bertrand, à qui, décidément, ne manque qu’un nez rouge, Hamon n’aurait rien à dire, et ce serait calme plat.
Si le seul enjeu du vote reste la couleur politique de l’Alsace, à quoi bon s’exciter ? Tout se passe comme si tout allait bien. Finalement, Sarko ne s’en sort pas mal…
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