Sarkozy et Delanoë, les Halles du désir

Décidément, c’est l’amour fou entre Bertrand Delanoë et Nicolas Sarkozy. Après l’accord financier conclu entre la Ville de Paris et l’UMP pour solder l’affaire des emplois fictifs de l’époque chiraquienne, l’État vient à son tour de retirer une épine du pied du maire de la capitale.

Elle concerne le pharaonique chantier de « relookage » des Halles (galerie commerciale, équipements publics, jardin, stations de RER), grâce auquel Bertrand rêve de laisser sa trace dans l’Histoire. Et qui en laissera certainement une belle dans les finances de Paris. Chiffrée officiellement à 760 millions d’euros - hors taxe et hors dérive financière – l’opération doit être payée aux deux tiers par les Parisiens. « Unibail Rodamco, le propriétaire des Halles se fait tirer l’oreille pour passer à la caisse » constate un élu de la majorité.

Daniel Canepa, le préfet d’Ile-de-France, avait jusqu’au 15 septembre pour saisir ou non le tribunal administratif sur la boulette juridique commise par la mairie : au lieu de signer un avenant de 255 000 euros avec l’architecte chargé des jardins, Delanoë aurait dû lancer un nouveau marché. « Échec et mat et retour à la case départ » : Pierre Lellouche, un des leaders de l’UMP parisienne, triomphait, en juin, en pointant ce faux pas.

Mais, entre-temps, un arrangement a été conclu entre la Ville et le représentant de l’État, moyennant une réduction de la durée du contrat avec l’architecte. Depuis, Lellouche est devenu aphone. Seul empêcheur de tourner en rond à droite, le maire UMP du Ier arrondissement, Jean-François Legaret, a prévu de lancer deux recours contre le projet.

En passant l’éponge, l’État évite d’être la cause de nouveaux retards dans ce projet imaginé par Delanoë dès 2001, et qui patine dur : concours d’architecture mal barré, choix contesté de David Mangin pour redessiner le jardin, doutes sur la faisabilité technique de la canopée – cette audacieuse verrière censée coiffer le trou du centre de Paris –, recours multiples, etc. L’association de quartier Accomplir a fait stopper provisoirement les tronçonneuses qui doivent décapiter les 343 arbres du site. Résultat, rien n’est encore sorti de terre, alors que le maire trépigne dans l’attente d’inaugurer son joujou avant la fin de son mandat, en 2014.

Zizanie à gauche

Aujourd’hui, beaucoup glosent sur les si bonnes relations entre la Ville et l’Élysée, qui s’illustrent dans d’autres dossiers comme le maintien du tournoi de Roland-Garros à Paris. « Sarkozy fait tout pour amadouer Delanoë et créer un front entre lui et Huchon, le patron PS d’Ile-de-France, au sujet du Grand Paris », analyse un élu de gauche. Le maire de Paris a d’ailleurs été à deux doigts d’accepter de présider l’atelier destiné à cornaquer les architectes du Grand Paris.

Dessin de K.Pavel

L’accord financier avec l’UMP serait un coup de maître de Sarko. « Depuis, Delanoë est cramé au PS qui, à Paris, est tenu par les strauss-kahniens, juge le même élu. Et tout ce qui l’affaiblit affaiblit sa dauphine, Anne Hidalgo. » Semer la zizanie à gauche avant les municipales, c’est le B.A. BA.

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